AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,73

sur 163 notes
5
13 avis
4
25 avis
3
8 avis
2
0 avis
1
2 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Marie-Pier Lafontaine est une petite soeur de Chloé Delaume et Christine Angot à l'énergie très Virginie Despentes. Comme les deux premières, elle a écrit une autofiction sismique sur les souffrances vécues durant l'enfance. En l'occurence, les sévices perpétrés par un père monstrueux qui multiplient des jeux sadiques à connotation sexuelle comme promettre à la narratrice et sa soeur de les violer lorsqu'elles auront douze ans. Ou « comment agresser ses enfants sans les pénétrer », la mère a interdit le viol, mais pas le reste.

Le texte est très souvent insoutenable et profondément perturbant. Sans concession. Je l'ai cependant lu deux fois. Pour dépasser l'horreur immédiate décrite qui sidère et brouille le jugement. Pour rendre justice au remarquable travail d'écriture de l'auteure. Ce texte n'est pas un témoignage. Il s'approche du réel tout en conservant une liberté farouche. C'est une oeuvre littéraire avec des choix formels forts et une esthétique juste.

Les phrases sont travaillées, sculptées à l'extrême, incisives, regroupées en des chapitres tout aussi brefs, un par page, avec beaucoup d'espaces blancs au-dessous et au-dessus comme pour laisser le temps au lecteur à prendre une goulée d'air. Chaque phrase est une décharge, un électrochoc. Les points hachurent pour apporter un maximum de puissance sans laisser la moindre échappatoire.

« Je voudrais que ce texte décime ma famille entière. »
« La mère participe à l'inceste » répétée en anaphore.

On est dans un match de boxe. L'écriture comme réponse à la violence. Elle renverser le rapport de force en brisant la loi du père de ne pas raconter. Elle le dépossède de sa violence en le tuant symboliquement, sans chercher à s'excuser des séquelles psychologiques. Elle autorise à écrire, tant pis si les mots dérangent notre confort de lecteur et le "politiquement correct".

« Ce désir inavouable, paradoxal, que jamais je n'aille mieux. Que les douleurs ne s'éteignent pas. Que la peur persiste dans ma chair, mes os. Les crises et les colères. Les viols et les morsures. Comme autant de preuves que je n'ai rien inventé. Tout pour que je puisse continuer à lire dans les ecchymoses et les rejets les marques concrètes d'une enfance qui n'en était pas une. Je voudrais encore plus de cicatrices. Encore plus de traces de peau décolorée que jamais plus aucun rayon de soleil ne pourrait foncer. Je voudrais que l'on me croie. »

Le texte est d'une puissance rare. Irrespirable, il crie et tabasse. J'ai rarement lu un texte aussi estomaquant pour faire ressentir physiquement la terreur d'enfants martyrisés

« Je sens l'énergie se brûler, consumer ses réserves. Même un battement de cils exige une quantité démesurée d'effort. Les mouvements spontanés de déglutition s'arrêtent. Les gémissements ne sortent pas de la gorge. Ils se coincent. Ils vibrent et cognent, mais ne sortent pas du corps. Refuser de laisser la terreur assiéger ses os est épuisant."

" Ma chair a été vidée de son sacré. Mon corps a été purgé de lui-même. Ses terminaisons nerveuses ne mènent plus nulle part. »

Mais le texte ne fait pas que tabasser. Il bouleverse aussi quand on sent la petite fille derrière l'adulte résiliente, comme lorsque elle s'imagine au conditionnel une mère aimante et protectrice.

« J'aurais tellement voulu une mère stridente. Une mère à nous, pour nous, pour bercer nos cauchemars. Je l'aurais choisie iris, tympan et tambours. Elle aurait été toute en colère. Sans lignes de fuite ni fatigue. Une femme au ventre plein ? A border les nuits sans étoiles. Elle nous aurait décroché des petits matins aux croissants, des couleurs et la lune. »

Une proposition littéraire exceptionnelle qui me laissera une empreinte forte.
Commenter  J’apprécie          13720
Un uppercut, cette lecture !
J'en reste KO, pensive.
L'écriture de Marie Pier Lafontaine
est armée d'une force vitale
pour nous dire aussi fort
l' éffroi, la douleur, la mort qui rode.
Un batteur incestueur
une incestigatrice
deux incestuées..
Une violence, un sadisme XXL
On n'en croit pas ses yeux.
On pense mal comprendre .
La réalité dépasse la fiction
les mots choisis relèvent de la vraie vie.
L'écriture pour rester vivant, exister
témoigner, crier quand on a dû se taire.
Ce récit est fulgurant .
Une voix d'outre-tombe
car l'enfance et l'innocence
ont été assassinées à petits feux
avec une savante perversion.
Inoubliable je crois.

