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EAN : 9791095895039
272 pages
ITIL éditions (23/11/2017)
4.11/5   9 notes
Résumé :
Laura, jeune romancière au caractère bien trempé, rencontre Duncan, auteur célèbre et vieillissant, atteint d'une maladie rare. Il lui demande de l'aider à se documenter pour un projet de livre. Cela tombe bien, elle est en panne dans son nouveau roman. Un lien ambigu se tisse entre les deux écrivains, entre le désir et son empêchement, entre la création et ses entraves. Alors qu'ils séjournent ensemble à l'étranger, par la grâce d'une rencontre amoureuse, Laura s'a... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Pris d'un remarquable parangonnage* commentatoire au sortir de la lecture, j'ai dû patienter quelques instants (grosso modo multipliés par soixante-mille, puis par quelque autre chiffre encore plus effarant) avant de parvenir à extirper un avis de la substance mollassonne et amorphe qui me tient lieu de cerveau. Il est dans mes habitudes de me cantonner à la [littérature de]** science-fiction au sein de laquelle je me sens nettement plus à l'aise, mais certains écarts de conduite me précipitent dans de perverses lectures dont je ne parviens hélas même pas à rougir ensuite.
C'est ainsi que de Nila Kazar j'aurai lu un recueil de nouvelles (Le Manuscrit et la Mort)*** pas commenté (en raison d'une fâcheuse tendance à apprécier sans m'exprimer, alors que je peux grogner ou glapir avec désespoir quand un bouquin pue), et sautant enfin sur l'occasion de tâter de la Nila romanesque, ce Platonik à la couverture sobrement évocatrice qui me fit aussi songer à la pochette de certain disque consacré à certain compositeur finlandais (les oeuvres y étant gravées se mariant d'ailleurs fort bien avec le roman dont il devrait être enfin question ici si je cessais de m'égarer quelques instants).
Afin de livrer tout de suite une de ces platitudes qui font le bonheur de la plupart des auteurs, je vais le clamer en trois mots : j'ai adoré ; et même en quatre : j'ai pris mon pied.
Mais écrit comme ça, c'est un peu court, et même si la taille importe peu, un minimum de turgescence dans le commentaire doit être recommandé, à condition qu'on sache exactement par quel bout le prendre, ce qui peut rester hors de ma portée, mon sens de la synthèse étant aussi limité que mes capacités à traiter les équations relatives à l'oscillateur harmonique quantique à une dimension (oui, ça existe, mais surtout ne me demandez aucune précision sur le sujet).
Il me reste la possibilité de sérier les problèmes (sic) et d'aborder méthodiquement le roman sous ses divers aspects tant formels que sémantiques, psychotextuels et esthétiques. Pardon, je me laisse aller, reprenons sérieusement (c'est vite dit).
Le roman, songé-je, est en partie centré sur cette portion de l'anatomie masculine située exactement ici afin qu'on puisse la protéger des deux mains lors d'une attaque de yorkshire, et sur le rôle qu'elle joue dans la création (littéraire) masculine, le fonctionnement de celle-ci dépendant des humeurs de la cédille, ou les défections de la cédille poussant soit à trouver un substitut (pro)créatif dans l'écriture, soit à trancher la plume du mâle écriveron (plus ou moins lentement, avec plus ou moins de souffrance).
Platonik est tout aussi centré sur les relations qu'entretient pour sa part une sémillante narratrice avec le champ d'expérimentation sexuel, lequel est parcouru (mais est-ce si surprenant ?) d'une manière similaire au champ d'expérimentation textuel (et, sans doute pour de mêmes raisons).
Le roman se fonde donc sur un contrepoint narratif qui organise les lignes mélodiques des protagonistes et l'entrecroisement de la thématique sexualité/textualité. Écrire et bai… faire l'amour imposent de se mettre un minimum à poil devant l'autre et devant soi-même, le lien s'impose. Mais quid de l'écriture lorsqu'on ne coïte point ou plus, quelle que soit la raison ? Je ne vais pas vous bassiner avec un examen attentif de cette question, quoique fort peu périphérique, d'abord pour ceux qui ne l'ont pas déjà fait vous avez un roman à lire (donc pas de temps à consacrer à mes élucubrations).
