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EAN : 9782378561147
128 pages
Verdier (26/08/2021)
4.19/5   26 notes
Résumé :


Monsieur Faustini habite Hörbranz, une petite bourgade sur les hauteurs du lac de Constance. Célibataire retraité, il vit seul avec son chat. Il porte depuis des années le même veston avec lequel il a fini par « ne plus faire qu’un », et qui est devenu « sa demeure, son repaire, sa carapace, sa livrée de paon ». De temps en temps, Monsieur Faustini prend l’autobus et se rend à Bregenz, la grande ville toute proche, où il se promène au bord du lac…>Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Quel délice que ce petit livre. Il ne s'y passe pourtant rien, pour ainsi dire. M. Faustini, le personnage principal, est un retraité, qui a connu un vie de travail au bureau, sur laquelle l'auteur ne nous fournit aucune précision. Comme il ne nous fournit pour ainsi dire aucune précision sur une vie de famille, jusqu'à l'apparition d'une soeur, qui jouera un rôle important dans le récit.

M. Faustini vit seul, comme il semble l'avoir toujours fait, si on excepte son chat, un chat sans nom, mais à la présence certaine. Il ne semble avoir aucun hobby, aucun passion, aucun intérêt marqué pour une activité ou domaine. Son activité principale semble être la flânerie, dans les environs de sa maison, mais aussi dans les localités voisines, c'est un amoureux des autocars et des trains locaux. Il a ses petits circuits, qu'il a n'a pas vraiment envie de dépasser. Mais n'importe quel petit événement, n'importe quelle rencontre, aussi banale soit-elle, sont source d'émerveillement et d'interrogations pour M. Faustini. Un paysage ou un lieu, même très bien connus, peuvent provoquer une forte résonance, chez notre personnage.

M. Faustini pourrait sembler être un naïf, un éternel optimiste, mais l'air de rien, par petites touches, une ironie affleure de ses descriptions du monde tel qu'il le voit. Sa visite au Liechtenstein pour ouvrir un compte est par exemple au final un tant soit peu féroce, de même que le vernissage d'art moderne auquel il assiste un peu par hasard. le tour de force de Wolfgang Hermann consiste à garder sa bienveillance profonde au personnage, tout en se montrant presque féroce, en tous les cas terriblement drôle. Mais M. Faustini semble ne pas se rendre compte de ce qu'il met à nu, comme un véritable naïf, personnage décalé dans le monde, dans lequel tout lui paraît exotique, et dont il rend compte en se contentant de décrire, comme il le ferait dans un endroit lointain, où tous les repères sont abolis.

Mais M. Faustini doit se mettre en route, déplacer ses repères. En effet, sa soeur l'invite à son anniversaire. Elle a beau habiter en Suisse, pas très loin au final, le voyage prend les allures d'une épopée. Il faut dire que M. Faustini choisit le trajet en transport le plus long. Ce voyage sera source de bonheurs, de regrets et de changements. Et même s'il part rapidement, peut-être aussi par peur de voir sa vie lui échapper, le goût de l'aventure semble avoir été semé. Et se traduira par un autre voyage, plus improbable, et sans doute métaphorique, dans un final surréaliste qui résume tout le roman.

