Citations sur Le roman de la rose (92)
" il s'en faut de peu que mon coeur ne se brise quand je me souviens de la rose, dont il me faut rester si loin."
Après était encore représentée Envie, qui jamais de sa vie ne rit et jamais pour rien ne se réjouit, sinon quand elle voit ou entend raconter que quelqu'un a subi un grand préjudice.Rien ne saurait lui faire autant plaisir que la malheur et la mésaventure d'autrui.Voir une grand catastrophe s'abattre sur un homme de bien, c'est le spectacle qui lui fait grand plaisir.Elle éprouve en son for intérieur une joie intense en voyant quelque lignage déchoir et tomber dans le déshonneur, et quand quelqu'un s'élève et accède par son intelligence ou sa prouesse à une situation honorée, c'est la chose qui la blesse le plus, car sachez qu'elle ne peut s'empêcher d'être très en colère quand arrive un bien.
Mais laissons ces larges voies à ceux qui les empruntent volontiers; et nous, qui menons joyeuse vie, suivons dans la gaieté et l'enjouement les plaisants sentiers, non pas les chemins à charrettes, mais les mignonnes petites sentes.
Je veux maintenant, et ma dame aussi vous le demande, seigneurs, qu'à ce sermon, mot pour mot, tel que je le prononce, vous y prêtiez tous votre attention -car on n'a pas toujours son livre sur soi (...)- de telle façon que vous le reteniez entièrement par coeur , si bien que, quel que soit l'endroit où vous veniez par bourgs, par châteaux, par cités et par villes, vous le récitiez, hiver comme été, à ceux qui n'y ont pas assisté. Il est bon de retenir des paroles quand elles viennent de bonne école, et il est encore mieux de les reproduire. On peut par là gagner en réputation. Mes propos sont fort vertueux, et cent fois plus précieux que le saphir, le rubis ou le "balai". Chers seigneurs, ma dame a besoin de prêcheurs pour sa religion, afin de rappeler à l'ordre les pécheurs qui s'écartent de ses règles, qu'ils devraient suivre et respecter.
Labourez, au nom de Dieu, labourez, barons, labourez et restaurez vos lignages ! Si vous ne pensez pas fortement à labourez, il n'y a rien qui puisse les restaurer. Retroussez-vous bien par devant comme si vous vouliez prendre le vent; ou si cela vous plaît, mettez-vous tout nus, mais n'ayez ni trop froid ni trop chaud. Soulevez avec vos deux mains nues les mancherons de vos charrues, soutenez-les fortement de vos bras et prenez la peine de pousser le soc raidement dans le bon sillon afin de mieux vous y enfoncer. Et les chevaux qui vont devant, pour Dieu, ne les laissez pas être paresseux : éperonnez-les rudement et donnez-leur les plus forts coups que vous puissiez jamais donner lorsque vous voudrez labourer au plus profond; et les boeufs aux têtes cornues, accouplez-les sous le joug des charrues, réveillez-les avec les aiguillons. Nous vous invitons à partager nos bienfaits. Si vous les piquez bien et souvent, ils en laboureront d'autant mieux, nécessairement. Et quand vous aurez assez labouré jusqu'à en être lassés, et que le moment sera venu de reposer -car un travail sans repos ne peut durer longuement- et que vous ne pourrez recommencer tout de suite pour faire avancer l'ouvrage, ne soyez pas lassé de vouloir recommencer.
La noblesse vient d'un coeur généreux, car la noblesse héréditaire n'est pas noblesse (...).
De la Fortune la rusée et de sa roue pleine de dangers, je ne pourrais te raconter tous les accidents: c'est le jeu de boute en courroie, que Fortune sait si bien trafiquer que personne, au départ, avant d'avoir joué, ne peut savoir clairement s'il y trouvera gain ou perte.
Je veux donc devenir ton amie, et si tu veux, et si tu veux venir à moi, sais-tu ce que mon amour t'apportera?
Et Vieillesse, sais-tu où elle demeure? Je veux te le dire sans tarder, car c'est là qu'il te faut aller si la Mort ne te fait descendre à la fleur de ton âge dans sa cave qui est fort ténébreuse et sombre. Peine et souffrance la logent, mais ils l'enchaînent et la mettent aux fers, et la battent et la torturent à tel point qu'ils lui font voir sa mort prochaine et lui donnent le désir de se repentir, tant ils lui font endurer d'épreuves. C'est alors qu'il lui vient à l'esprit, et qu'elle se rend compte trop tard, quand elle se voit faible et chenue que Jeunesse l'a vilainement trompée en gaspillant son passé en vanités, (...).
(...), car l'homme sage tient sa langue. Un sot ne saurait le faire: nul sot ne sait faire taire sa langue.