Tout à ma joie exégétique (sic) j'ai omis jusqu'ici d'aborder les questions qui fâcheraient. le style pour commencer. Il est inconvenant de manier la plume avec autant d'élégance, de finesse, de justesse, d'émotion et d'humour. Voilà, c'est reproché, je suis navré de le dire, mais Nila Kazar écrit trop bien, zut. Mais qu'importe, il y a plus grave : la malheureuse Melinda, personnage secondaire mais crucial, qui se désagrège sous nos yeux tandis que les autres tentent de se saisir ou ressaisir. Créer va de pair avec survivre, or Melinda qui n'a pas cette perspective ne parvient qu'à se raccrocher aux branches, et à ralentir un peu sa chute. Melinda, qui entre dans le contrepoint avec dissonance, est une figure entropique frappée, en quelque sorte, d'un parangonnage de l'âme. Sans Melinda, le roman perdrait du sens. Car au fond est-il bien question de sexe et de texte et n'est-il pas plutôt abordé la question du désir, de son absence ou de sa privation, dont les effets se manifestent selon le cas en écriture ou en cours de mandarin ? N'est-on pas leurré en posant la problématique dans les termes que j'ai moi-même employé jusqu'ici ? Duncan, Laura, Ion, ne s'éclaireraient au fond tout à fait que par la présence de Melinda, que j'avais dit cruciale, mais que je devrais peut-être qualifier d'essentielle.
Je ne sais pas. Je m'interroge. Et, malgré les apparences, plutôt sérieusement.

__________________
* Lire le livre pour comprendre le terme et ses implications. Je déplore d'ailleurs que d'autres aient trouvé judicieux de déflorer le sujet, même si c'était mission impossible de contourner l'impuissance des uns et des autres. Ah, zut, j'ai trahi… Tant pis, faut lire quand même, vu ?
** Par égard pour les abrutis qui considèrent que les genres de l'imaginaire ne sauraient être de la littérature, je mets la mention entre crochets pour qu'ils restent libres de penser que Musso est supérieur à Bradbury.
*** Pas encore Les rivières fantômes ? Non, j'attendrai un jour où le mot « guerre » me fera moins grincer des dents. Ni Sauvée par Shakespeare, mais là je n'ai aucune excuse.
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Mon avis :
L'écrivain est un être narcissique, il adore se mettre en scène et ne peut s'admirer qu'à travers le regard des autres… C'est un peu l'impression que nous laisse Duncan, tant sa relation avec Laura paraît égocentrique, pour ne pas dire qu'elle sombre dans l'égotisme le plus maladif…
Évidemment, tous les écrivains ne lui ressemblent pas, chacun préférant d'ailleurs se sentir unique, singulier… Paradoxalement, confronté à une maladie incapacitante, cet auteur célèbre va se chercher des jumeaux en littérature ; qui, parmi ces illustres prédécesseurs, souffrait du même handicap et qu'elle en était l'influence sur ses écrits ?
Est-ce pour ne pas se sentir seul face à ce drame qu'il entame cette recherche ? Est-ce pour se persuader que la maladie ne lui a pas tout pris qu'il persuade Laura de le seconder dans son travail ?
Tout, dans le roman de Nila Kazar, se tisse autour des relations complexes qu'entretiennent les différents protagonistes entre eux, entre leur regard sur la vie et leur travail, entre leur travail et leurs sentiments, dans une chaîne où s'entremêlent différents univers reliés par même fil : Laura. Car plus que de Duncan et ses problèmes d'ego, c'est bien d'elle et de ses rapports au monde dont on parle. Et de la façon dont tout est inextricablement lié, chaque chose faisant écho à une autre : sa difficulté à aller au bout de son roman et la maladie du vieil auteur ; sa fuite en avant dans ses liaisons amoureuses et la folie qui s'empare de Melinda, sa meilleure amie ; sa relation avec Ion, celle avec Duncan ; ce qu'elle accepte, ce qu'elle refuse… On pourrait mélanger tout ça et présenter des paires différentes, ça fonctionnerait aussi !
Laura et son rapport au monde, ai-je dit ? J'aurais dû également parler du rapport à l'écriture, du lien entre fiction et réel. Et c'est aussi cela qui travaille Duncan, persuadé que sa maladie le rend impuissant à écrire.
