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EAN : 9791031201092
167 pages
Editions Ateliers Henry Dougier (16/01/2020)
3.5/5   6 notes
Résumé :
Deux cheminotes, deux témoignages, deux tranches de vie qui retracent avec beaucoup d'humanité l'univers de la SNCF.
« Mai 1959 arriva, avec la confirmation de mon commissionnement, l'octroi de ma carte SNCF : enfin j'étais une cheminote à part entière, enfin j'avançais, la roue commençait à tourner. »

Michelle Guillot est née en 1938 à Nice où son père travaillait aux ateliers SNCF. La guerre finie, la vie reprend son cours à Saintes, rythmé... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique

N° 1425 - Janvier 2020.

Fières d'être cheminotes. Michelle Guillot - Denise Thémines - Éditeur Ateliers Henry Douglet.

Je remercie des éditions "Ateliers Henry Douglet" de m'avoir fait découvrir ce livre.
Même si les choses changent de nos jours, être cheminot, à la moitié du siècle dernier, c'était principalement un monde d'hommes où les femmes étaient rares, souvent cantonnées dans les bureaux. le train pour les "roulants" était une fierté, comme leur métier, et lorsque que, au hasard de leurs voyages, ils rencontraient un collègue inconnu, leurs conversations étaient bien entendu consacrées au rail. A l'époque, travailler aux "Chemins de fer" était une référence même si les mutations supposaient des déménagements, les machines à vapeur avaient une sorte d'aura de puissance mystérieuse, les voitures, même celles inconfortables de 3° Classe ou les "Michelines" des omnibus, étaient le symbole du voyage, du départ et et le train était un moyen de transport fort prisé et pratique. le travail terminé, les agents se croisaient souvent dans les jardins où à "l'économat" qui leur étaient réservés. Ces images ont un écho particulier dans ma mémoire intime.
Michelle Guillot évoque sa vie personnelle et familiale, avec ses bons et ses mauvais moments, et surtout son parcours au sein de ce service public qui était la vitrine du pays puisque, fille d'un agent SNCF, il était naturel qu'elle embrassât elle aussi cette carrière. Elle y décrit ses craintes du début, ses efforts d'adaptation, les différentes phases de son avancement qui l'a promue à un poste d'encadrement, fonction bien souvent réservée aux hommes, une fierté, l'atmosphère de travail qui régnait au sein des services... Il y a beaucoup de détails techniques et de routine administrative, des listes de tâches, des précisions réglementaires, des organigrammes hiérarchiques, des évolutions vers la modernité et la communication, autant d'explications un peu rébarbatives pour le profane, mais qui ont valeur de témoignage puisque ce texte a reçu en 2018 un premier prix interne dans la catégorie "Mémoire". A cette époque, être cheminot signifiait appartenir à une grande famille que fédérait le magazine "La vie du rail" et qui pour elle correspondit à la découverte et aux plaisirs de l'écriture. le style est spontané, précis, anecdotique, sans fioriture littéraire.
Le travail de Denise Thémines est un peu différent, plus court, mais distingué lui aussi par le même Prix, mais dans la catégorie "Récits". Si la plus grande partie de la carrière de Michelle Guillot s'est déroulée en province, celle de Denise Thémines a été parisienne et commence après mai 68. Si elle ressent la même appréhension compréhensible de départ, elle note l'originalité de ses collègues les plus folkloriques, profite des moments d'inaction pour lire, découvre petit à petit ce "monde parallèle", ses avantages sociaux, son côté machiste aussi. le ton est donc un peu différent. Toutes les deux évoquent leur carrière et surtout leur attachement à cette entreprise à laquelle elles rendent un hommage reconnaissant, toutes les deux ont donné un nouveau sens à leur vie à travers l'écriture.
Il s'agit donc d'un recueil collectif qui donne la parole à deux femmes, par ailleurs distinguées par le même prix. Il paraît au moment où, hasard du calendrier peut-être, ce "régime spécial" est remis en cause au nom de la réforme des retraites, ce qui a provoqué grèves et paralysies dans le pays. Les conditions de travail ont changé, l'ambiance aussi et il a été souhaité que ce changement soit relaté à travers le vécu "autobiographique" des cheminots auquel différentes associations professionnelles sont attentives et qui a fait l'objet en 2018 du concours "SNCF 80 ans"qui couronna ces deux témoignages. Cela correspond également à l'état d'esprit de cet éditeur et de sa collection "Une vie, une voix".
©Hervé Gautier http:// hervegautier.e-monsite.com
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Pour commencer, le titre est à lui seul l'illustration parfaite de l'état d'esprit de ces deux femmes et de la réalité de ce monde. Premièrement la notion de fierté qui est présente pour absolument tous les cheminots. Deuxièmement, la place des femmes, il est vrai est encore pour cette époque quasi-invisible.

Depuis les quasi-début du chemin de fer, les femmes ont joué un très grand rôle dans ce monde d'hommes, mais leur histoire dans ce milieu est encore aujourd'hui très mal connue pour beaucoup d'entre nous.

Contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, le terme « cheminot » ne désigne pas un métier, Par définition simple, il désigne un statut accordé par l'État aux gens qui travaillent aux chemins de fer. Mais à la lecture de cet ouvrage, il se dégage aussi de ce mot une notion, un sentiment. Pour ces individus, le fait de participer au fonctionnement des chemins de fer et de les faire évoluer leur confère un sentiment d'appartenance à une grande famille : la SNCF. de ce fait, les cheminots ne se sentent pas comme les autres. Ils appartiennent à un univers que eux seuls connaissent. Ce monde de gares, de voies, de signaux, de trains et de termes spécifiques est absolument incompréhensible pour le voyageur profane.

