Gounod mérite plus que personne le nom de charmeur. Il séduit, il conquiert. Il a en lui cette puissance magnétique de cette musique caressante qui est la sienne. Grand, le corps d'apparence solide, mais le front ravagé, chauve, la bouche légèrement tordue, sous sa longue barbe blanche, — tel que l'a sculpté Carpeaux, — l'oeil bleu, profond, fixe, l'oeil visionnaire, ou plutôt du voyant, dès que cette physionomie supérieure se montre, on reconnaît un homme. Puis, si la main de cet homme se tend vers vous avec une pression cordiale, si l'on pénètre, fut-ce pour un moment, dans l'intimité de cette nature d'élite, on est en quelque sorte pénétré par le charme d'une voix douce, insinuante, enveloppante, mise au service d'une causerie qui étincelle.
Lorsque Gounod écrivait les lignes suivantes : « Autant vaudrait dire que pour parler chimie, physique, astronomie ou médecine, le mieux est de ne les avoir pas étudiées », — il voulait sans nul doute insinuer que le critique de profession connaît peu ou point l'art musical et qu'il en parle comme un aveugle des couleurs.