Il avait oublié comme c’était bon d’être le chasseur. Quelle délicieuse sensation de triomphe l’avait parcouru quand elle avait accepté de déjeuner avec lui ! Il rit tout bas : piètre victoire, et pourtant, il se sentait l’âme d’un conquérant. Il saurait redonner le sourire à la veuve éplorée.
Avoir une adresse revenait à offrir à quelqu’un qui le pistait un point de départ. Car le propre d’un chez-soi, c’est de servir d’abri de temps en temps. John avait donc opté pour la diversité : hôtels, motels, appartements ou pavillons en location – ou encore cabanes, tentes, grottes et autres trous dans le sol, bref, ce qu’il trouvait. Il avait une préférence pour les appartements. On s’y sentait plus libre qu’à l’hôtel et, contrairement aux chambres de motel, ils étaient dotés de plus d’une porte de sortie. Il détestait dormir là où il risquait d’être coincé.
Trouver un cœur compatible est du domaine de l’impossible. Elle aurait besoin de celui d’une jeune enfant, à cause de sa taille, et les donateurs sont rarissimes. De surcroît, elle est de type A négatif, ce qui réduit les chances à zéro, ou presque. Quand bien même on en aurait un à disposition, le corps médical estime qu’il serait absurde de gaspiller un cœur sain pour quelqu’un qui… qui accumule autant de problèmes.
Qui qu’il soit et quoi qu’il cache, Niema devait accepter une fois pour toutes qu’il ne serait jamais complètement franc avec elle. Il appartenait probablement à cette race de paranoïaques qui voient des espions et des ennemis partout : il suffit de leur demander s’il va pleuvoir le lendemain pour qu’ils vous soupçonnent d’ourdir un plan requérant du mauvais temps.
La patience était son meilleur atout. Le goût du danger, c’était comme une drogue. Les pompiers, les flics, les membres des forces spéciales, les agents secrets, même les équipes d’urgence dans les hôpitaux –tous connaissaient cet assaut incroyable d’énergie qui vous donnait la chair de poule. Tous étaient des junkies de l’adrénaline.