Ce livre est l'histoire de deux soeurs et un frère, Dounia, Mina et Mourad, de leur mère et de leur père, surnommé le padre. Précision liminaire importante parce que la quatrième de couverture insinue que le personnage principal est Mourad, ce qui est discutable. Dounia et le padre sont aussi importants.
Toujours en rapport avec cette présentation contestable (
Faïza Guène a-t-il eu son mot à dire ?), une autre remarque est indispensable : ce livre est plein d'humour mais pas seulement. La tendresse est aussi une donnée essentielle de cet ouvrage dans la droite ligne des Ritals de Cavanna. Un simple coup d'oeil aux nombreuses citations relevées par les babéliotes vous permettra de vérifier par vous-mêmes. Et puis, même si le livre a près de 10 ans, les réflexions sur le voile, sur la double culture, sur « c'est quoi être intégré, c'est quoi être assimilé ? » sont posées avec intelligence, avec mesure.
Déformation professionnelle oblige, les passages où Mourad découvre les arcanes de son métier de professeur certifié dans un collège du 93 m'ont permis de me fendre la poire. J'ai moins apprécié certains personnages secondaires trop « cliché » : la bimbo de l'avion, le cousin gigolo ou le ministre bobo.
J'attendais gentiment la fin en redoutant de finir par m'ennuyer des aventures de cette famille et puis, la fin, mes amis. Splendide, puissante, inoubliable… Je le jure sur la tête de Sim, Oualaradime !
J'ai beaucoup d'affection pour ce récit parce qu'il est un hommage pudique à des gens qui ont décidé un jour de quitter leur pays pour gagner leur vie, ou pour étudier, ou par amour, ou par curiosité. Ils sont restés, ont eu des enfants, des petits-enfants qui ressemblent à certains de mes amis, à beaucoup de mes anciens élèves, à certains de mes anciens collègues..
Si la France est aussi belle, elle ne le doit pas seulement à ses racines judéo-chrétiennes mais à ses influences multiples, qui depuis toujours, l'ont façonnée. Que demain, peut-être, elle puisse être dirigée par un parti qui a toujours vomi l'altérité, continue d'alimenter mes cauchemars. Hors-sujet ? Non ! Je ne crois pas. Ou du moins j'assume complètement mon universalisme.
En tout cas, ce livre m'a rappelé les très beaux mots de Roman Kacew, dit
Romain Gary, dit
Emile Ajar : « « Je n'ai pas une goutte de sang français mais la France coule dans mes veines…»