Commenter  J’apprécie          282
Je ne suis pas certaine d'avoir les mots pour vous parler de cet ouvrage.

Tel un exutoire l'autrice nous fait part des sévices corporels et psychologiques qu'elle a subi (ainsi que sa soeur), de l'enfance à l'adolescence, infligés non par un père mais un monstre, un prédateur, un être abject.

Ce texte est d'une violence inouïe.
Il est brut, insoutenable, cru, sans concession.
Il décrit l'horreur, l'inimaginable.

Cet ouvrage n'est pas de ceux que l'on prend plaisir à lire mais il est de ceux qu'il est nécessaire de lire !

Une claque dévastatrice qui vous prend aux tripes et vous donne la nausée de bout en bout.
Commenter  J’apprécie          160
bonjour les babeliophiles petit retour sur ma dernière lecture.
une autofiction courte, une centaine de pages mais croyez moi largement suffisant. Horrible,inimaginable, comment peut on faire cela ??? un père,une mère NON des monstres OUI.
Les 1eres pages sont difficiles que dire des autres,par moment je fermais les yeux et j'imaginais ces soeurs,l'intérieur de mon ventre se tordais de douleurs,et pourtant j'en ai lu des trucs horrible mais là.Une lecture tres difficile Je pense que ce livre va me rester un moment gravé comme la Tanche et Buczo.
Mais comme je dis toujours ceci n'est que mon avis personnel
Commenter  J’apprécie          122
Implacable, fondamental, « Chienne » est serré comme un café fort. C'est une urgence de lecture. Ici, tout est vrai, dévorant, cruel. Marie-Pier Lafontaine délivre des mots sur ses maux, sans fausse route ni compromission. Ne pas fuir sous le filigrane, retenir ce grave qui se dévoile, ne pas retourner le sablier des paroles qui s'écoulent, plaies vives à jamais. Hors de tout entendement, parce que de trop. Et pourtant, ses dires sont des coups de hache sur les murailles génitrices. Garder la tête haute, suivre les lignes de cette enfance et adolescence ravagées. Ecouter et comprendre. « Ma soeur et moi n'avons qu'à nous prendre par la main pour savoir avec certitude que nous survivrons au père. » « Il vaut mieux exister en tant que chienne que de ne pas exister du tout. » Il y a des livres joyeux, légers, poétiques dont on retient pour le plaisir le miroir entre nos mains. Certains, plus rares osent s'affranchir. Dépasser la donne, dévoiler ce qui est, fût et deviendra dans longtemps lorsque la résilience, le lâcher-prise oeuvreront et râcleront les aspérités jusqu'à plus soif. Il y a un livre « Chienne » lourd, un cadenas sur les entrailles, les sens agonisants, les rêves d'enfance meurtris. Engagé, un acte politique, sociétal qui telle une charge gonfle les pages de faits. Ce criant, les douleurs, un sadisme au paroxysme de tout entendement. Ecrire et éditer sont des flambeaux. Courage et loyauté. Bousculer l'échappée conventionnelle. Ce récit ne se passe pas seulement dans un antre familial. Ce témoignage est langage de survie. Il est bien au-dessus des cimes d'une lecture seule. Il s'agit du summum de ce qu'un père est absent, invisible. Il est une bête sauvage, imprévisible, dévoreuse. le relationnel brisé à coups de supplications, soumissions, enfant que l'on retourne mentalement toupie et exutoire. Ce récit est littérature. Marie-Pier Lafontaine s'abreuve au ruisseau qui murmure l'écoute, les sons de l'attention aux verbes qui deviendront rédempteurs, un jour peut-être. Ce livre est sa chance, sa carte, son passeport pour revenir sur la terre ferme. Nous sommes lecteurs la responsabilité. « Chienne » est enivré de vérité sourde. Ecrire pour sauver sa peau, celle d'après. le père est un fou, un pervers, le néant. Démoniaque, loup hurlant se jetant sur les brebis, ses filles. Siamoises de souffrances, écartelées, jetées en pâture dans la gueule du loup. La mère voit, reste stoïque. Pire qu'un hurlement, ce déni déchire ces fillettes de papier, de larmes, de résistances. La littérature est une arme. Une alliance vitale entre l'auteure et l'éditeur ici présent. Relier les brisures, aspirer au crucial d'une mise au monde. C'est un acte citoyen sublime. C'est aussi pour cela que l'on pleure. Que « Chienne » soit lu par tous et toutes. Offert, qu'il bouscule l'ordre établi d'un conventionnel que l'on ne veut plus. Qu'il soit lu à voix haute dans les lycées, sur tous les frontons. « Que personne ne puisse croire qu'il s'agit de la fin. » Indispensable.

