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Ce récit analyse de manière juste et sans aigreurs inutiles, les "failles" de la société haïtienne, et pas seulement celles révélées par la catastrophe du 12 janvier 2010. Plus qu'un appel à l'aide ( "de toute façon, à la longue, l'aide pervertit ceux qui donnent et ceux qui reçoivent"), c'est un appel à laisser Haïti à se prendre en mains elle-même, à acquérir une véritable indépendance par rapport aux grandes puissances. Un texte magnifique, qui sonne toujours juste et se tourne délibérément vers l'espérance.
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Témoigner, oui, mais comment se demande avec justesse l'écrivain ? Témoigner sans donner force au malheur, sans misérabilisme, sans ressasser des clichés. Pourquoi le sort s'acharne-t-il continuellement sur cette île si malmenée depuis deux siècles. Yanick Lahens explore toutes les failles de la société haïtienne, l'exclusion, la scission entre "ceux qui ont" et "ceux qui n'ont pas", scission dont l'origine remonte à l'indépendance. Elle observe, impuissante au glissement de la société moyenne vers la précarité, glissement accéléré par le séisme, elle pointe la corruption des politiques, la mauvaise gestion et l'incompréhension des ONG face à la situation haïtienne qui rendent parfois la situation encore plus inextricable, la trop grande dépendance du pays à l'assistance, la désorganisation, l'ingérence des pays riches, totalement inadaptée. Reste l'espoir qu'un jour Haïti sortira la tête de l'eau.
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Le 12 janvier 2010, à 16h53 minutes, la terre s'ouvre en Haïti, "Port au Prince [est] chevauchée moins de quarante secondes par un de ces dieux dont on dit qu'ils se repaissent de chair et de sang". Yanick Lahens qui entamait l'écriture d'une fiction, le roman d'amour de Nathalie et Guillaume, voit son projet contrecarré par l'horreur des événements. Pour l'écrivain, il devient alors urgent de témoigner, de raconter, de dire, d'alerter, mais sans exotiser davantage, sans en "rajouter" par rapport à ce que montre les medias, sans tomber dans le voyeurisme macabre et comptable, tout en disant la vérité : "Comment ne pas laisser au malheur une double victoire, celle qui nous broie corps et âme (...) Comment éviter l'enfermement du dedans en ne nous en tenant pas à une simple comptabilité macabre ?(...) Comment éviter l'enfermement de ceux qui nous verrouillent du dehors en attendant de nous que cette comptabilité macabre ? Comment ramener les mots à cet espace paradoxal du jeu, où ils disent et ne disent pas ? Comment donner à la littérature sa part et sa belle part ? (...) Pas un seul jour sans que je n'aie été hantée par ces questions".

Yanick Lahens s'efforce, dans ce récit, de témoigner de ce qu'elle voit, et ce qu'elle voit l'amène à raconter la situation et l'histoire complexe d'Haïti, à montrer ses failles historiques, sociologiques et politiques : "Le 12 janvier 2010 a mis en évidence une catastrophe lancinante tout aussi dévastatrice que le tremblement de terre, notre bilan d'Etat-nation. Mais ce bilan est aussi celui des relations entre les pays du Nord et ceux du Sud." Elle prend appui sur les études d'anthropologues, de sociologues et d'historien pour démontrer que les failles profondes de la société haïtienne remontent à une scission de la nation dans les premières années de l'indépendance, "en deux parties, avec comme point de clivage, la position par rapport au type de développement à adopter" et de l'appropriation de l'outil de production, "qui avait fait de ce territoire la plus riche colonie du monde". En Haïti, Yanick Lahens explique qu'il y a ceux qui ont, les Créoles (mulâtres ou Noirs descendant d'esclaves affranchis ou de Noirs ayant acquis fortune et/ou éducation à l'occidentale au cours des ans) , et ceux qui n'ont pas, les Bossales ("Africains" exclus du partage d'une partie de l'outil de production et désirant le rester). Pour l'écrivain, cette faille est la plus grande ("Je ne connais pas de faille historique et sociale plus grande que celle-là en Haïti. C'est elle qui fabrique l'exclusion depuis plus de deux siècles. Elle nous traverse tous, Bossales comme Créoles. Elle structure notre manière d'être au monde. Elle façonne notre imaginaire, ordonne nos fantasmes de couleur de peau, de classe. Bloque notre société en deux modèles indépassables : maîtres et exclaves").

