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Mireille Vignol (Traducteur)
EAN : 9782367344317
164 pages
Au Vent des Iles (03/03/2022)
4.09/5   97 notes
Résumé :
Dans les eaux abyssales de l’océan Pacifique, une baleine tatouée pleure l’homme qui la dompta et la chevaucha jadis, son fidèle compagnon…

Kahu grandit dans une tribu maorie de Nouvelle-Zélande. Enfant prodige, elle se confronte très tôt à l’autorité du chef Koro Apirana, son arrière-grand-père, qui refuse l’idée qu’une femme puisse un jour lui succéder. Mais peut-il rester insensible au chant des baleines et à l’intrépidité de Kahu ? Jusqu’à quel po... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (31) Voir plus Ajouter une critique
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Fascinée depuis toujours par l'océan et ce qui s'y cache, des plus petits êtres aux plus majestueux, je ne pouvais imaginer passer à côté de ce court récit qui met à l'honneur le monde marin et les baleines.

« … avec le vieillissement du monde, au fur et à mesure que l'homme négligeait sa part de divinité, il perdit aussi le pouvoir de parler aux baleines, le pouvoir de fusionner avec elles. C'est ainsi que la connaissance de leur langue fut réservée à une poignée d'individus. L'un d'eux était notre ancêtre Paikea. »

Avec « La baleine tatouée », Witi Ihimaera, auteur néo-zélandais d'origine maorie, fait voyager ses lecteurs à la découverte des mythes fondateurs de son peuple. L'histoire qu'il nous raconte est celle de son ancêtre Paikea, le chevaucheur de baleine, celui qui avait le don de leur parler.

Selon la légende, dans les temps anciens, un homme aurait émergé des flots à cheval sur une baleine géante et aurait projeté des sagaies à l'origine de la création du monde, des oiseaux, des animaux et du peuple maori.

*
Dans les traditions maories, les chefs de village transmettent leur autorité et leur pouvoir à leur fils ainé.
Koro Apirana, le chef de la tribu de Whangara et descendant de Paikea, est très attaché aux coutumes ancestrales. Lorsque son arrière-petite-fille Kahu naît, il refuse l'idée qu'une femme lui succède un jour. La rejetant fermement, méprisant son sexe, il se met en quête d'un héritier mâle.

« … l'amour que Kahu recevait de son arrière-grand-père s'apparentait à des restes tombés de la table, aux miettes après un grand festin. Mais ça n'avait pas l'air de la déranger. Elle se jetait dans ses bras dès qu'il lui accordait un instant et elle prenait tout ce qu'il consentait à lui donner. »

Pourtant, Kahu, nommée en l'honneur de l'ancêtre de sa tribu, est étonnante et charismatique. J'ai aimé cette petite fille singulière qui recherchait l'amour et l'attention de son arrière-grand-père. Koro, borné, aveuglé par un conservatisme rigide, ne se rend pas compte que l'avenir des maoris et l'équilibre de la terre pourraient dépendre de cette fillette sensible et intrépide qui tisse des liens avec les baleines.

*
Si j'ai aimé le mystère que dégageait Kahu, j'ai eu un réel coup de coeur pour Nany Flowers, l'arrière-grand-mère. Généreuse, bienveillante, aimante, explosive, elle crie l'importance mésestimée des femmes et la bêtise affligeante de son mari, Koro Apirana. Elle ne cesse de le rabrouer, le menaçant sans cesse de divorce. Ce couple met une très belle touche d'humour à cette histoire et leurs échanges sont savoureux.

Vous aurez compris, il y a beaucoup d'émotions et d'amour dans ce livre. Les sentiments passent par les regards et les gestes de cette petite fille en quête d'affection, par l'ironie et le sarcasme de Nany Flowers, par l'attitude grincheuse et boudeuse de Koro Apirana, par le chagrin de la baleine géante.

L'écriture douce et apaisante, tragique et profonde de l'auteur m'a emportée. Je suis passée du rire à une très grande tristesse face à la médiocrité et l'insensibilité des hommes.

*
Ce conte contemporain est devenu un classique de la littérature suite à son adaptation cinématographique. Il est le livre néo-zélandais le plus traduit dans le monde. Et je comprends pourquoi.
J'ai adoré ce récit qui alterne la voix des hommes et celle de la baleine géante qui pleure son maître. La nature est omniprésente dans ce récit inextricablement lié à la Terre, à l'océan et ses habitants. Leur vision du monde est harmonieuse et connectée au monde vivant. L'équilibre est fragile.

