Citations sur L'Île des esclaves (111)
Dans le pays d’Athènes j’étais ton esclave, tu me traitais comme un pauvre animal, et tu disais que cela était juste, parce que tu étais le plus fort : eh bien, Iphicrate, tu vas trouver ici plus fort que toi : on va te faire esclave à ton tour ; on te dira aussi que cela est juste, et nous verrons ce que tu penseras de cette justice là, tu m’en diras ton sentiment, je t’attends là.
Ne persécute point une infortunée, parce que tu peux la persécuter impunément. Voix l’extrémité où je suis réduire ; et si tu n’as point d’égard au rang que je tenais dans le monde, à ma naissance, à mon éducation, du moins que mes disgrâces, que mon esclavage que ma douleur t’attendrissent. Tu peux ici m’outrager autant que tu le voudras ; je suis sans asile et sans défense, je n’ai que mon désespoir pour tout secours, j’ai besoin de la compassion de tout le monde, de la tienne même, Arlequin ; voilà l’état où je suis, ne le trouves-tu pas assez misérable ? Tu es devenu libre et heureux, cela doit-il te rendre méchant ? Je n’ai pas la force de t’en dire davantage ; je ne t’ai jamais fait de mal, n’ajoute rien à celui que je souffre.
ARLEQUIN. - [...] Ecoute, je te défends de mourir par malice ; par maladie, passe, je te le permets.
Iphicrate._ D'ailleurs, ne fallait-il pas te corriger de tes défauts ?
Arlequin._ J'ai plus pâti des tiens que des miens ; mes plus grands défauts, c'était ta mauvaise humeur, ton autorité, et le peu de cas que tu faisais de ton pauvre esclave.
Iphicrate._ Va, tu n'es qu'un ingrat [...]
Mon cher patron,vos compliments me charment;vous avez coutume de m'en faire à coups de gourdin qui ne valent pas ceux-là.
Il faut avoir le cœur bon, de la vertu et de la raison; voilà ce qu'il nous faut, voilà ce qui est estimable, ce qui distingue, ce qui fait qu'un homme est plus qu'un autre. Entendez-vous, Messieurs les honnêtes gens du monde ?
Scène VI (Cléanthis et Arlequin)
Cléanthis. "Tenez, tenez, promenons-nous plutôt de cette manière-là, et tout en conversant vous ferez adroitement tomber l'entretien sur le penchant que mes yeux vous ont inspiré pour moi. Car encore une fois nous somme d'honnêtes gens à cette heure ; il faut songer à cela, il n'est plus question de familiarité domestique. Allons, procédons noblement, n'épargnez ni compliments, ni révérences."
IPHICRATE - Méconnais tu ton maître, et n'es tu plus mon esclave ?
ARLEQUIN, se reculant d'un air sérieux - Je l'ai été, je le confesse à ta honte; mais va, je te le pardonne: les hommes ne valent rien. Dans le pays d'Athènes j'étais ton esclave, tu me traitais comme un pauvre animal, et tu disais que cela était juste, parce que tu étais plus fort que moi; eh bien, Iphicrate, tu vas trouver ici plus fort que toi; on va te faire esclave à ton tour; on te dira aussi que cela est juste, et nous verrons ce que tu penseras de cette justice là, tu m'en diras ton sentiment, je t'attends là. Quand tu auras souffert, tu seras plus raisonnable, tu sauras mieux ce qu'il est permis de faire souffrir aux autres. Tout en irait mieux dans le monde, si ceux qui te ressemblent recevaient la même leçon que toi.
je n'ai rien à ajouter aux leçons que vous donne cette aventure ; vous avez été leurs maîtres, et vous en avez mal agi ; ils sont devenus les vôtres, et ils vous pardonnent ; faites vos réflexions la dessus.
[...] ce n'est plus votre vie que nous poursuivons, c'est la barbarie de vos cœurs que nous voulons détruire; [...]