L'Attaque des Titans, tome 15

Avec des couvertures souvent dans la lignée des manhwa 1ère génération, et des graphismes pas spécialement engageants, c'est à reculons que j'ai débuté cette série sans doute en passe de devenir culte. Au final j'aime beaucoup, même si…
Nous sommes dans un univers à la fois post-apocalyptique et dystopique où les titans ont pris le pouvoir sur terre, et où l'humanité survie en se réfugiant derrière les nouvelles murailles de Chine que sont les Murs Maria, Rose et Sina… Enfin, ça c'est que nous disent les personnages qui croient sur parole la propagande gouvernementale ! Je gage que la réalité doit être tout autre… ^^
Au fil des pages on comprend très vite qu'ont puise joliment dans les belles traditions du récit catastrophe à la sauce Kaiju Ega et des récits survivalistes à la sauce George Romero. Car après tout, ces titans anthropophages insensibles à la douleur et avec lesquels on ne peut communiquer ressemblent fortement à des zombis géants… ^^
Au final, on se retrouve avec une espèce d'"Evangelion" steampunk mâtiné d'une bonne dose de "Claymore" car on retrouve des éléments clés des oeuvres Hideaki Anno et de Norihiro Yagi (le détournement des codes du film de guerre par exemple).

A un moment j'ai aussi pensé à l'anime "Big-O", où toute une civilisation se réveillait amnésique. le spectateur ne pouvait que se demander comment une population qui a fait table rase du passé pouvait aussi rapidement rétablir des inégalités sociales aussi fortes… Et bien, avec des masses ignorantes desdits inégalités et une élite manipulatrice bien au courant desdites inégalités et de leur monde de fonctionnement : c'est la sempiternelle lutte des classes…
De la même manière je me suis demandé comment les personnages de ce manga pouvaient être aussi passifs :
- dans le cadre d'une guerre totale, 1/3 des effectifs sont cantonnés au flicage de la population intra-muros
- les contestataires sont systématiquement envoyés dans le bataillon d'exploration, dont les membres sont systématiquement envoyés en mission suicide (l'auteur joue même sur les répétitions, le même schéma revenant plusieurs fois : espoir de la population devant une nouvelle expédition du bataillon d'exploration, le bataillon d'exploration se fait décimer et la majorité de ses membres meurent dans le ventre des titans, désespoir de la population qui ne sait plus à quels saints de se vouer…)
- la recherche scientifique est sciemment sabotée quand elle n'est pas interdite
- personne ne sait quand et comment les murs ont été construits (c'est l'oeuvre de Dieu disent les dévots…)
- personne ne sait ce qu'il y a au-delà des murs… pire, personne ne sait ce qu'il y avait avant les murs…
Ça fait déjà beaucoup : je parie sur un lavage de cerveau collectif de la population, maintenu sous tutelle la peur permanent des titans croquemitaine que personne n'avait jamais vu avant l'attaque du Mur Maria par le titan colossal…
L'auteur joue donc avec les théories à la con des néo-cons (théorie du choc, et plus particulièrement cette vaste fumisterie du choc des civilisations), utilisées pour faire faire peur aux peuples du monde entier et les obliger à trimer pour une élite qui possédera bientôt 80% des richesses mondiales alors que cela fait déjà longtemps qu'elle ne sait plus quoi faire de son pognon…
On sent bien également dans plusieurs passages que les titans ne sont qu'une variable d'ajustement de la population et de son contrôle, un peu à la manière des révolutions dans l'arrière du train du "Snowpiercer".
Le naming presque intégralement germanique ne doit pas nous faire oublier une famille royale complètement coupée du reste de la société, des conflits entre juntes militaires qui oscillent entre pacifisme et extrémisme, entre conservatisme et réformisme sur fond de population complètement embrigadée… Toute coïncidence avec l'Empire japonais de l'entre-deux-guerres n'est absolument pas fortuite. le manga a sans doute voulu brouiller les pistes pour ne pas subir le même sort que son confrère "Zipang" qualifié de révisionniste par certains, et d'antipatriotique par d'autres…

Les titans se régénèrent à l'infini sans avoir besoin de manger, de boire ou de respirer, c'est-à-dire au défi des lois de la conservation de la matière… Est-ce qu'on pioche dans le folklore horrifique asiatique ou est-ce le résultat d'une surenchère horrifique accélérée par la saga "Resident Evil" et ses émules ? Dans les deux cas les titans en tant que concept son abusés : ils ne sont là que pour s'empiffrer d'humains alors qu'il nul besoin de nourriture, se contentant de régurgiter les restes de leurs victimes une fois atteint le clapet anti-retour.
Sont-ils une allégorie de la revanche des forces de la nature, des goules néo-libérales qui broyent les populations pour satisfaire leurs egos insatiables, des immigrés tiers-mondistes venus dévorer la prospérité occidentale, d'une arme biologique ratée (ou réussie ^^), d'une expérience sur l'immortalité ratée (ou réussie ^^) ?
Si j'en crois les déclarations de l'auteur, j'ai dépassé la moitié de la saga et je suis encore bien dans le schwartz...