Commenter  J’apprécie          90
Dans Chienne, Marie Pier Lafontaine condamne l'enfance meurtrie en clamant l'horreur avec rudesse et flamboyance. Les mots heurtent, empoignent et déchirent le lecteur. L'autrice hurle la rage contenue pendant ces années de silence écrabouillé par son géniteur, avec la complicité de sa mère. Elle conte le drame de ces enfants martyrs nés dans des familles tyranniques échappant à tous les radars de protection et qui doivent se construire malgré les humiliations, les tortures, le sadisme comme modèle de parentalité. Les mots claquent et empoignent. Les mots enjoignent les actes à rétrécir, ils aident à refaire surface.

Nos sociétés sont peuplées de bourreaux. Ce n'est pas parce qu'on ne les décèle pas qu'ils n'existent pas. Ce n'est pas parce qu'on ne les imagine pas qu'ils ne se modélisent pas. Ils peuvent d'ailleurs apparaître chez monsieur tout le monde. le père soumet ses enfants en les en avilissants. La mère victime elle aussi, ne trouve pas le courage de protéger, elle va même plus loin, elle livre ses filles en échange d'un peu de paix, pour elle, pour elle seule.

Comment peut-on laisser ses enfants en proie à l'agonie ? Comment peut-on oeuvrer avec autant d'acharnement pour détruire un être, qui plus est lorsque c'est son enfant ? Ces questionnements me soulèvent depuis toujours. Je comprends la maltraitance éducative ordinaire (même si je ne l'excuse pas) et je tente de la soustraire (je travaille en protection de l'enfance). Mais la cruauté psychopathique n'a pas de limite et n'est pas solutionnable, pour autant on la traite parfois de la même façon. Même en protection de l'enfance, on en rencontre peu de ces familles-là, sans filets, sans âme. Sont- elles bien cachées ? J'espère toujours secrètement qu'elles ne se soustraient pas seulement aux regards.

Je suis admirative de la résilience de l'autrice, qui sublime par l'écrit cette dégradation, cette offense à sa construction identitaire.
Ce récit est implacable et d'une grande force littéraire. Il est utile, subtile et sans apitoiement.

Lien : https://unmotpourtouspourunm..
Commenter  J’apprécie          60
La force de ce livre, ce n'est pas tant le sujet, les horreurs racontées, c'est la mise en littérature de cette histoire. La forme, l'écriture de Marie-Pier Lafontaine. Ce sont les phrases courtes, le rythme de lecture, un sentiment d'étouffement parfois. Ce sont les courts tableaux, comme des scènes d'un film, qui permettent de montrer la monotonie, la répétition de l'horreur et des souffrances. Ce sont les répétitions. Ce sont aussi les silences, les pauses, qui disent parfois mieux les choses que les mots. Les moments où on s'accorde un répit dans la lecture, parce qu'il y a un blanc. Un point. Mais attention, c'est pour mieux nous terrasser avec la prochaine ligne. Les dernières phrases sont souvent les plus difficiles.