J'ai pris un plaisir fou à cette lecture. Tellement que le finir a été difficile. D'autant plus, que les nombreux, semble-t-il, écrits de Wolfgang Hermann, dont plusieurs romans consacrés à M. Faustini, n'ont pour ainsi dire pas été traduits. Il ne me reste plus qu'à espérer que les excellentes éditions Verdier vont continuer à publier cet auteur, qui mérite incontestablement de l'être.
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Drôle de lecture. de celle qui peut nous laisser au bord de la route comme nous prendre dans ses filets.
J'ai aimé déambuler avec Monsieur Faustini, j'ai aimé le suivre dans ses pérégrinations et ses cocasses réflexions. Un émouvant personnage un peu simplet au premier abord mais qui gagne en profondeur au fur et à mesure de ses aventures.
« [...] ce n'est qu'en nous détachant des biens de ce monde que nous jetons bas notre fardeau, et que de tout autres chemins s'ouvrent à nous. »
À lire comme on irait marcher en forêt, comme on partirait en voyage, pour remplir cet instant de vide, le dépouiller de tout sens, pour ralentir le rythme, s'oxygéner d'air respirable, laisser ses pensées vagabonder, s'émerveiller d'un rien. Une lecture teintée de burlesque et d'humour, et beaucoup de tendresse, qui fait réfléchir. Pour moi, c'est une lecture qui fait sens.
« Au loin le lac était piqueté de voiles blanches. le souffle qui montait de ses eaux d'un bleu profond lui effleurait le visage avec force qu'il se sentit comme suffoqué de bonheur. M. Faustini pressentait confusément que se cachait derrière le mot voyage, pour anodin qu'il fût, une succession sans fin d'impressions propres à soulever le coeur, et susceptibles de vous procurer des sensations fortes comme vous n'en aviez jamais connu encore. »
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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La première scène fait pénétrer le lecteur dans l'antre de Monsieur Faustini, retraité et célibataire, qui a une vie simple faite de rituels, tel nourrir son chat et laisser Maria faire le ménage de la maison.
Ménage qui déménage car la bonne dame serait plutôt maladroite et le nombre d'objets cassés ne se calcule plus…
Monsieur Faustini préfère faire comme le chat s'éclipser de chez lui à pas feutrés.
Où aller ? Sur les bords du lac de Constance.
« M. Faustini n'était pas à proprement parler un homme farouche. Mais il ne mettait rien au-dessus de sa tranquillité et aimait jouir en paix de la vue sur le lac. A côté du monsieur d'un certain âge qui, vêtu d'un slip de bain réduit à sa plus simple expression, la peau roussie par le soleil, s'était assis sur sa serviette à moins d'une vingtaine de pas de lui, M. Faustini se démarquait assurément. »
La retraite c'est ne plus avoir d'obligations mais si elle n'est pas préparée, c'est aussi devenir « transparent » au mieux, « invisible » au pire. Surtout lorsque comme tout le monde il a espéré « offrir à quelqu'un chaleur, sécurité et protection » mais qu'aucune femme n'est entrée dans sa vie.
Pour Monsieur Faustini chaque rencontre, ne fût-ce que de quelques minutes, est une fête, pour lui seul.
Il imagine facilement que les autres ont des vies faites de mille promesses…
Chaque évènement peut être un obstacle, par exemple trouver un cadeau d'anniversaire pour sa soeur.
L'incursion de notre héros dans un salon de beauté est des plus savoureuse, voire hilarante. Tout à son importance.
La vie c'est simple comme un coup de fil, disait un slogan il y a quelques années déjà, mais ce slogan suranné pourrait aller à la perfection à Monsieur Faustini.
En peintre de talent, l'auteur façonne les traits nécessaires à son tableau figuratif qui devient une peinture impressionniste, après y avoir déposé mille touches de couleur lorsque notre héros malgré lui sort de la chrysalide de sa solitude pour déployer ses ailes de papillon vers un ailleurs qui lui parait possible.
L'ironie est toujours rieuse et précieuse pour faire défiler des scènes cocasses sous nos yeux où Monsieur Faustini est en décalage comme un danseur maladroit qui a raté un mouvement.
Chez les gens ordinaires la vie n'est pas si ordinaire que cela, car des petites choses qui font leur bonheur se dégagent de plus vastes horizons accessibles à ceux qui voient avec le coeur. Monsieur Faustini en est l'allégorie.
Si Wolfgang Hermann manie avec virtuosité la cocasserie des situations, il montre une réelle originalité dans la malice de son personnage et notre sourire du départ se transforme vite en rire avec le personnage.
C'est le lecteur qui tombe le veston du carcan de sa pensée pour avoir des yeux emplis de tendresse, d'attention et de bienveillance.
Un bel exercice de style qui nous mène plus loin, le lecteur lui aussi monte dans un bus qui va lui faire faire un voyage étonnant.
Un court roman avec une fin aussi inattendue qu'onirique qui nous laisse supposer que Monsieur Faustini fera d'autres voyages.
Une délicieuse escapade livresque qui vous chante de vous méfier de l'eau qui dort.
©Chantal Lafon
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Monsieur Faustini a un côté très british du siècle dernier.
Il est déstabilisé par le monde autour de lui et par toutes ses nouveautés.
Ses plus grandes aventures consistent à prendre le bus pour se rendre dans la ville la plus proche, à rentrer dans un institut de beauté pour trouver un cadeau à sa soeur ou à échanger quelques phrases avec des inconnus.
Certes, notre bon Monsieur Faustini n'est pas Mister Bean mais il en a quelques cotés : il vit seul avec son chat sur les hauteurs du lac de Constance.
Il n'est pas gaffeur mais paraît toujours très décalé dans les situations du quotidien.
Avec ce Monsieur Faustini part en voyage» l'illustre auteur autrichien Wolfgang Hermann livre un récit drôle, un roman léger, un portrait simple en apparence d'un antihéros total.
Le ton est parfois ironique, souvent malicieux mais il n'est jamais acerbe ni cynique.
On apprécie notamment beaucoup la manière dont le romancier s'amuse à déstabiliser quelque peu son personnage principal, pour le grand plaisir du lecteur.
