Depuis ma visite à Bergen, en Norvège, j'avais envie d'appréhender cette organisation de marchands allemands, souple, agile et efficace que l'on nommait la Hanse. Ce numéro de L'Histoire m'en donne l'occasion.
Souple, agile, efficace, j'ai déjà presque tout dit. L'organisation permet aux marchands d'un certain nombre de villes allemandes – avec en tête Lübeck – de dominer pendant quelques siècles le commerce en mer Baltique et mer du Nord, de sécuriser les transferts de marchandise et de protéger leurs marchands des locaux quand c'est nécessaire. Puissance économique et politique, la Hanse parvient pendant longtemps à neutraliser ses concurrents anglais ou néerlandais, se permet d'imposer des embargos pour faire plier des élus de villes récalcitrantes et même de faire la guerre (au roi du Danemark qui imposait de trop lourdes taxes de passage, par exemple).
Nonobstant, la Hanse n'impose pas d'obéissance absolue. Les intérêts qui unissent ces marchands ne passent pas devant les liens avec leurs villes d'origine. Les représentants d'une ville peuvent refuser de participer à une diète (une sorte d'assemblée générale) si l'ordre du jour ne les intéresse pas. Bref ce n'est pas coercitif.
Les articles du dossier décrivent cela, appuyés par de chouettes cartes. L'exemple du commerce du hareng et de celui du sel, complémentaires, est détaillé. Puis ils s'orientent vers l'image qu'à laissé la Hanse encore aujourd'hui : une similarité architecturale à travers l'Europe, de Bergen à Riga, l'emprunt du nom par des sociétés telles que Lufthansa ou Hansaplast, voire même une organisation économique qui a inspiré celle de l'Union européenne.
Ce qui m'a surtout impressionné, c'est de sentir à quel point cet univers était éloigné de l'image que l'on se fait du moyen-âge, avec ses rois, ses seigneurs et ses serfs. C'est un monde tout à fait moderne qui existait alors en parallèle. Une impression peut-être liée au fait que le Saint Empire laissait les coudées franches aux gouvernements locaux.
Le numéro contient d'autres articles intéressants comme celui sur le charisme de Napoléon ou celui sur l'organisation des épouses et concubines de l'Empereur de Chine.
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On considère parfois le charisme comme une qualité personnelle dont les individus seraient gratifiés ou non à la naissance. Mais, en réalité, le charisme doit être pensé plutôt comme une relation. il ne dépend pas uniquement de l'apparence, des facultés ou de la personnalité de l'individu lui-même, mais aussi de la capacité des autres à trouver cette apparence, ces facultés et cette personnalité exceptionnellement attirantes. Les qualités qui rendent quelqu'un charismatique aux yeux d'un public particulier peuvent le rendre odieux aux yeux d'un autre... Napoléon lui-même n'était pas charismatique pour les Britanniques, qui le voyaient comme un homoncule malfaisant, ridicule et parvenu - ils le surnommaient "Boney" ("osseux") ou "The Corsican Ogre" ("l'Ogre Corse").
(David A. Bell - "Napoléon ou le charisme en politique")
Tout un cérémonial entoure la réunion des diètes. Chaque délégation est accueillie en grande pompe à son entrée en ville. Une fois réunis, les émissaires assistent à une messe avant de se rendre à l'hôtel de ville, bien visibles de la foule. Dans la salle d'assemblée chaque ville est placée suivant un ordre censé refléter son rang au sein d'une hiérarchie informelle et très symbolique qui fait elle-même l'objet de discussions opiniâtres. Puis commencent les délibérations. Elles traitent de sujets fort variés, où se mêlent commerce et politique internationale, et vont parfois jusqu''à engager la Hanse dans des conflits armés.
(Tobias Boestad - "La Hanse - un monde de ports et de réseaux")