Yanick Lahens parle de son pays avec un amour immense mais sans concession. Elle reconnaît le travail d'une partie des ONG tout en gardant ses distances car les malheurs des uns peut vite devenir le business des autres (depuis le tremblement de terre, Haïti est devenu "le pays à plus forte concentration d'ONG par habitant", ce qui a fait flamber les prix). Et pourtant, ce n'est pas ce qui sauvera Haïti, d'autant plus que l'aide ne va pas forcément aux nécessiteux, au regard du haut degré de corruption du pays. Haïti a besoin d'aide, elle ne le nie pas pas, mais il faut que Haïti fasse son sevrage de l'aide internationale pour retrouver sa dignité : "Nous somme devenus à la longue des camés, dépendants d'une cocaïne, d'un crack qui s'appelle l'aide internationale. La reconstruction, la vraie, supposerait un accompagnement de qualité venu d'ailleurs (car nous avons besoin d'aide) mais précisément par une cure de désintoxication qui passerait par les affres du sevrage avant le long chemin vers la dignité."

J'ai trouvé ce récit à la fois instructif et extrêmement bien écrit. J'ai appris beaucoup sur l'histoire de l'île. Un livre qui permet de voir largement au-delà du "vernis" médiatique, sans pour autant tomber dans le voyeurisme, grâce à la grande pudeur de l'auteur. Un tour de force qui n'est pas donné à tout le monde.
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Yanick Lahens a vécu le tremblement de terre du 12 janvier 2010 à Port-au-Prince. Elle aurait préféré écrire un roman d'amour plutôt qu'un récit de cette catastrophe.
Usant d'une langue superbe, elle mêle son témoignage personnel avec l'analyse politique du malheur en Haïti et des dérives de l'aide internationale. le couple qui devait être le moteur de son roman parviendra-t-il à se construire à l'image du peuple Haïtien qui doit recommencer à vivre en dépit de la pauvreté, des ravages du séisme et de la carence du gouvernement.
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L'auteure rend compte de la faille sismique du 12-01-2010 et évoque les autres failles économiques et politiques qui gangrènent l'île. A l'origine peut-être l'opposition ancestrale, culturelle, entre Bossales et Créoles " ceux qui n'ont pas et ceux qui ont. le Créole est mulâtre [...] le Bossale est noir. Je ne connais pas de faille historique et sociale plus grande que celle-ci en Haïti."
Le récit plein d'empathie mais sans excès montre aussi les inconséquences de l'aide internationale et l'auteure s'interroge sur le rôle de l'écrivain devant une telle catastrophe. A lire pour ne pas oublier...
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Yanick Lahens est une écrivain et elle vit à Port-au-Prince. Suite au séisme, elle décide de rester, de porter secours selon ses moyens à qui le demande et surtout de continuer à écrire, au jour le jour, sur les Haïtiens, sur Haïti. Elle ne fait l'impasse sur rien. Pas de misérabilisme, juste un constat : aidons les Haïtiens à vivre, à s'en sortir eux-mêmes ! Loin des discours habituels, Yanick Lahens insuffle une bonne dose d'optimisme et "une formidable force de vie." (4ème de couverture)
Lien : http://lyvres.over-blog.com/..
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Un témoignage émouvant sur le tremblement de terre, qui mêle incompréhension et impuissance face à l'acharnement de la violence, humaine comme naturelle, envers Haïti, ainsi que des réflexions et critiques que j'ai trouvées extrêmement pertinentes et intéressantes de l'auteur sur les défauts et les espoirs de la population haïtienne, ainsi qu'entre autres sur le bienfondé de l'aide humanitaire et de l'état de perfusion constant sous lequel est mise cette île si proche et si lointaine.
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À quoi sert la littérature ? Certains diront qu'elle permet d'échapper au temps, d'autres qu'elle offre une perspective différente sur l'histoire et certains affirmeront qu'elle représente l'humanité dans ses aspects les plus sombres et les plus lumineux. La question se pose d'un écrivain à un autre, d'un lecteur à un autre, pour nous permettre de nous plonger dans l'instant présent. La littérature est une peinture insaisissable où tous les univers possibles trouvent leur place, dans un ultime élan de générosité et de liberté.

Le 12 janvier, une date aussi douloureuse pour la mémoire haïtienne, nous rappelle un autre 12 janvier. Un jour où, en quelques secondes seulement, la vie, l'espoir de nombreuses familles ont été emportés. Une photographie bouleversante qui trouve son écho dans quelques pages, avec l'âme d'une vie entière. « Failles », le récit de vie, d'espoir, de témoignages et de colère, désigne l'innommable qu'a été le 12 janvier 2010 en Haïti. C'est un regard franc et profond porté sur un pays qui souffre. Des questions sont posées, sans attendre de réponse, au milieu du tumulte historique d'une île qui a marqué l'histoire de l'humanité.
Comment témoigner, se demande avec tristesse l'auteure de « Bain de Lune »? Comment témoigner sans renforcer le malheur, sans tomber dans le misérabilisme, sans se contenter de clichés ? Pourquoi le sort s'acharne-t-il continuellement sur cette île, si malmenée depuis deux siècles ? Dans ce récit qui s'impose sans demander permission, Yanick Lahens explore toutes les failles de la société haïtienne : l'exclusion, la division entre « ceux qui ont » et « ceux qui n'ont pas ».
Lien : https://livreshaiti.com/fail..
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