Contrairement à un célibat urbain qui peut être choisi, ou, au moins, ne pas aller forcément de pair avec un isolement relationnel ou un sentiment de solitude, le célibat agricole est le plus souvent synonyme d'un grand mal-être.
Cette montée en puissance de la figure de l'agriculteur à l'origine des pollutions des sols, de l'air, de l'eau est au cœur du trouble identitaire qui travaille aujourd'hui le monde agricole, confronté à des contradictions d'autant plus difficiles à assumer qu'il a rempli la feuille de route qui lui avait été assignée au début des années soixante : faire de la France une grande puissance agricole.
Face à des conditions de vie difficiles, le suicide des agriculteurs représente l'acte ultime d'effacement, révélateur des fragilités économiques certes, mais également morales et culturelles qui, affectent les mondes agricoles.
Le "malaise paysan" prospère sur une crise sourde, que dissimule aujourd'hui le terme d'"agribashing". La formule, inventée par des communicants ingénieux, coagule des éléments disparates : des faits de délinquance -vols ou dégradations- qui, pour être nouveaux en milieu rural, ne sont pas réservés aux fermes ; des prises à partie violentes, comme en connaissent également des enseignements, des médecins, des policiers , des pompiers ou des commerçants ; mais aussi les expressions variées de la contestation d'un modèle de production qui relèvent du débat de société.
Penser l’agriculture de demain revient à sortir du schéma classique de l'installation familiale, à réfléchir en termes de création d'activités et d'outils économiques, mais également à anticiper le départ des plus âgés, voire de l'accompagner.