Avec Platonik, Nila Kazar exploite, avec subtilité et humour, les déboires de Duncan pour visiter avec une plume légère, mais d'une précision diabolique, la question des interactions entre les différentes choses qui émaillent notre chemin. Ceux qui se sont déjà fait visiter d'une plume légère le savent, à moins d'être en pierre, on n'y résiste pas ! Laura nous séduit, nous fait rire, mais surtout nous interroge, et de façon durable, parce que Platonik n'est pas un livre qu'on oublie sitôt la dernière page tournée. Et quand un roman résonne encore longtemps après avoir été refermé, c'est que son auteur a réussi son coup. Pour ma part, il m'accompagne encore, plus de dix jours après l'avoir terminé.
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Dans la vie, il y a deux sortes de bons écrivains : ceux qui, à force de travail, s'approchent de la perfection, et ceux qui paraissent naturellement doués, comme tombés dans la marmite de talent quand ils étaient petits. Nila Kazar semble de ceux-là, mais la facilité avec laquelle elle déroule un texte aussi racé que fluide (d'habitude, ce terme est synonyme de pauvreté littéraire, mais pas ici) est peut-être une illusion, et peut-être est-elle parvenue à ce résultat grâce à une discipline de fer.
Je l'avais découverte par le biais de ses courtes nouvelles, d'abord dans Les rivières fantômes, puis dans le manuscrit et la mort. Subjugué, j'attendais depuis de voir ce que la donzelle avait dans le ventre et si elle était aussi bonne en endurance qu'au sprint.
Je te fais donc l'impasse sur le style totalement maîtrisé, auquel je ne reprocherai qu'un usage outrancier des participes présents, mais si, tu sais bien, ces petites paresses d'écriture que s'autorisent les auteurs quand ils ont la flemme de torturer une phrase, ces remorques verbeuses trop louuuuuuuuurdes que se coltinent les sujets. J'me comprends...
J'ai d'abord eu l'impression de lire de la chick-lit pour intellos. L'héroïne m'a paru être une Bridget Jones avec un cerveau. le livre est écrit à la première personne et, si la majorité des personnages sont écrivains et cultivés, le principal centre d'intérêt de Laura est le cul, la gaudriole, le ça-va-ça-vient, le coït, la baise. Dommage pour son ami Duncan qui, lui, est affligé d'une maladie qui l'empêche de dresser le chapiteau, ce qui influe sur ses capacités créatrices. L'occasion pour la Kazar d'évoquer l'impuissance dans la littérature, le grand thème du livre.
Il faut pourtant attendre un peu pour que la température monte, et l'auteure sait parfaitement écrire des scènes de sexe torrides et chauffer à blanc les hormones des lectrices (parce que l'homme, lui, il préfère un bon porno).
Hélas, bien qu'il parle beaucoup de chair et de corps caverneux, ce roman est peut-être trop cérébral et manque un peu de coeur et d'émotion. Je n'ai été touché que par la dernière partie du livre, à travers le personnage bourrelé de doutes de Duncan qui aurait mérité plus de place. J'ai été touché par des livres bien moins bien écrits.
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J'ai avalé ce livre d'une traite ou presque. Il faut dire que le style de l'auteure emporte facilement : c'est juste, plein de verve, ça coule de source et jaillit, fait quelques vagues, bondit... C'est toujours juste et bien écrit. Il faut dire que l'auteure est une écrivaine chevronnée et ça se sent dans la maîtrise qu'elle a de son texte.
La narration se décline en trois formes (ramenant toutes au même thème) : l'histoire de la relation de Laura et Duncan, quelques extraits du roman écrit par Laura et les fiches de travail demandées par Duncan à Laura sur des auteurs / textes. Même si elles ont une réelle implication dans la narration (elles amènent Laura à découvrir le secret de Duncan) et malgré leur intérêt en soi (que de découvertes passionnantes sur la littérature et les écrivain(e)s !), les fiches de travail m'ont un peu gênée dans le rythme de lecture, qu'elles cassaient un peu. Juste une question de rythme, qui ne m'a pas empêchée de dévorer le roman en deux jours.