*
Dans ce conte empli de sagesse, Witi Ihimaera explore avec subtilité et émotions les thèmes liés à l'identité culturelle maorie, le respect des traditions et l'évolution de la société, les conflits générationnels et les idées reçues, le racisme et le sexisme, le pouvoir des femmes et l'acceptation de la valeur de l'autre dans sa différence, la fragilité de l'environnement dont nous dépendons.

*
Pour conclure, j'ai été séduite par ce court roman serti de mots en langue maori.
Un conte contemporain tendre et cruel, touchant et plein de sagesse, dont je suis ressortie à regret, le sourire aux lèvres, les yeux pleins de rêves et émue.
Une vraie surprise et un coup de coeur !
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Witi Ihimaera est un auteur très simple et sympathique, le type même de l ‘auteur océanien qui se promène en tongs et chemise bariolée comme lors d' un salon de livre océanien où j'ai eu l'occasion de le rencontrer
Pour autant, n'oublions pas qu ‘il est l'auteur maori le plus traduit dans le monde et que ses ouvrages ont été plusieurs fois adaptés au cinéma (Paï)
Avec lui, il faut oublier les schémas occidentaux et même asiatiques
Nous rentrons ici en Océanie où la symbolique est totalement différente
Pas seulement dans la culture maorie, en opposition avec la culture anglo-saxonne de la Nouvelle Zélande, mais dans la plupart des cultures océaniennes, mélanésiennes ou polynésiennes par exemple où l'animal ici la baleine a une très haute valeur symbolique.
Chez les kanak aussi , dans le Sud , l'apparition de la première baleine à bosse est un symbole majeur dans le cycle de la vie coutumière, qui est régie par des règles strictes
L ‘autre intérêt de ce livre , qui pourrait paraître simplement exotique pour un occidental, est aussi de critiquer les principes machistes de cette société maorie
L'apparition de la petite fille, très intelligente , Kahu qui remet en cause l'autorité du patriarche, représentant de l'ordre immémorial de la société maorie, bouleverse l'ordre d'une société figée
Ce livre , non dénué d'humour , comme son auteur, reste très rafraîchissant parmi la pléthore de publications actuelles
Un bon moyen de se cultiver ( oui, il existe une culture maorie à la fois patriarcale et poétique) et de s'ouvrir au monde océanien que peu de gens connaissent
Un livre référence
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A l'origine du monde Maori, il y a Tohorā, la baleine gigantesque, arborant un Moko sur la tête, un tatouage traditionnel. C'est elle qui conduit ses soeurs vers la terre sacrée et qui va conduire sur son dos Paikea, l'homme chargé de fonder le peuple Maori. Et dans la tribu Maori, le.patriarche chargé de maintenir les traditions, c'est Koro Apirana. Il espère pouvoir transmettre cette responsabilité à un garçon, mais c'est la petit Kahu qui voit le jour. Une arrière-petite fille vive, intelligente et qui, dès qu'elle peut s'exprimer, voue un amour sans borne envers cet arrière grand-père qui, l'ignore complètement jusqu'à la rabrouer, toujours plongé dans ses réminiscences ...Il faudra l'arrivée d'un banc de baleine menaçant et une mise en danger de la tribu pour infléchir le vieux chef et lui ouvrir les yeux.

Un roman qui alterne mythologie et vie de la tribu, et surtout qui dépeint l'état d'esprit dans cette tribu Maorie, où le chef de famille, toujours dans l'attente d'un garçon pour reprendre le flambeau, s'accroche au patriarcat, n'envisageant jamais de faire la place à une fille, même brillante. Un roman qui évoque également la vie difficile des Maoris dans leur propre pays ou quand ils cherchent du travail notamment en Australie où ils sont méprisés. Mais c'est surtout un récit qui fait la part belle à la poésie, à l'espoir et à la mythologie fondatrice des Maoris, celle de cette baleine mythique et son tatouage, l'être d'exception, protectrice qui permet de surmonter les épreuves. Witi Ihimaera livre un conte moderne, alliant poésie et tradition, avec beaucoup de subtilité.
Je remercie Baelio et les éditions Au vent des îles pour cette très belle découverte.
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Dans la Nouvelle Zélande contemporaine, Kahu est la première des arrières petits enfants du chef maori Koro Apina. Sa tribu descend d'un légendaire cavalier de baleines. Depuis, à chaque génération, un mâle a hérité du titre de chef. Mais aujourd'hui, il n'y a plus d'héritier mâle, il n'y a que Kahu. Elle devrait donc être la prochaine, mais son arrière-grand-père, aveuglé par la tradition et malgré les prodiges de l'enfant, ne veut pas en entendre parler.

