Ces tambours résonneront longtemps dans mon coeur et garderont toujours mon esprit en alerte sur quant au risque de dérive de toute organisation dont la soif de pouvoir finit par assassiner l'homme dans sa chair et son âme.
Marc Ledret donne naissance à un personnage magnifique par sa dignité, son humanisme, son courage: Hans. Il est allemand, son père et ses frères ont été tués pendant la guerre. Il déclenche la mutinerie de Berlin en 1918 et s'engage dans la ligue Spartakiste, au parti communiste allemand, s'insurge à nouveau, réadhere avant de découvrir les dérives autoritaristes et la paranoïa du mouvement et quitte définitivement le parti. Devenu anarchiste, il combat avec ses camarades de toutes nationalités contre le franquisme. Il constate avec terreur la montée du fascisme et la passivité aveugle ( ou complice!?) de l'Europe et tout particulièrement de la France.
C'est ensuite en toute logique qu'il devient résistant dans la France occupée. Puis il retrouve Berlin avec ses profondes blessures mais sait qu'il n'y restera pas. Il n'est plus de ce pays ni d'aucun autre,mais de tous.
Ce parcours nous entraîne de façon très concrète dans le quotidien des luttes sur le terrain. La boue,le sang,la torture. J'ai partagé la beauté de la solidarité, de l'amitié, l'euphorie des victoires,mais aussi l'horreur des trahisons,la violence des combats,le cynisme des dirigeants, la tristesse face à l'assassinat des camarades de coeur et d'utopie. L'amour est aussi au rendez-vous et de la façon la plus belle qui soit.
Hans témoigne de la possibilité d'aimer sa terre natale mais de ne plus attacher d'importance à sa nationalité car ne devrions-nous pas appartenir à une communauté de valeurs bien au-delà des frontières plutôt qu'à une patrie qui n'a de sens que pour les dominateurs?
Marc Ledret construit son récit dans une linéarité qui part de 1918 pour arriver en 1995,mais avec un procédé de boucles au gré des souvenirs d'Hans mais aussi des recherches de Maria. Cette jeune femme découvre le jour de son mariage qui elle est réellement et va alors partir à la recherche de ses origines.
Je me répète, mais ce roman est splendide!
Il s'en dégage une force et une humanité vibrante. Ce voyage à travers un siècle rappelle sans cesse qu'être humain c'est lutter pour la liberté, mériter la dignité par le respect de l'autre,de la vie et repousser toute idée de pouvoir. Ce poison qui détruit toute possibilité d'un monde juste. Il nous rappelle la nécessité de s'opposer et de trouver le chemin de la solidarité entre peuples plutôt qu'entre États.
Bien que traité différemment et d'une lecture plus facile,
Les tambours de l'âme me font penser au très beau livre de Michel Ragon La mémoire des vaincus.
Son message et la vigilance qu'il impose quant aux discours officiels promus par les Dirigeants, résonne d'une façon particulièrement sensible et douloureuse au vue de l'actualité !
Ce livre ne prendra pas la poussière. Je veux le faire circuler et lui redonner une place où je pourrai le réouvrir à tout moment.
Merci pour cette lecture rayonnante que m'ont offert les éditions Locus Solus et Babelio.