Mathurin Méheut (1882-1958) est un peintre, illustrateur, céramiste breton. Né à Lamballe dans les Côtes d'Armor, il travaille tout d'abord chez un peintre en bâtiment à Lamballe, avant d'entrer à l'École régionale des Beaux-Arts de Rennes en 1898 avant de s'installer à Paris en 1902. Mais il retourne tous les étés en Bretagne pour développer sa documentation. Sur ses dessins ornant ses
lettres on voit une population avec ses rites et ses costumes, ses activités et ses outils.
A Paris, il rencontre avec
Eugène Grasset qui l'introduit dans le milieu artistique de la revue « Art et décoration ». Cela l'éveille aux préoccupations de l'art nouveau et au japonisme. En effet, de nombreux artistes, tels Claude Monet (1840-1926),
Edgar Degas (1834-1917),
Van Gogh (1853-1890) ou encore Gauguin (1848-1903), s'intéressent au Japon et à son art. ils se retrouvent dans ce qui sera l'École de Pont-Aven autour des aubergistes locaux, telle Julia Guillou surnommée « Mademoiselle Julia », propriétaire de l'hôtel des Voyageurs ou l'aubergiste bretonne, Angélique Marie Satre surnommée « la belle Angèle » ou encore la pension Gloanec tenue par Marie Jeanne Gloanec. Cette dernière existe encore, jouxtant le Musée des Beaux-Arts à Pont Aven. Cette façon d'accueillir les peintres et, souvent, se faire payer en toiles, rendra l'Ecole de Pont Aven célèbre. Ces peintres, impressionnistes, voulaient créer une scène qui donnait l'impression de regarder un seul instant ou un bref aperçu du passé. Ils utilisent pour celà des coups de pinceau rapides et une introduction intense de la couleur. Beaucoup se sont mis à peindre en plein air. D'où des de paysages et des scènes de la vie quotidienne.
C'est également le cas de Mathurin Méheut, alors rédacteur pour la revue « Art déco » et baignant dans l'atmosphère de l'Art nouveau et de ses inspirations asiatiques. Il s'essaye alors aux gravures avec un « Charbonnier en forêt » (1913), ou au travail sur soie.
Le 10 janvier 1914 Mathurin Méheut et sa femme Marguerite, embarquent au Havre sur le paquebot « Liberté » pour un tour du monde financé par le banquier
Albert Kahn. C'est au Japon qu'ils séjourneront le plus longtemps, d'avril à août 1914. le tour du monde qui devait durer 18 mois et les conduire aux Etats-Unis, à Hawaï, au Japon avec retour par Ceylan et l'Inde est interrompu par le début de la Première Guerre mondiale en septembre 1914.
Malgré la brièveté du séjour, écourté par la déclaration de guerre, le Japon aura été pour Méheut une expérience très enrichissante. À Kyoto, il visite deux grandes écoles d'art, les fabriques de porcelaine, les émailleurs, les laqueurs, les graveurs sur bois. Il y trouve la confirmation que l'« art et artisanat sont liés et se confortent l'un l'autre, que le savoir-faire est aussi important que l'acte créateur ». Il entre en contact avec les calligraphes japonais et cela n'a pu que conforter et enrichir son mode opératoire du dessin dont la vitesse et la justesse caractérisent son graphisme. Sa signature, un double « M » s'inspire de cette calligraphie.
A peine débarqué en avril 1914, il dessine et peint sans relâche. Il est aidé par le grand industriel Katsutarô Inabata et par le peintre Takeshirô Kanokogui. le premier l'introduit dans des maisons traditionnellement fermées aux Européens. Il représente « Mademoiselle Inabata faisant la cérémonie du thé ». C'est l'occasion pour lui de s'intéresser à l'art de vivre raffiné japonais. Il peint aussi de nombreux tableaux représentant les animaux et biches sacrées du parc de Nara.
On est en plein japonisme. « le paradis des artistes, décidément, ce Japon. Nara !.../ Les dernières fleurs de cerisiers tombent. Tout dans cette cité a été réuni, concentré pour la joie du peintre de l'architecte ou du littérateur ». Un ouvrage réalisé par ses arrières-petits-enfants
Patrick Jude, Elizabeth Jude et
Hélène Jude « Mathurin Méheut - voyage d'un peintre breton au japon- avril-août 1914 » (2012,
Editions Ouest France, 128 p.) raconte ce périple. Mais c'est aussi le carnet de voyage de ses arrières-petites-filles, parties sur les traces de leur aïeul. Elles ont mené une enquête pour retrouver les lieux, les familles côtoyées par le couple Méheut. Comme lui, elles ont été fascinées et conquises par ce pays.
Au niveau graphique, on retrouve les effets de grilles des estampes. Il travaille avec des tissus, reprend les formats allongés des peintures japonaises. Sur le plan thématique, on retrouve les scènes pittoresques de la vie quotidienne comme « La cérémonie du Thé », les temples, les tortues sacrées, les biches japonaises qu'il représente plusieurs fois, et les arbres.