Pulp frictions

J'avais bu pas mal de whiskies au Blue Dinner avant de m'affaler à 2 heures du matin sur le canapé râpé de mon bureau situé au 4ème étage d'un immeuble vétuste en plein centre de Los angeles quand la sonnerie du téléphone me tira d'un cauchemar récurrent depuis que j'avais été démobilisé quelques années auparavant.
- Allo, Sam Hammer ?
- Qui... le demande ? bafouillai-je d'une voix pâteuse et endormie.
Le type au bout du fil ne répondit pas à ma question.
- Tu veux savoir qui a buté ton associé Philip Archer ?
Instantanément je me réveillai et secouai la tête en fourrageant dans ma tignasse brune emmêlée.
- Je t'écoute.
Trois minutes après, j'avais ajusté mon holster d'épaule où je glissais mon Colt 45 d'ordonnance, enfilé mon imper et enfoncé mon feutre sur la tête pour affronter la pluie de la nuit. Je grimpai dans ma de Soto qui avait connu des jours meilleurs et fonçai vers la boite dirigée par al Ricco, un truand notoire, à l'angle de Sunset de de Marlborough Street. Je garai ma caisse le long du trottoir et coupai le V8 et les phares pour me plonger dans l'obscurité à l'écart de l'enseigne lumineuse du bouge qui clignotait en rouge et en vert en se reflétant sur l'asphalte luisant. J'allumai une Lucky Strike et repoussai mon chapeau sur l'arrière du crane en pensant à Archer. Philip Archer qui m'avait sauvé la vie à Guadalcanal et avec qui j'avais monté cette agence de détectives privés au retour de la guerre. Philip Archer qui avait pris une rafale de thompson trois jours auparavant dans un guet-apens qui m'était destiné alors que j'enquêtais, pour faire bouillir la marmite, pour le compte d'une épouse trompée par son mari, vieux bonhomme libidineux attiré par les collégiennes et accessoirement comptable pour la mafia californienne. Je jetai le mégot par la fenêtre quand la porte du dancing s'ouvrit sous la poussée d'un videur qui mesure bien 1,95 mètre et pèse environ 120 kilos et qu'une longue Cadillac noire vint se ranger devant l'entrée. al Rocco et une poupée blonde en robe fuseau lamée accrochée à son bras s'engouffrent alors dans la limousine pour éviter les trombes de pluie qui tombent sans discontinuer depuis la veille. Juste avant que le couple ne soit à l'abri, un éclair, suivi immédiatement d'un roulement de tonnerre puissant, illumine la blonde. Elle tient à la main un bouquin, exactement comme l'a dit la voix anonyme au téléphone. le livre s'intitule Pulp Frictions. C'est un recueil de nouvelles noires écrites par les maître du genre, de Chandler à Ellroy, en passant par Hammet et McBain ou encore Spillane, Cheyney, Mac Donald et Cornell Woolrich, plus connu sous le nom de William Irish. le type au téléphone m'a assuré que j'y trouverai le nom de l'assassin de mon ami et quand je saurai qui c'est, je lui viderai le chargeur de mon automatique dans les entrailles.