Citations sur Hernani (169)
HERNANI
Dona Sol, mon amie !
Dites-moi, quand la nuit vous êtes endormie,
Calme, innocente et pure, et qu’un sommeil joyeux
Entrouvre votre bouche et du doigt clôt vos yeux,
Un ange vous dit-il combien vous êtes douce
Au malheureux que tout abandonne et repousse ?
La vengeance est boiteuse, elle vient à pas lents,
Mais elle vient.
C'est vous qui m'avez mis au coeur cette colère.
Un homme devient ange ou monstre en vous touchant.
Ah ! Quand on est haï, que vite on est méchant !
Si vous aviez voulu, peut-être, ô jeune fille,
J'étais grand ! J'eusse été le lion de Castille ;
Vous m'en faites le tigre avec votre courroux.
Le voilà qui rugit, madame ! Taisez-vous !
Ton cœur est faux, duchesse, et tu n'es que dorure !
Oh ! mon coeur et mon âme,
C’est toi ! l’ardent foyer d’où me vient toute flamme,
C’est toi ! Ne m’en veux pas de fuir, être adoré !
Soyons heureux ! buvons, car la coupe est remplie,
Car cette heure est à nous, et le reste est folie.
Parle-moi, ravis-moi ! N’est-ce pas qu’il est doux
D’aimer et de sentir qu’on vous aime à genoux ?
D’être deux ? d’être seuls ? et que c’est douce chose
De se parler d’amour la nuit quand tout repose ?
J’ai besoin de vous voir et de vous voir encore
Et de vous voir toujours. Quand le bruit de vos pas
S’efface, alors je crois que mon coeur ne bat pas,
Vous me manquez, je suis absente de moi-même ;
Mais dès qu’enfin ce pas que j’attends et que j’aime
Vient frapper mon oreille, alors il me souvient
Que je vis, et je sens mon âme qui revient !
Car la musique est douce, fait l'âme harmonieuse, et , comme un divin chœur, éveille mille voix qui chantent dans le cœur!
Vous frissonnez ! Réfléchissez encor.
Me suivre dans les bois, dans les monts, sur les grèves,
Chez des hommes pareils aux démons de vos rêves.
Soupçonner tout, les yeux, les voix, les pas, le bruit.
Dormir sur l'herbe, boire au torrent, et la nuit
Entendre, en allaitant quelque enfant qui s'éveille,
Les balles des mousquets siffler à votre oreille.
Être errante avec moi, proscrite, et s'il le faut
Me suivre où je suivrai mon père, à l'échafaud.
Cette heure ! Et voilà tout. Pour nous, plus rien qu'une heure,
Après, qu'importe ! Il faut qu'on oublie ou qu'on meure.
Ange ! Une heure avec vous ! Une heure, en vérité,
A qui voudrait la vie et puis l'éternité !
Vite, j'entre, et vous vois, et dérobe au vieillard
Une heure de vos chants et de votre regard,
Et je suis bien heureux, et sans doute on m'envie
De lui voler une heure, et lui me prend ma vie !