Courrez en librairie découvrir cette carte postale autrichienne remplie d'humour et de fantaisie..
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M. Faustini se définit lui-même comme un « voyageur du minuscule ». Afin de contrer le « bloc d'ennui » qui, parfois, s'est déposé au pied de son lit au matin, il s'efforce de sortir de sa maison. Il explore alors les rues de sa petite ville autrichienne, s'efforçant de jeter un regard différent sur toutes choses et gens qu'il croise. À l'invitation pressante de sa soeur qu'il n'a pas vue depuis longtemps, il se résout à quitter son chat pour se rendre en Suisse. Un trajet qu'il fera en train, le seul transport à la mesure d'un temps que M. Faustini ne veut pas voir s'écouler trop vite.
Un éloge à la lenteur, au plaisir de perdre son temps et à l'idée que l'ennui, accueilli pleinement, peut aussi se révéler un moteur de changement. J'ai pris beaucoup de plaisir au récit de cet homme seul face au quotidien et qui choisit de se rééquilibrer pour mieux avancer. Un personnage fort sympathique au demeurant, que je m'imagine aisément retrouver dans un second volet de ses déambulations intérieures et extérieures.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Seuls les espaces intermédiaires avaient une dimension. Ils nous frayaient un chemin vers un temps accompli. Aujourd'hui, tout était sommé de faire sens. Mais dans la marche à pied, dans la lenteur cahotante d'un trajet en autocar, et par-dessus tout dans l'attente, les choses se dépouillaient de leur sens comme les feuilles mortes tombent des arbres. De nos jours, tout était lesté de sens, et il s'agissait de s'affranchir de cette pesanteur. Le sens était produit par la vitesse, qui paraissait être devenue une valeur en soi. Qui disait vitesse, disait avant toute chose turn-over accéléré des marchandises. Et qui disait turn-over accéléré des marchandises, disait avant toute chose réduction drastique de l'air respirable. Dès lors que le moindre souffle d'air nous était compté, nos vies se ratatinaient peu à peu, bientôt comme écrasées sous les roues de nos Audi et de nos BMW flambant neuves. Le Sens, tel était le flux qui pulsait dans la courbe de nos vies, jusqu'à l'instant où chacun d'entre nous finissait par tourner en rond, cavalant à la recherche de lui-même. Cette fuite éperdue survenait quand plus rien ne coulait de source, le moindre temps mort éradiqué, quand toute signification était perdue à elle-même. Plus rien n'allait de soi, chaque lacune devait être à tout prix comblées par des bâtiments, avant d'être intégrées à la circulation générale des marchandises et des fonds, les dernières prairies anciennes de la vallée du Rhin, qu'il venait justement de laisser derrière lui, avec leurs pommiers et leurs cabanes ne planches. M. Faustini se perdait en digressions, c'était incontestable. Mais n'était-ce pas le privilège du voyageur que de vagabonder par la pensée ? Le voyage, n'était-il pas, avec l'attente, l'une des dernières possibilités de laisser son esprit battre la campagne ? L'attente faisait aujourd'hui figure de temps mort, elle n'était qu'un vide à combler. Déjà, d'un trait de crayon rageur, on faisait un sort à ces lacunes de l'espace et du temps. M. Faustini, calé dans son siège, s'abandonnait à l'attente, avec la certitude d'avoir la pleine jouissance d'un bien précieux, d'un temps sans maître, d'un temps vacant, dont nul n'avait l'emploi, sinon lui.
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Au loin le lac était piqueté de voiles blanches. Le souffle qui montait de ses eaux d'un bleu profond lui effleurait le visage avec force qu'il se sentit comme suffoqué de bonheur. M. Faustini pressentait confusément que se cachait derrière le mot voyage, pour anodin qu'il fût, une succession sans fin d'impressions propres à soulever le coeur, et susceptibles de vous procurer des sensations fortes comme vous n'en aviez jamais connu encore.
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Que serait-il allé faire, aussi bien, dans un pays où le seul spectacle qui s'offrait à la vue, ou peu s'en fallait, était celui de grosses cylindrées inoxydables et valant des millions ? Et c'était peu dire que M. Faustini, en sa qualité de l'usager de l'autocar et du train , n'avait aucun faible pour les automobiles.
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Qui sait si ce périple n'allait pas entraîner un bouleversement complet de son existence. Dès lors qu'il quittait le périmètre de son univers, tout était susceptible d'arriver. M. Faustini en avait conscience. Et c'est bien à cette idée que son coeur se serrait d'angoisse : que plus rien, peut-être ne fût comme avant.
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Entreprendre ce voyage lui était à la vérité une épreuve douloureuse. Il s'apprêtait à laisser derrière lui une maison inhabitée, un chat animé d'un grand besoin de tendresse et deux plantes en pot délicates qui, en cela semblables au félidé, n'avaient encore jamais été abandonnées à elles-mêmes. Mais il le fallait bien. Il n'avait qu'une sœur, après tout, et ce n'était pas tous les jours que celle-ci fêtait un anniversaire à chiffre rond. Il se creusa les méninges pour trouver une excuse, crut pouvoir exciper d'empêchements de premier ordre, mais aucun d'eux ne résistait à un examen approfondi. Un coup de froid soudain, peut-être ? Au fond, cela pouvait vous tomber dessus à tout moment. Allons donc, M. Faustini n'était jamais mal portant [...]. Lui faudrait-il invoquer quelque événement imprévisible, un accident, la crue du siècle au lac de Constance, un état d'urgence proclamé à la suite d'on ne savait quelle catastrophe (deux avions n'étaient-ils pas entrés en collision peu de temps auparavant, à l'autre extrémité du lac, leurs carlingues en miettes ne s'étaient-elles pas abattues sur le canton depuis une altitude de dix mille mètres, ce type d'incident n'était-il pas susceptible de frapper à tout moment la maison de M. Faustini, le laissant dans l'impossibilité de se rendre à l'anniversaire de sa sœur ?).
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