Cette intégrale regroupe les quatre premiers albums de la série Jerry Spring, publiée à l'origine dans le journal de Spirou, après la seconde guerre mondiale. Respectant la demande de l'auteur, cette intégrale est en noir et blanc car
Jijé travaillait ainsi. Influence de la presse, apprend-t-on dans le travail éditorial proposé au début de cette intégrale. Je n'avais jamais lu de
Jijé. Tout ce que je connaissais de Jerry Spring, c'était une référence dans un Boule et Bill lu dans mon enfance. Je savais que
Jean Giraud en était la continuité, mais guère plus. J'ai donc découvert une série relativement moderne et bien écrites, pour des histoires publiées à l'origine hors album, et en plus publiées dans les années 50. Il y a des classiques qui sentent le daté, qu'on perçoit de manière évidente comme des vieilleries, mais ce n'est pas le cas du travail de
Jijé. Jerry Spring est une série assez éloignée des clichés du western, même si les codes classiques sont tous présents. Pour preuve, le meilleur ami de Jerry, un gras mexicain, qui ne sert jamais de faire-valoir, mais bien de partenaire. Jerry est le héros, mais Pancho n'est en rien dévalorisé. Rien que cela, m'impressionne déjà beaucoup.
Dans les quatre histoires proposées, les thèmes sont variés, et traitent de politique mexicaine, d'immigration, de guerres indiennes et de malversations économiques. Il y a une belle variété dans les intrigues. J'ai appris dans le rédactionnel que
Jijé avait su mettre des scénaristes à contribution, il les a en tous cas bien choisis, et a su mettre en valeur leur travail. Mais on ne sent pas du tout la prépublication journal. Etonnamment, le rythme est tel qu'on ne perçoit pas les coupures, et que le format album convient parfaitement.
La modernité, est aussi graphique. Quand je repense au premier Blueberry, je ne peux que comprendre pourquoi
Jijé a été le maître. Il a une telle maîtrise, sur Jerry Spring, de son dessin. Il progresse en deux années, et je préfère nettement les dessins du tome 4, mais il reste excellent dès le début. Et puis il y a ce soucis du détail, les planches sont extrêmement riches, et les décors toujours poussés au maximum. Même s'il cherchait à travailler rapidement pour alimenter les colonnes du Journal de Spirou, jamais il ne bâcle son travail.
Je suis totalement conquis par cette découverte. Je comprends mieux pourquoi
Jijé a été le maître de
Franquin,
Hergé, Giraud, bref, des plus grands de la bd francophone. C'est un auteur accomplit, intelligent et talentueux. N'hésitez pas à découvrir vous aussi Jerry Spring. Je le redis c'est une série qui à 60 ans, a le dynamisme d'une série moderne. J'imagine qu'aujourd'hui encore, il y a, chez
Jijé, des leçons à tirer pour les jeunes auteurs de bande dessinée.
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