L'histoire racontée du point de vue de Rawiri, l'oncle de Kahu, entrelace des personnages modernes avec la mythologie et les légendes.
Terre et mer, passé et présent, modernité et tradition, dans cette collision entre mythe et réalité, Witi Ihimaera nous entraîne à la rencontre de son peuple confronté à un monde changeant.

Un texte court - 156 pages - mais riche, plein d'humour et porteur de thèmes puissants comme le courage, la transmission où la place des femmes.

Traduit par Mireille Vignol
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Ce texte assez court se lit comme une légende contemporaine. On y retrouve effectivement une alternance de chapitres racontés par oncle Rawiri ancrés dans notre monde contemporain et de chapitres écrits du point de vue immémorial d'un groupe de baleines.
Ce point de vue des baleines m'a fait penser à histoire d'une baleine blanche de Luis Sepulveda, que j'ai lu cette année. Dans les deux livres, le point de vue sert à dénoncer le rapport des hommes à la nature qui est devenu mercantile. On regrette dans les deux cas un paradis perdu, une communion originelle entre les hommes et la nature, dont les baleines sont les acteurs privilégiés en tant qu'intermédiaire entre les dieux et les hommes dans cette légende maori ou entre le monde des morts et le monde des vivants dans le texte de Luis Sepulveda.
Le récit est raconté avec beaucoup d'humour, et on sent l'attachement entre les protagonistes aux blagues échangées. J'ai d'ailleurs été touchée par la description des liens familiaux et par le besoin de la présence des différents membres de la tribu / famille, exprimé en particulier par la grand-mère Nani Flowers. le ton est très léger mais les thèmes abordés sont eux sérieux : comment intégrer le monde moderne dans l'organisation traditionnelle de la société maori, en particulier la place de la femme ? ; Comment porter une revendication nationale maori dans une société très européenne, alors que beaucoup de traditions ont été perdues?
J'ai d'ailleurs été surprise de découvrir une société maori très patriarcale dans la gestion du sacré et de l'éducation alors que je n'avais pas ses images en tête. le narrateur fait un passage en Australie et en Papouasie, ce qui étonne sur un texte aussi court mais qui permet de rendre compte du chemin parcouru par le narrateur sur des sujets de racisme et de nationalisme, ainsi que de montrer l'importance de l'attachement au lieu de naissance, au lieu de la tribu.
Par ailleurs, je trouve la couverture très belle et j'aurais aimé que des illustrations émaillent le texte, qui s'y prêterait très bien je trouve, tant certaines scènes sont spectaculaires.
Pour conclure, une belle lecture, facile avec une intégration intéressante de légendes maoris dans la société contemporaine.
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Citations et extraits (84) Voir plus Ajouter une citation
Kahu fixait l’océan, mais semblait perdue dans un passé lointain. Son expression calme, résignée, nous força à nous retourner pour voir ce qu’elle voyait.
La terre basculait vers la mer. L’eau était d’un vert brillant qui se mêlait à un bleu foncé, puis à un violet vif. Le nuage illuminé bouillonnait au-dessus d’un emplacement précis à l’horizon.
Soudain, un claquement étouffé retentit dans les profondeurs, comme un portail géant s’ouvrant un millier d’années auparavant. Sous les nuages, la surface de l’eau poudroyait comme de l’or. Puis des éclairs bleus, de véritables missiles, jaillirent de la mer. Je crus apercevoir quelque chose voler dans les airs, traverser l’éternité et plonger au cœur de notre village.
Une ombre ténébreuse, suivie d’autres, montait des profondeurs en un essor continu. Soudain, la première ombre surgit et je distinguai le tohorā . Un colosse. Issu des abîmes et crevant la peau de l’océan. Son bond fut accompagné de marbrures d’éclairs et de chants effarants.
Koro Apirana poussa un cri tragique, car ce n’était pas une bête ordinaire, pas une baleine ordinaire. Elle venait du passé et son chant satura l’atmosphère.

