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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Exploitation d'ouvriers clandestins dans des ateliers de confection, trafic de drogue et d'armes, proxénétisme, réseaux pédophiles, blanchiment d'argent - entre Français et Turcs essentiellement. Et les dommages collatéraux de toute cette économie souterraine aux enjeux financiers monstrueux : règlements de comptes sanglants et dérapages meurtriers...
Dominique Manotti, historienne et économiste née en 1942, évoque tous ces sujets dans son premier roman, publié en 1995. L'intrigue se situe en 1980, dans le Sentier. Quand on a entendu l'auteur parler de son expérience de militante CFDT aux côtés des grévistes turcs à cette époque, on sait que ce sujet lui tient à coeur et que ce roman est parfaitement documenté.

Chez Manotti, les flics sont pourris, de la b!te au portefeuille en passant par l'ego, et en plus, ils sont violents. Ça ne les empêche pas d'avoir de temps en temps une conscience professionnelle et un petit coeur qui palpite, mais ça peut interférer avec le boulot, quand même.
Chez Manotti, les politiques sont véreux, et les symptômes sont placés aux mêmes endroits - sexe, compte en banque, soif de pouvoir.
Dominique Manotti est bien informée ; son parcours, ses bagages culturels et son acuité sont impressionnants. Avec ce 'Sombre Sentier', elle tisse une intrigue dense qui balance, dont les ramifications complexes m'ont parfois égarée - mais peu importe, le contexte socio-politique est passionnant !

Un grand merci à Diablotin0 😊 qui a attiré mon attention à Rennes sur cette auteur que je ne connaissais pas. Le polar engagé, je crois à son pouvoir, moi, contrairement à quelques 'jeunes' écrivains entendus récemment au festival de Mauves. En tout cas, j'aime ; ça défoule !
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Roman, polar, docu fiction, Sombre sentier est un recit a part, haletant, prenant, dont on ne sort pas indemne.
Des personnages border-line, Dacquin le commissaire bi-sexuel, ses adjoins, Attali et Romero, Thomas et Santoni des ripoux « malgre eux » qui se payent sur la bete « Romero s'appuie contre elle de tout son poids, defait sa braguette d'une main, releve la jupe. Grognements de plaisir. »
« Attends, autant en profiter. Fais moi jouir entre tes seins. Et Santoni defait son pantalon debout devant la porte. »
L'histoire est credible. le Sentier a Paris dans les annees 1980, la revolte des clandestins turcs dans les ateliers de confection. Les citations de Liberation sur ces evenements, comme le mentionne l'avertissement en debut de roman, sont reelles.
L'imagination de Manotti fait le reste.
Imagination ou clairvoyance, le lecteur hesite tout au long de la lecture.
Le recit prend la forme d'un agenda qui deroule les evenements jour apres jour heure apres heure.
Trafics en tous genres, drogue, prostitution, vente de certificats de sejour, passe-droits, complaisance.
Le fil rouge qui traverse le roman repose sur l'analyse que nous livre Bourdieu dans son essai La misere du monde.
En resume : Lorsque l'Etat abandonne la gestion des dispositifs de controle social a l'initiative des agents qu'il est cense encadrer, conseiller, diriger ; reduit leurs moyens de facon drastique, ces agents confrontes a des situations qu'ils ne maitrisent plus, sont capables du meilleur comme du pire.
Les personnages du roman se debattent dans cette problematique, en tentant d'imposer une logique que sous tend leur conception personnelle du bien et du mal.
Guerre des personnages, guerre des services, guerre des polices, conflits de generations, entre Meillant l'ancien resistant entre dans la police pour faire valoir les ideaux du CNR mais, qui peu a peu s'en eloigne en considerant qu'il detient toujours la verite et Dacquin devenu commissaire a 26 ans apres avoir brillamment passe le concours lui delivrant ce titre.
Experience contre titre universitaire, tradition contre iconoclastie. Il n'y aura ni vainqueur ni vaincu.
La raison d'Etat avec un grand R et un grand E s'impose.
Une logique de cercles concentriques. Au milieu le noyau dur, noir comme l'enfer, dans lequel s'agitent les flics, et plus on s'eloigne plus la couleur palit sans jamais donner autre chose qu'un blanc sale qui satisfait politiciens, entrerpeneurs et opportunistes de tous bords.
Dacquin lui, continue de voir le noir qui pervertit l'ensemble du coprs social. Escorts de haut vol, clubs echangistes, consommation assumee de cocaine, et autres substances, contrats mirifiques arraches de facon douteuse, diplomates complices...sont a l'extreme peripherie de ce contre quoi il combat tous les jours.
Un catalogue qui ressemble a s'y meprendre a notre actualite.
« Ce matin, j'ai eu un coup de telephone du directeur du cabinet du ministre. Hier, un de vos inspecteurs a contacte deux deputes, pour leur demander un entretien...
- Oui, l'inspecteur Attali sur mes ordres.
- Bien. Mais les ordres du ministre, eux, sont clairs : on laisse tomber les deputes. Vous n'avez rien de solide contre eux...Et ca liberera des forces que vous pourrez concentrer sur la filiere turque. »

