Nice, le 9 mars 1881, la famille du grand-duc Alexandre Feodorovitch Oulianov quitte sa villégiature d'hiver sur la Riviera pour rejoindre en train Saint-Pétersbourg. La voix d'Anna, seize ans, conte sa détestation du milieu dans lequel elle vit, la froideur de sa mère, l'indifférence de son père, l'éloignement de son frère. Elle a hâte de rejoindre la Russie, de retrouver ses chevaux, de conquérir le coeur de Dimitri, le seul à lui avoir adressé un compliment, à elle que la disgrâce physique frappe.
Moscou, le 8 mars 2012, le Riviera Express quitte la capitale russe, avec à son bord Irina qui part rejoindre à Nice un homme dont elle a fait connaissance sur internet, Enzo. Elle est animée du fol espoir de reconstruire sa vie, loin de la solitude et de la tristesse qui pèsent sur sa vie quotidienne.
Gaëlle Josse alterne les chapitres où se fait entendre la voix monocorde d'Anna et où se libère l'anxiété qui étreint Irina au moment où elle joue son avenir. Chacune d'elles connaît l'impasse des vies brisées par trop de solitude, d'impuissance à maîtriser sa propre destinée. Chacune voit aussi miroiter un bonheur qui est peut-être possible en se donnant le courage de sauter le pas. Pour Anna, la cavalière audacieuse, il faudra surmonter ses peurs, la hantise d'être rejetée encore une fois, elle le fruit d'amours adultères, pour épouser l'homme qu'elle s'est choisi pour une seule phrase prononcée : « Comme vous êtes radieuse, Anna Alexandrova, tellement radieuse ! ». Quant à Irina qui fuit la violence de son ex-compagnon, elle aspire au confort et à une vie paisible que lui promet Enzo, son amoureux virtuel.
Gaëlle Josse lie le destin des deux jeunes femmes au travers de Mathilde, la gouvernante d'Anna, dont le lointain descendant, le faux Enzo, attend la venue d'Irina à la gare de Nice.
Jolie histoire que ces destins croisés et inversés. Cependant, le personnage d'Anna est peu attachant tant l'écriture sèche de l'auteur la prive d'humanité. Irina nous touche davantage mais, là encore, le personnage est privé de profondeur par le choix d'un portrait à petites touches rapides. Son désarroi, si palpable dans les premiers moments, se dilue dans l'aventure amoureuse presque convenue. Si bien que le roman finit par prendre l'allure d'une nouvelle.