Karanga mai, karanga mai,
karanga mai. Appelez-moi.
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Dans les temps anciens, dans les années qui nous ont précédés, la terre et la mer éprouvèrent un sentiment de grand vide et d’ardent désir. Les montagnes semblaient mener droit au paradis, et la forêt humide, verte et luxuriante ondoyait comme une cape multicolore. Les remous du vent et des nuages animaient les cieux iridescents, où se reflétait parfois le prisme d’un arc-en-ciel ou d’une aurore australe. La mer chatoyante et moirée se fondait dans la voûte céleste. C’était le puits du bout du monde ; quand vous le regardiez, vous aviez l’impression de voir les limites de l’infini.

(Incipit)
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L’Antarctique. Le puits du monde. Te Wai Ora o te Ao. À la surface, le continent blanc essuyait une tempête déchaînée, inhumaine. Dans les profondeurs hors d’atteinte des Furies, la mer était calme, comme détachée du monde. En jouant en douceur sur la couche glaciaire, la lumière irradiait le royaume sous-marin d’une lueur fantasmagorique. Les racines de glace géantes qui plongeaient de la surface vers le fond étincelaient, rutilaient, scintillaient et dardaient des prismes stroboscopiques dans la gigantesque cathédrale souterraine. La glace craquait, gémissait, frissonnait et susurrait en glissando, comme une symphonie titanesque jouée sur un orgue géant.
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En jouant en douceur sur la couche glaciaire, la lumière irradiait le royaume sous-marin d’une lueur fantasmagorique. Les racines de glace géantes qui plongeaient de la surface vers le fond étincelaient, rutilaient, scintillaient et dardaient des prismes stroboscopiques dans la gigantesque cathédrale souterraine. La glace craquait, gémissait, frissonnait et sussurait, en glissando, comme une symphonie titanesque jouée sur un orgue géant.
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Kahutia Te Rangi était au nombre de ceux qui amenèrent la bénédiction chez nous. Il traversa l’océan à califourchon sur sa baleine, apportant les forces vitales qui nous permirent de vivre en intime communion avec le monde. Ces forces vitales, sous forme de sagaies, provenaient des maisons de la Connaissance situées à Hawaiki. (...). Les lances étaient les offrandes de ces maisons pour le pays nouveau. Elles étaient très importantes car, entre autres choses, elles instruisaient l’homme sur les moyens de communiquer avec toutes les créatures de l’océan afin que les uns et les autres puissent établir une alliance mutuellement bénéfique. Elles enseignaient ”l’harmonie universelle”.
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Video de Witi Ihimaera (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Witi Ihimaera
À l'occasion de leur venue à la librairie Dialogues pour une rencontre autour de leur livre, "Escale en Polynésie" publié aux éditions Au vent des îles, Titouan et Zoé Lamazou nous ont confié plusieurs conseils de lecture !
La femme de Parihaka de Witi Ihimaera : hhttps://www.librairiedialogues.fr/livre/6737338-la-femme-de-parihaka-witi-ihimaera-au-vent-des-iles le baiser de la mangue d'Albert Wendt : https://www.librairiedialogues.fr/livre/702160-le-baiser-de-la-mangue-albert-wendt-au-vent-des-iles Diadorim de Doão Guimarães Rosa : https://www.librairiedialogues.fr/livre/999016-diadorim-joao-guimaraes-rosa-editions-10-18 Pina de Titaua Peu : https://www.librairiedialogues.fr/livre/20130193-pina-titaua-peu-au-vent-des-iles Au temps des requins et des sauveurs de Kawai Strong Washburn : https://www.librairiedialogues.fr/livre/18956184-au-temps-des-requins-et-des-sauveurs-roman-kawai-strong-washburn-gallimard Manières d'être vivant de Baptiste Morizot : https://www.librairiedialogues.fr/livre/16090590-mondes-sauvages-actes-sud-manieres-d-etre-vi--baptiste-morizot-actes-sud Calanques, Les entrevues de l'Aiglet de Karin Huet : https://www.librairiedialogues.fr/livre/16651719-calanques-les-entrevues-de-l-aigle-karin-huet-parc-national-des-calanques-glenat-livres
Belles découvertes !
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