Je ne peux pas dire que j'ai aimé ce livre. On n'aime pas un livre pareil. Mais je peux dire que c'était l'une des lectures les plus fortes de l'année. Un livre que je ne suis pas prêt d'oublier.
Et je ne peux pas non plus en recommander la lecture. Parce que c'est un livre qui peut raviver des blessures, faire très mal.
Je dirais juste : c'est un livre très puissant. Très dur, mais bizarrement aussi, beau. Un livre que je ne regrette pas du tout d'avoir lu. Qui s'en sent capable, le lise.
Lien : https://ledevorateur.fr/chie..
Commenter  J’apprécie          43
Un premier roman qui retourne les tripes. La Québécoise Marie-Pier Lafontaine signe une autofiction qui raconte un père sadique, cruel, tout-puissant, dévastateur. La violence est physique, mais les coups psychologiques sont tout aussi glaçants. L'angoisse de l'imprévisibilité du père qui peut surgir à tout moment et inventer des jeux pervers et dégradants envers ses enfants. le père est abominable et la mère reste silencieuse, complice de cette torture. Les parents qui détruisent la vie de leurs enfants, qui la réduisent en miette, qui l'annihilent. Aux actes d'horreur, s'ajoutent les zones passées sous silence où l'on devine que l'indicible peut aller encore plus loin, silence que l'auteure assume et qui renforce le caractère intolérable de ce qu'ont vécu ces enfants.

Marie-Pier Lafontaine réussit ce tour de force à mettre en mots son histoire alors qu'elle semble ineffable. Sans voyeurisme, le texte est puissant et réfléchi.
Lien : https://delphinefolliet.com/..
Commenter  J’apprécie          40
Voila ! Je crois que je viens de lire le roman ultime sur la pédophilie et autres abus fait aux enfants. Chienne de Marie-Pier Lafontaine. le récit est de cette violence qui prend aux tripes alors que paradoxalement, il contient moins d'horreur que d'autres du genre (je pense à le démon de la colline…). La violence ici est aussi psychologique, sourde, une menace permanente. L'auteur nous raconte son enfance, avec un père prédateur et une mère complice et dans un sens, victime.

Le style, déjà, ramène tout à l'essentiel. Car il n'y a rien d'autre que ce que ces gamines vivent. Marie-Pier Lafontaine ne brode rien. Tout est livré tel que ressenti, sans fard, sans mise en situation. C'est brutal et âpre. Un gouffre sans lumière. Chienne. Pourtant, le ton s'avère distant, comme dissocié des brimades, probablement un processus de protection psychologique qui permet de tenir et s'accrocher à quelque chose. Chienne.

Malgré la dureté du récit, il y a une forme de romanesque dans le destin de cette autrice, qui, comme elle le fait, donne à Chienne cet élan des destins extra ordinaires que l'on peut citer en exemple. Je n'en dis pas plus.

Marie-Pier Lafontaine a fait un remarquable travail littéraire sur ce récit et cela confirme que son ambition méritait d'être suivi, malgré tout. Chienne.


Lien : http://livrepoche.fr/chienne..
Commenter  J’apprécie          30
Chienne. Ou comment un si petit livre peut te mettre une si grande claque.
Comment te retourner, avec si peu de mots.
Chaque pages, chaque paragraphes, est un uppercut. Pleine gueule.
Décrire l'horreur, l'humiliation, la peur, les sévices, l'emprise..
Sa soeur et elle, les filles-chiennes, le père : papa-ogre, la mère, les bras le long du corps, toujours pleine de foutre.
Les rêves ? ...des voeux de mort.
C'est hard, brut, ça ne peut pas être autrement.
Et cette écriture... Une poésie noire. Noire et rageuse. C'est beau, malgré l'horreur...beau et douloureux.

Commenter  J’apprécie          30



Autres livres de Marie-Pier Lafontaine (1) Voir plus

Lecteurs (322) Voir plus



Quiz Voir plus

Littérature québécoise

Quel est le titre du premier roman canadien-français?

Les anciens canadiens
La terre paternelle
Les rapaillages
L'influence d'un livre
Maria Chapdelaine

18 questions
221 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature québécoise , québec , québécoisCréer un quiz sur ce livre

{* *}