A lire absolument.
Au passage, un clin d'oeil a Simenon : page 103, « le juge d'instruction, un denomme Parent, aujourd'hui a la retraite a Meung-sur-Loire, a prononce un non-lieu... »

Lien : http://desecrits.blog.lemond..
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J'ai lu ce premier livre de Dominique Manotti totalement par hasard, peu après sa publication. J'ai tout de suite adhéré au style littéraire Manotti : des phrases courtes, rythmées, sans fioritures, et une action qui avance tout le temps. Pas de gros temps morts, une succession de scènes qui entraînent une progression inexorable. Un style mis au service d'histoires complexes, s'intéressant à toutes les classes sociales, rebondissant souvent sur l'actualité passée ou récente, et malheureusement trop près de la vérité en ce qui concerne le rôle extrême de l'argent dans notre société et le degré de corruption des élites. Depuis j'avoue avoir été fan de tous ses livres.
Ce premier opus, premier aussi de la série sur le commissaire Daquin, un flic homosexuel aux méthodes qui ne doivent pas toujours être reprises au code de procédure pénale, se situe dans le milieu des ouvriers clandestin qui peuplent le Sentier, ce quartier de Paris où des vêtements pas chers sont confectionnés pour le plus grand bénéfice des chaînes de magasins de mode. Les conditions de travail dans les ateliers semi clandestin génèrent une grève pendant que la mort rôde et que l'héroïne circule.
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Printemps 1980 : Les travailleurs de la confection du Sentier, essentiellement turcs, se sont mis en grève de la faim pour obtenir des papiers, ce qui va conduire à la première manifestation d'envergure pour obtenir des régularisations de travailleurs clandestins.

«Il raconte la clandestinité, se déguiser en touriste avec un appareil photo en bandoulière ; la peur qu'il faut surmonter quand on voit un flic dans la rue, continuer à marcher, les fouilles, les nuits dans les postes de police, les arrêtés d'expulsion. Termine. Nous ne voulons plus. Nous sommes ici, nous travaillons, nous voulons carte de séjour, carte de travail. La dignité.»

Dans le même quartier, le commissaire Daquin et ses hommes de la brigade des stupéfiants enquêtent, avec des méthodes brutales, souvent au-delà des limites de la légalité, sur un réseau turc de trafic d'héroïne. Dans un contexte international mouvementé, avec l'arrivée au pouvoir de Khomeini en Iran, l'intervention de l'URSS en Afghanistan et les soutiens locaux des Etats-Unis aux trafiquants, les routes internationales du trafic de drogue sont remaniées, et l'héroïne maintenant en provenance d'Iran, du Pakistan ou d'Afghanistan, beaucoup plus pure que celle en provenance d'Amérique Latine, cause de très nombreux décès par overdoses en Europe.

Avec la découverte du cadavre d'une adolescente thaïlandaise, et grâce à Soleiman, indicateur turc et amant de Daquin, qui va prendre la tête du mouvement des sans-papiers, l'enquête va mener la police sur des terrains glissants, croisant le marais des intérêts français au Moyen-Orient, des réseaux de prostitution et de pédophilie, des trafics, fraudes fiscales et corruption en tous genres, mettant en cause des politiques et des hommes d'affaires influents.