Il ne faut pas se voiler la face, les emplois aux sein des chemins de fer sont très majoritairement détenus par des hommes. Par cette réalité, les récits de cheminots sont souvent écrit par des hommes. Naturellement, nous pensons tout de suite à La Bête Humaine d'Émile ZOLA. D'autres, comme nos détractrices, ont décidé de raconter leurs souvenirs et leurs métier. Henri VINCENOT ancien employé de gare écrit en 1981 Mémoires d'un enfant du rail où il raconte son enfance et ses débuts professionnels. Jacques TONNAIRE, ancien mécanicien écrira La Vapeur, publiait lui aussi en 1981 pour raconter et décrire le métier de la vapeur, alors disparu. Une seule chose se distingue particulièrement de ces récits, tous confondus : la fierté d'appartenir au monde cheminot.

Plus que des témoignages professionnel, ce sont des récits de vie, la description de métier qui sont absolument invisibles et ignorés par les voyageurs.

Depuis plusieurs années déjà, ce monde cheminot s'efface. Ce sentiment d'appartenance semble se désagréger de l'intérieur comme beaucoup d'autres identités professionnelles. Victime de son temps ? Peut-être … Désagréger par la montée de l'individualisme ? Peut-être aussi …
Le témoignage de ces deux femmes cheminotes en retraite accentue l'effacement de cette identité qui a uni tant d'individus dans la dureté de leur métier.
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Pour ses 80 ans, la SNCF a proposé un concours autobiographique. Cet ouvrage est constitué des lauréates dans les deux catégories Mémoire et Récit.
Alors que le monde ferroviaire est resté pendant longtemps très masculin, les deux gagnantes sont des cheminotes ce qui rend leur récit doublement intéressant : il s'agit bien évidemment de deux témoignages sur la vie dans cette entreprise, mais aussi sur l'émancipation féminine. L'une a commencé sa carrière en 1958 et l'autre en 1969 : elles sont donc des pionnières dans leur domaine même si chacune d'entre elle était affectée à un travail administratif (la conquête du roulant sera pour la génération suivante), l'une en région parisienne et l'autre en province.

Il s'agit de témoignages ; donc même s'ils sont mis en forme, ils ont un côté brut et parfois très technique (un peu trop pour « un extérieur » à la SNCF). L'un des récit extrapole tout de même sur la vie privée.
Ils retracent un monde bien loin des modes de travail actuels (par exemple le traitement à la main de fiches et des listes de taches, les organigrammes complexes) et des conditions de travail…pourtant c'était quasiment hier !
Le lecteur retiendra également la fierté de travailler à la SNCF qui ressort de ces pages.
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Cette couverture originale m'a donné envie. Car la lecture de ces deux récits montre qu'elles le sont fières, ces femmes, d'avoir fait mieux que survivre dans le monde essentiellement masculin de la SNCF des années 60, elles ont découvert un métier aux structures administratives complexes et avancé pas à pas dans l'échelle hiérarchique à gros efforts d'adaptation et de volonté.

J'ai aimé suivre Michelle. Elle raconte comment toute jeune elle est entrée dans cette grande machine qu'est la SNCF et comment à l'époque il était possible d'apprendre un métier "sur le tas". Elle n'avait pas de diplômes mais la farouche volonté de réussir là où on ne l'attendait pas. Avec courage et pugnacité elle s'est adaptée à chaque poste jusqu'à encadrer des équipes avec succès et reconnaissance. Elle a mené une carrière qui ne ferait pas à l'heure actuelle un film, pas d'héroïsme, pas de tapage, mais du courage et de la ténacité qui ont permis, à l'heure de la retraite, de sentir qu'elle a fait et bien fait ce qu'il fallait, qu'elle a fait sa part. Il est amusant de sentir à travers ses lignes, écrites de façon précise et factuelle, cette odeur de bureau, de registres remplis consciencieusement à l'encre rouge, bleue, noire. C'était l'époque des stencils, des carbones, des carnets, des coursiers. J'ai compati lorsqu'elle a abordé la question des roulements du personnel... casse-tête ferroviaire par excellence et à l'époque il n'y avait pas d'informatique...

Denise relate dans un Court récit-nouvelle la petite histoire de sa vie à la SNCF, les anecdotes qui font le sel de la vie professionnelle. Autre style mais une immersion dans ce milieu masculin par excellence.

Pas de thriller donc, pas de "page turner" mais des morceaux de vie, précieux témoignages d'une époque révolue mais qui a tout de même contribué à l'émancipation des femmes par le travail.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
…j’avais un grade d’homme puisque personne ne disait jamais « inspectrice ». J’éprouvais la joie d’avoir fait aussi bien qu’un représentant de la gent masculine et quand les noms des métiers, je trouve cela ridicule.
Ce qui était ma fierté à ce moment là devrait être une déconvenue à l’heure actuelle ? – p.93
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Je me suis cependant vite rendu compte que ce projet que je couvais n'avait pas l'adhésion de tous. Entre les "pro" et les autres se trouvait toute la gamme des incrédules et de ceux qui n'attendaient plus que la retraite. Alors, à chaque fois que cela était possible, je me suis attachée à simplifier les tâches, à raccourcir les circuits pour leur démontrer le bien-fondé de notre organisation plutôt que d'essayer de les convaincre. Combien de fois ai-je entendu "Oui, mais avant..." ?
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