Il y avait une cause aux actions des hommes ; une raison pour laquelle certaines vies tournaient bien, et d'autres mail. Cette évidence ne l'avait jamais effleurée. Comme si la bonté était en soi une sorte de paradis parfait, et qu'elle avait pu évaluer la distance qui l'en séparait, si elle avait pris le temps d'y réfléchir.
Les buissons de pivoines fleurirent, laissant éclater leurs riches boutons chinois en nids de pétales larges comme des soucoupes de thé, lourds de rosée, blancs et roses.
Le froid était glacial, l'air électrique, chargé de tout ce qui allait advenir.
Elle portait une jupe noire raide et une veste courte ,noire également.Elle avait choisi un chapeau à voilette.Bien qu'elle n'eût aucune raison de rechercher l'anonymat, elle voulait dresser un écran entre elle et l'homme qu'elle avait attendu si patiemment de voir.Prise en étau entre ses propres dėsirs et le besoin de Truitt de donner vie à un rêve qui ne pourrait jamais se réaliser à nouveau,quoi qu'il fît,elle ressentait une angoisse profonde et complexe.Avant l'arrivée de Fisk et de Malloy, elle commanda un verre de sherry ,qu'elle avala d'un trait,et elle sentit la chaleur et le calme inonder son corps.Elle fut parcourue d'un frisson presque érotique ,ce goût d'autrefois,cette onde de chaleur,et elle en voulut un autre ,un autre puis encore un autre.Au lieu de quoi,elle lava le verre et se rinça soigneusement la bouche Jusqu'à ce qu'il n'y eût plus aucune trace ,et elle attendit le coucher du soleil.
Il avait hâte de vérifier que ce désir en lui était de la vie, pure et nette, encore informe et intacte. Une vie qui vaille celle de n'importe qui d'autre. La vie la plus nette qu'on eût jamais vue. Parfaitement saine.
Elle croyait aux miracles. Du moins elle y avait cru, jusqu'à l'âge où, brusquement, elle avait compris que cette vie qu'elle vivait n'était autre que sa vie.
Il avait des manières parfaites ; un comportement calme et digne ; ses désirs le déchiraient au-delà du supportable.
Ses appétits étaient insatiables, sa bouche avide se tendait vers le désir comme celle d'un homme en train de mourir de soif dans le désert.