J'ai beaucoup aimé l'idée qu'ont les protagonistes d'utiliser les noms d'effets de style littéraires pour remplacer ceux qui ne peuvent, entre eux deux, être dits. C'est donc tout en sous-entendus élégants que ces deux personnages osent évoquer la chose et la maladie de Duncan. Attention ! Pour autant ce livre n'est pas chaste !!! Car Laura, elle, est une jeune femme pleine de fougue !
Platonik c'est une écriture parfois douce, parfois vive, un langage adapté à ses personnages et à son histoire, à chaque scène et chaque forme de narration. Platonik c'est aussi le regard d'un homme sur sa propre condition, ses désirs contraints par le corps, tentant d'accepter ce qu'il est. Puis la frustration, qu'il ne peut dire ou montrer, car sa fierté d'homme va au-delà de ce seul problème. L'homme dans toute sa complexité, sous les yeux d'une femme qui tente de le décortiquer, de l'analyser. Mais derrière cette façade, ce jeu auquel il la soumet et ces pièges qu'il lui tend, saurait-elle l'aimer ?
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Platonik explore de façon pertinente la quête du désir, son intransigeance et sa fragilité à travers des personnages atypiques. Laura jeune trentenaire, addictive au sexe, est romancière, mais pour (sur)vivre elle écrit surtout les histoires des autres. Duncan est un écrivain reconnu, à la maturité assumée. La proposition de Duncan — une collaboration entre Laura et lui sur l'écriture de son nouveau roman — chamboule l'ordre des choses dans le petit monde de Laura.
Le roman alterne entre la narration de Laura, extraits du roman écrit par celle-ci, ses carnets intimes et la correspondance avec Duncan. Chaque partie marque le récit, porte les personnages de façon intime. le style alerte, distille de jolies pépites, la justesse des propos s'ourle parfois de dérision, d'un soupçon d'humour. Tour à tour castrateur, séducteur, manipulateur, Duncan est un personnage à la présence forte dont la frustration grandissante révèle bien plus qu'il n'y parait. Entre la perte de la jouissance et la panne d'inspiration, il n'y a qu'un pas, que franchit aisément Nila Kazar. L'angoisse est là, à chaque aveu de Duncan. Comment vivre sans l'opportunité de jouir ? Ressentir le plaisir dans sa chair, éprouver la satisfaction dans l'inspiration. La cohabitation n'est pas à prendre à la légère. Elle a construit l'homme. Aussi, sans plaisir charnel et sans créativité, comme un abandon terrifiant, la confiance en soi s'étiole. Et pourtant, au terme, Duncan offre à Laura la plus belle des inspirations.
Nul doute, Nila Kazar témoigne d'une belle alchimie dans l'art d'écrire.
Lu dans le cadre d'une masse critique, je remercie Babelio et Itil éditions pour la lecture offerte.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Ne prononce pas ce mot à la légère. Et d’ailleurs, ne le prononce jamais devant moi ! Si tu ne peux absolument pas l’éviter, tu utiliseras un autre mot. Que dirais-tu d’un terme de typographie ? Parangonnage, par exemple : dans sa forme grave, cette maladie peut mener au « parangonnage », ça m’irait très bien. L’« esperluette » du malade est coudée, elle forme un certain angle et il ne peut plus l’introduire dans « l’alinea » de la femme.
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Oh, et puis merde ! Un autre homme préfèrerait se faire égorger plutôt que de l’admettre, mais au point où j’en suis, je peux bien te l’avouer : passer à l’acte m’a toujours terrorisé. Répondre aux attentes d’une femme, essayer de la satisfaire, quelle angoisse ! Et pourtant, toute ma vie d’adulte, je n’ai pensé à rien d’autre qu’au sexe. Comment accepter que cette chose qui m’a tellement occupé, tellement obsédé, soit définitivement derrière moi ? Ça laisse un vide béant. Si j’avais su… Mais non. Si j’avais su, qu’est-ce que ça aurait changé ? Rien. On est prisonnier de soi-même.
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Un jour que je révisais mon manuscrit, je fus frappée par le parallélisme entre mon histoire avec Duncan et l’intrigue de mon roman, pourtant commencé bien avant de le connaître. Ce genre de coïncidences arrive aux écrivains, ces gens bizarres qui se souviennent de ce qu’ils n’ont pas vécu.
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