En tant que lecteur débutant, j'alterne classiques et romans contemporains. Dans ce second volet, je parcours les "Prix" de ces dernières années. C'est ainsi que je suis tombé sur "
Avec toutes mes sympathies". Sans me douter de ce que j'allais trouver.
Pénible, très pénible, cette lecture. Eu égard au nombre de notes et de critiques, ne revenons pas sur le fil de l'histoire.
Une histoire qui est d'abord l'exaucement d'un voeu. Avant de se donner la mort, Alex avait demandé que sa soeur écrive un livre - un témoignage - qui essayerait d'expliquer cette poisse noire qui a étoufé sa vie, et qui touche, à un degré moindre, celle de sa soeur Olivia. On dit que, parfois, on écrit avec ses larmes, ou qu'on écrit avec son sang. C'est bien ce qui se passe ici.
"Expliquer" est un terme bien inadéquat. Car expliquer, on le peut. La maladie a un nom, est certainement décrite dans ce que les psychiatres appellent le DSM, et elle a des traitements connus. Ce n'est pas que l'on manque d'explications. Même si elles ne sont que partielles et multiples. le fonctionnement du cerveau n'est connu - et encore, de façon incomplète - qu'en termes de correlation, pas de causalité : A va souvent de pair avec B, mais est-ce qu A cause B ? Ou est-ce que ca marche dans l'autre sens ? Ou tous deux sont-ils causés par C ? Ou pire, sont-ils causés par C,D,E, F et quelques autres, tandis que d'est causé aussi par F et par W, F quant à lui .... Ca, c'est le cerveau. Mais quand on en vient aux liens entre le cerveau et l'esprit, le mystère s'épaissit considérablement. Un psychologue a toute une nomenclature concernant ce domaine là, et des moyens d'intervention. le psychologue, le psychiatre et le neurologue interviennent, chacun avec ses compétences, sa carte du terrain et ses moyens pour essayer d'améliorer la situation. Ainsi nous passons des explications aux interventions.
Expliquer, diagnostiquer, intervenir, Il en est beaucoup question dans ce livre. Et c'est essentiel pour améliorer la qualité de vie, Pour rendre cette vie la meilleure possible. Voir guérir tout à fait. Mais, bien sur, ce qu'Alex aura voulu dire, c'est plus. Expliquer, c'est aussi : circonscrire, faire sens, peut-être même extraire, j'allais dire : régler ses comptes avec la maladie. Guérir comme si l'on n'avait jamais été malade.
Olivia poursuit surtout la piste de la génétique ("une propension à la mélancolie") et d'une éducation plutôt collet monté. le fait est que beaucoup d'hommes dans la famille semblent en souffrir. Mais de là à conclure quoi que ce soit de concret concernant les origines, ca me semble faire un grand écart. Et le fait qu'Olivia - elle même très fragile, même après plusieures thérapies - refuse de faire son deuil me semble bien inquiétant.
Il y a témoignage, et il y a explication, mais sans doute pas au sens ou l'aurait souhaité Alex. Il y a le récit d'un vécu et de ce qu'il comporte. Mais il faudrait transposer ces vies et leur histoire dans un cadre qui fasse sens. Je me demande si Olivia a commencé ce long travail, ou si elle continue à fouiller l'absence.
Un truc vraiment pervers, cette maladie. Et je crois bien que nous connaissons tous des gens qui en souffrent.