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Johan-Frédérik Hel-Guedj (Traducteur)
EAN : 9782228933346
448 pages
Payot et Rivages (17/05/2023)
4.17/5   3 notes
Résumé :
Il y a vingt ans, pour la première fois, on dénombrait plus de régimes démocratiques que de dictatures ; quelques années et une crise économique mondiale plus tard, les régimes autoritaires sont de nouveau plus nombreux. Comment les dictatures ont-elles fait pour prospérer après Staline, Hitler et Mao ? Pour asseoir leur pouvoir, les dictateurs classiques du XXe siècle utilisaient une arme : la terreur. Le XXIe siècle a vu surgir une nouvelle génération de dictateur... >Voir plus
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Dans la préface de leur ouvrage significatif, l'économiste Sergueï Gouriev et le politologue Daniel Treisman indiquent qu'au début du XXIe siècle pour la première fois dans l'Histoire du monde le nombre de pays démocratiques dépassait celui des pays autoritaires : respectivement 98 pays contre 80.
À peine une décennie plus tard, en 2019, le nombre de démocraties avait chuté à 87 pays, tandis que le nombre de régimes autoritaires était remonté à 92 pays.
Les raisons de ce recul s'expliquent essentiellement par la crise économique, la présidence de Trump qui a hypothéqué la croyance dans les avantages du système démocratique, la montée météorique de la Chine comme puissance, et en Occident la croissance du populisme.

L'objectif du présent ouvrage consiste à essayer d'expliquer la nature même des régimes autoritaires actuels, comment ils ont émergé, comment ils fonctionnent, quelle menace ils constituent pour les États démocratiques et comment l'Occident peut au mieux relever ce défi.

Pour le faire les auteurs se sont basés sur leur propre expérience entre autres avec le régime poutinien, ainsi que sur les avis d'une impressionnante liste d'experts, tels Peter Pomerantsev et la professeure Barbara Geddes.

Signalons que Sergueï Gouriev, né en 1971 à Vladikavkaz en Ossétie du Nord, a été chef économiste de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) et depuis l'année dernière directeur de la formation à l'Institut d'études politiques (IEP) de Paris.
Daniel Treisman est professeur en sciences politiques à l'université de Californie à Los Angeles et l'auteur de "The Return" ('Le retour : la Russie de Gorbatchev à Medvedev' de 2012, hélas non traduit).

Les auteurs constatent que le temps des dictateurs violents avec des millions de morts, du genre Hitler, Staline et Mao, est révolu.
Par analogie du terme "spin doctor" , en Français correct "façonneur d'image", ils proposent pour les dictateurs d'aujourd'hui la notion de "spin dictator". C'est-à-dire un autocrate qui se sert de conseillers en communication et marketing politique pour imposer ses vues, plutôt que le recours brutal à la menace et à la violence.
Le verbe "to spin" signifie faire tourner ou broder un récit.
Simon Kapita dans la série télévisée française "Les hommes de l'ombre" est un bel exemple de spin doctor.

Le pionnier dans ce domaine est incontestablement Lee Kuan Yew (1923-2015) Premier Ministre de Singapour de 1959 à 1990, soit 31 ans, 5 mois et 23 jours.
Son exemple a été repris dans des formes variées et avec plus ou moins de succès par une ribambelle de despotes, parmi lesquels Poutine en Russie, Hugo Chávez au Venezuela, Nazarbaïev au Kazakhstan, Alberto Fujimori au Pérou, RecepTayyip Erdoğan en Turquie, Viktor Orbán en Hongrie...

Les auteurs ont décidé, par souci de comparaison, de ne retenir dans leur ouvrage que les dictateurs qui sont au pouvoir au moins pendant 5 ans, qui organisent des élections plus ou moins truquées, contrôlent les médias, adaptent la constitution, ont un certain nombre d'opposants en prison et en font disparaître d'autres.

Il est évident que l'avènement d'internet a joué un rôle déterminant dans l'évolution des dictateurs qui régnaient par la terreur et la peur aux dictateurs manipulateurs d'aujourd'hui.
Un exemple extrême en est l'IRA "Internet Research Agency" créée en 2013 à Saint-Pétersbourg par l'horrible Evgueni Prigojine comme officine de propagande russe, permettant à Poutine d'interférer notamment dans les élections aux États-Unis en faveur du génial Trump en 2016.

Sergueï Gouriev et Daniel Treisman ont eu la bonne idée d'illustrer les résultats de leurs recherches par une multitude d'exemples concrets, qui rendent la lecture de leur ouvrage plus vivant et captivant, sans que leur thèse ne perde sa rigueur ou valeur.
Sur les 351 pages de l'ensemble, il y a 47 pages de notes explicatives, 58 pages de références précises et un index final de 14 pages.

Je termine par un petit exemple typique de leur approche et style :
" Si Staline était un dieu, Poutine est devenu une marque déposée. "
À propos de l'évolution du culte de la personnalité d'antan à la propagande russe actuelle. (page 78).
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
En résumé, à l'inverse des dictateurs de la peur du XXe siècle, les spin dictators actuels restreignent la presse avec une très nette partialité, généralement secrète ou camouflée et, malgré des exceptions, sur un mode non violent. Ils accablent les médias indépendants de procès, de réglementations arbitraires, de pressions commerciales et de pseudo-problèmes techniques. Au lieu d'interdire totalement les messages critiques, ils font en sorte que l'opinion s'en détourne, la noient sous des flots d'informations confuses ou perturbantes et discréditent leurs sources. Ils se servent de techniques similaires pour parasiter les discussions politiques en ligne. Bien que ces manœuvres ne parviennent pas à compenser indéfiniment des résultats objectivement mauvais, tout tend à démontrer que cela peut fonctionner pendant un temps, en sapant la capacité des élites à mobiliser les citoyens contre le régime. Le but du dictateur est constamment d'entretenir un haut niveau de popularité parmi les masses, tout en isolant et en marginalisant les gens informés, qui savent voir clair dans les mensonges des médias.
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