Dans ce tome 15, la team Livaï est toujours en cavale alors que ce prépare le procès d'Edwin Smith mais l'auteur prépare son gros twist en nous montrant les humiliores soumis aux honestiores, ces 90% de gens qui ne sont ni collabos ni résistants mais qui se contentent de survivre parce qu'ils ont trop peur de l'avenir : un jeune chef d'entreprise trouillard, un vieux patron de presse pantouflard, un rookie idéaliste écoeuré par la chienlit de sa hiérarchie qui se croit au-dessus du commun des mortels et qui se lole des malheurs de la plèbe… (je hais d'autant plus ces homines crevarices que j'ai des noms IRL)

Et puis retournement de situation : c'est la Révolution ! le régime s'effondre comme un château de cartes, car faute de soutien autre que la peur et la résignation tout s'effondre à la première bourrasque…
Mais encore faut-il récupérer Historia et Eren avant que les crevards ne les utilisent pour lancer la contre-révolution, et là le mangaka se souvient des mystères qu'il avait mis en place dans le tome 3 et qu'on avait perdu de vue pendant 10 tomes… to be continued comme on dit ! ^^

On pourrait penser qu'un peuple qui vit en huis clos avec pour ennemis des titans dévoreurs d'hommes devrait être uni, et bien une fois de plus, nous allons nous apercevoir que cela n'est pas possible, c'est décidemment le lot de toutes les histoires post apocalyptique, et plus je côtoie les êtres humains, plus je me dis que tous ces auteurs ont raison, l'homme est vraiment trop con.
Dans ce tome, le bataillon d'exploration, convaincu que le roi actuel est un usurpateur et un manipulateur, va tout mettre en place pour le renverser et redonner sa légitimité à la famille Reiss, nous allons une fois de plus, assister à des affrontements, mais de nouveau ce ne sera pas contre des titans, puisque ceux-ci ne sont toujours pas présents dans ce tome, mais entre humains.
Cette fois ci encore, je me suis un peu perdue entre tous les personnages (ils sont nombreux), mais au fil des pages, mes souvenirs des précédents tomes me sont revenus et m'ont permis d'avancer dans ma compréhension de l'histoire, l'auteur ayant arrêté de mettre des mystères à tout va, et sans en avoir résolu vraiment il a donné un peu plus de consistance à ce tome.

On avance progressivement dans l'histoire. Il nous manque toujours beaucoup de réponses, bien sur, et c'est normal puisqu'il y a encore environ 10 tomes à paraître. En revanche on sent que l'auteur sait où il va nous enmener et cette histoire de titans me paraît beaucoup plus complexe au niveau du scénario que je ne l'aurai imaginé au début! C'est incroyable cet capacité qu'à l'auteur à nous faire des révélations qui alimentent le mystère. Au plus on avance, au plus on en apprend, au plus on se pose des questions et le mystère devient encore plus grand! J'espère une fin à couper le souffle comme le font chaque révélation que l'on apprend au fur et à mesure de l'histoire. Pour l'instant, j'adore toujours!

C'est un véritable bras de fer que mène le bataillon d'exploration dans ce quinzième tome : recherché par les brigades spéciales, il doit cependant agir pour mener à bien le renversement du roi, et surtout inverser l'opinion publique, largement contre lui. Il est pour cela aider d'éléments surprenants, mais efficaces...
On suit avec plaisir les agissements de nos héros, avec cette fois-ci un objectif plus politique. Les dernières pages sont riches en révélations, notamment sur le pouvoir d'Eren et ce qui le rend si précieux. Vite, la suite !

Rebondissements, retournements de situation et quelques situations pour stimuler nos cellules grises quand même. La liberté est un combat philosophique et physique. Faut-il mieux vivre dans une démocratie ou dans une dictature ? Certains répondront que cela dépend la forme de liberté laissée. Eren et ses compagnons de lutte eux ont choisi. La vérité doit être libératrice même si elle peut engendrer de la peur et chaos. Peut-être qu'elle permettra de répondre à toutes ces questions autour des titans. On ne sait d'où ils viennent et pourquoi ils agissent mais il y a sûrement une raison. Nous la connaîtrons surement dans une vingtaine de tome. Hajime Isayama cultive l'art du mystère et des histoires dans des histoires dans des histoires… Quand les lecteurs ne seront plus au rendez-vous, on pourra tout savoir. Pour l'instant on va se contenter de très belles scènes de combat où Livaï est mis en avant avec le mystérieux Kenny Ackerman. Deux terribles adversaires qui maîtrisent aussi bien la stratégie que les coups. Rien ne se perd, rien ne se crée tout se transforme. Lavoisier avait bien raison même si ce n'est pas à des techniques d'affrontement qu'il faisait référence. Mais changer demande une volonté forte qui fera quand même des victimes. Que vont-il arriver à mettre en place ? Et est-ce que cet équilibre dépend uniquement d'Eren et Historia ?
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