Publié en 1995 aux éditions du Seuil, ce premier roman de Dominique Manotti, qui fut partie prenante dans cette lutte des sans-papiers en tant que syndicaliste, fut aussi son premier coup de maître. Dans un milieu masculin, violent et extrêmement réaliste, où les frontières entre crime et police sont toujours incertaines, «Sombre sentier» s'inscrit dans une réalité politique et sociale toujours très pertinente, avec un rythme qui ne se relâche jamais.

«-Vous connaissez un peu le milieu professionnel du Sentier ?
-Absolument pas. Depuis trois ans, je suis à la Financière, et je travaille sur les délits d'initiés à la Bourse. Ma présence ici, si j'ai bien compris, est le résultat d'un compromis dans les hautes sphères. Les uns veulent absolument qu'on assainisse le Sentier, pour ne pas laisser le terrain complètement libre à ceux qui réclament la régularisation des clandestins. Les autres pensent que c'est de la foutaise, et qu'il faut laisser tourner un secteur qui marche bien, et qui ne pourrait pas le faire sans clandestins. Alors, ils se sont mis d'accord pour designer quelqu'un, mais ils ont pris un jeunot naïf, qui n'y connaît rien, et qui a donc toute chance de se noyer. Voilà. C'est moi.
-Et vous, vous pensez quoi de cette affaire ?
-Moi, je suis là pour trouver, c'est la façon dont je considère mon métier de flic, et je peux vous dire que je vais me déchirer la gueule pour sortir quelque chose de ce merdier.
-Vous parlez curieusement, pour un costard-cravate.
-Je n'ai pas toujours été costard-cravate.
-Ah bon ? Et que faisiez-vous avant la Financière ?
-J'étais loubard.»
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Un quartier parisien qui vit surtout la nuit, entre ateliers de couture clandestins, prostituées, trafiquants de drogue et policiers véreux. le monde selon Dominique Manotti, mais décrit avec un souci du détail véridique qui fait froid dans le dos, car si tout est inventé, comme nous le rappelle prudemment l'auteure en exergue, tout est aussi basé sur des rapports de police et des coupures de presse auxquelles elle a eu accès. Dominique Manotti se contente de mettre bout à bout des faits avérés, géographiquement situés, avec des personnages certes imaginaires, mais ayant très certainement leurs références dans la réalité. Dans cette sombre affaire, tout commence avec le meurtre d'une jeune, très jeune prostituée thaïlandaise, dont le corps mutilé est retrouvé au milieu d'un tas de vêtements en vrac d'un atelier de confection du Sentier. le commissaire Daquin, accompagné de ses deux inspecteurs, démarre son enquête, qui va le mener au coeur d'une énorme machine à faire du fric en toute illégalité. Cerise sur le gâteau, il va découvrir que ce beau trafic se fait avec la bénédiction de... la police ! Bien d'autres histoires se greffent sur cette trame policière, notamment les relations entre notre incorruptible commissaire et le jeune Soleiman, porte-parole de la communauté turque dans le quartier, sur le point d'obtenir la régularisation de tous les sans-papiers. On est en 1980, depuis cette belle époque la Seine a coulé sous le pont Mirabeau... Un roman noir, bien engagé comme on les aime, qui vous laisse le souffle coupé au long de ses 400 pages.
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Premier roman de Dominique Manotti, sorti en 1995, et première apparition du commissaire Daquin.
La romancière tisse une intrigue située essentiellement au coeur du Sentier parisien, sur fond de lutte de travailleurs clandestins pour que les autorités leur reconnaissent des droits.
L'action se déroule du 3 mars au 4 avril 1980, ne se relâchant à aucun moment: on suit avant tout l'action des flics, au méthode parfois musclées et non orthodoxes, qui vont tenter de mettre fin à un trafic de drogue complété d'un réseau de prostitution.
Dominique Manotti campe à merveille ses personnages et Daquin est un "héros" atypique.
Un polar qui par ailleurs restitue bien l'atmosphère des années 80 et souligne l'action politique d'une minorité déterminée à mener sa lutte jusqu'au bout.
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