« Justice sera faite avec célérité » , promirent les autorités dont le nez s'allongea aussitôt.
Le soir tombe. D'ici, à la pointe de la crête, on dirait que le ciel a pris feu. Des filaments de nuages rosés, comme de la barbe à papa, courent entre les palmes et les caféiers.
Ce qui commence par une mort dans une ferme de la Sierra Nevada finit par une autre mort dans une autre ferme de la Sierra (p.52)
Alvaro est mort avant d’avoir quarante six ans, et c’est là qu’a vraiment commencé cette histoire, la fuite face au danger, ce déplacement si commun en Colombie et qui des années plus tard, te conduira, Maritza, à participer à un projet productif pour victimes du conflit armé, dans la finca El Diviso, où tu seras assassinée le 5 janvier 2019. (p.52)
Plus la vie est dure, plus on croit en Dieu. Il doit y avoir quelque chose de terriblement rassurant dans l’idée d’une puissance supérieure, bienveillante et cohérente, dans l’idée que tout cela a un sens et fait partie d’un plan divin, même les catastrophes, même le coup de tonnerre dans le ciel serein.
On le surnommait aussi « el Taladro », la Perceuse, non seulement parce qu’il aimait à utiliser cet outil comme instrument de torture, mais surtout en raison des viols qu’il commettait par dizaines – par centaines – sur des adolescentes et des préadolescentes, de préférence vierges et âgées de moins de quatorze ans. Il arrivait aussi que les parents eux-mêmes vendent la virginité de leur enfant, motivés par la peur et l’argent, car le Patrón, généreux avec l’argent de la drogue, payait largement les hymens. De ces viols systématiques naquirent des dizaines d’enfants. C’était peut-être précisément le but recherché.
Voilà. La mala hora est arrivée. Dans quelques instants, Marita Quiroz Leiva sera morte.
(Incipit)
Il en va des histoires de famille comme des souvenirs d'enfance. Chacun possède sa propre vérité, sa propre légende, dont il refuse de douter.
Dans le ciel très contrasté, magnifiques, des oiseaux tournent contre les nuages. Je pense d'abord à des aigles, mais ce sont des charognards.
Trop d'argent à gagner pour que la vie humaine fasse le poids.