Liberté pour les insensés

Ce livre très documenté fait découvrir au lecteur les débuts de la prise en charge à la fois humaine et médicale des « fous ».
La méthode utilisée, malades enchaînés comme des fauves dangereux, battus, affamés pour les calmer, saignés, purgés…toutes sortes de traitements qui ne faisaient que dégrader encore plus l'état de ces malheureux.
La rencontre de Pussin, gardien « humain » à Bicêtre et la nomination de Philippe Pinel en tant que médecin-chef va permettre, grâce à la mise en commun de leurs compétences d'humaniser enfin ces conditions de « détention » et d'aborder l'état des insensés comme une maladie dont il faut trouver la cause, le déclenchement ce qui peut permettre d'envisager un traitement…et surtout la libération des ces chaînes. Ce point sera le plus difficile à faire admettre.
Inventer le « traitement moral » de l'aliénation, pendant le climat de terreur de la Révolution sera possible grâce à la détermination de quelques-uns sur lesquels l'aura du siècle de Lumières ne s'est pas éteint alors que des flots de sang coulent dans les rues.
Ce récit montre une fois de plus que les grands progrès de l'humanité reposent au départ sur la détermination d'une personne. L'alternance du récit et des lettres de Philippe Pinel aide à comprendre les tâtonnements qui ont précédé cette nouvelle approche de la maladie.

Philippe Pinel (1748-1826) est un médecin aliéniste (psychiatre). Avant la Révolution, il est le médecin de la maison de santé Belhomme, clinique psychiatrique privée. En 1793 il est nommé à Bicêtre. Là, les fous sont, de façon traditionnelle, soumis à des traitements violents qui ont pour objet de les calmer: purges, douches froides. Les plus agités sont enchaînés dans leurs loges, petites chambres tenant du cachot. Pinel va mettre au point le "traitement moral" : il parle aux malades, les pousse à se raconter, fait appel à ce qu'il leur reste de souvenirs et de raison. Petit à petit, il relâche les fers des enchaînés.

Dans sa tâche, Pinel est secondé par Jean-Baptiste Pussin. Entré à Bicêtre en 1771 comme malade, il y est resté comme gardien. J'ai sous les yeux un vieil article du Monde des livres (7 avril 2006) qui présente Dans la nuit de Bicêtre, de Marie Didier et pour lequel L'homme qui a libéré les fous, c'est Pussin. Bien que son héros soit Pinel, François Lelord montre aussi l'importance du rôle de Pussin.

J'ai apprécié cette lecture. le style en est simple et facile à lire, qui fait alterner narration et passages du "journal" de Pinel (il s'agit d'un "journal" écrit par l'auteur et non d'un document historique). Une fois commencé ce livre, difficile de le lâcher car j'avais envie de savoir comment tout cela allait tourner : Pinel libérera-t-il les fous, malgré les craintes et malveillances du personnel de l'hospice ? Comment vont évoluer les malades dont on nous a présenté le cas plus particulier ? Notre héros osera-t-il déclarer sa flamme à la belle Mathilde ?
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On se laisse volontiers accompagner dans ce voyage temporel passionnant, un roman qui revient sur la vie et l'oeuvre de Philippe Pinel avec enthousiasme et talent. C'est aussi divertissant qu'instructif, on y apprend des choses intéressantes sur la révolution (qui accompagne l'autre, la nationale) psychiatrique en France dans un contexte plutôt troublé. Nul doute que l'auteur connaît son sujet, et manie la plume avec adresse. Pour ma part j'ai eu une très agréable surprise à la lecture de ce petit roman qui se laisse déguster...