Citations sur Les revenants (71)
Directement sous le balcon, un figuier de Barbarie déployait sa florissante menace entre le panorama et l’aire de stationnement.
Un jour, des années plus tôt, un membre de l’équipe de gardiennage avait voulu le couper, se répandant en imprécations lorsque les épines avaient déchiré son coupe-vent. Shelly s’était hâtée de téléphoner au propriétaire, qui avait consenti à donner un contre-ordre à l’employé. Depuis, plus personne n’avait touché à ce figuier.
Chaque printemps, il fleurissait comme l’offrande naïve d’un fleuriste à Dieu. Le reste de l’année, il ne cherchait à abuser personne. On savait qu’en l’approchant on se serait fait cruellement lacérer.
(page 571)
La bâtisse était tout enténébrée et, ne projetant aucune ombre, semblait engloutir la luminosité de la neige et de la lune. Elle semblait, tout au contraire, l’ombre d’elle-même. Découpée dans l’air à l’aide d’une paire de ciseaux. Une silhouette du passé qui se détachait dans l’espace.
(page 555)
Vous allez devoir être très silencieux quoique, bien sûr, les morts n’entendent pas. (De nouveau, des rires nerveux et contraints.) Silencieux parce que, vous savez, morgue vient d’un mot français qui signifie à la fois « regarder solennellement » et « braver ». Voyez-vous la similitude ? Et l’étrangeté ?
(pages 411-412)
Cette partie de la morgue a été conçue pour la phase qui consiste à confirmer qu’un corps inanimé est bien mort. Jusqu’à récemment, comme nous l’avons vu en cours, il n’existait pas de méthode sûre pour vérifier la mort, et les gens nourrissaient des craintes sincères d’être enterrés vivants.
(page 410)
À cause de ses boucles brunes, à cause de la façon dont sa taille s’évasait sur ses hanches, à cause de son postérieur pareil à deux pleines poignées de chair mûre empaquetées dans une mini-jupe ? Il avait remarqué dès les premières heures de cours que ses sourcils très arqués lui donnaient un air perpétuellement étonné – ou bien l’air de chercher à séduire ou bien encore celui d’éprouver il ne savait quel plaisir physique.
Un plaisir sexuel.
(page 347)
Or ces petites humiliations vous remettaient tout en mémoire :
La crasse d’être humain, d’être une femme, d’être vivant, de vivre dans un corps, la honte de voir tout cela déballé devant des filles plus jolies, plus soignées, meilleures.
(page 277)
Allaient-ils, Clark et elle, et ce merveilleux miracle des jumeaux, se muer, comme cela semblait désormais l’usage, en un de ces systèmes de garde alternée ? En un dispositif défini et paraphé par un juge ? Du jeudi au lundi avec Mira. Du lundi au jeudi avec Clark. Ou bien une semaine chacun ? Ou de quinze jours en quinze jours ? Jours de vacances pris en compte et partagés en deux parties absolument égales ?
(page 249)
Le Net était devenu, pour celles et ceux qui n’avaient plus leur mère, le principal filon des remèdes de bonne femme et autres conseils féminins.
(page 184)
Septembre tirait à sa faim et le temps faisait un effort concerté pour changer. Le ciel était désormais plus lavande que bleu, et il flottait dans l’air de feuilles affadies, amollies, lâchant prise, en perte de vitesse.
(page 151)
Son frère aîné avait été tué au Viêt-nam. Ses parents, qui ne s’en étaient jamais remis, avaient succombé au genre de maladie dont meurent les gens recrues de chagrin : crise cardiaque pour son père, cancer de l’estomac pour sa mère.
(page 93)