Le soupçon est la dernière étape de la déchirure d'une relation : quand il apparaît, les pertes sont d'ores et déjà considérables.
Ce que nous sommes disparaît en même temps que notre corps, ce que nous avons été, en revanche, demeure conservé en la personne de nos proches.
Le remord, ne m’a pas quitté, il me réveille tous les matins. Et tu sais ce qu’il me murmure ? Qu’à chaque fois qu’on refuse de choisir, on s’enchaîne à quelqu’un ou à quelque chose.
Je sors sur le balcon et j'y reste à observer les rues qui se déploient à mes pieds. À Naples, l'ouie est en réalité bien plus utile que la vue:cette ville se révèle à travers ses sons. Dans les ruelles de Chiaia ,par exemple les soirs d'été, on arrive à entendre les talons des femmes qui marchent d'un pas décidé sur le pavé, de petits rires au loin où encore l'entrechoc discret de deux verres, au coin d'une venelle.La banlieue du Pausilippe, au contraire, semble muette, avec ses grandes rues désertes qui s'épanouissent
en silence sur la colline tandis que la ville ,un peu plus bas,paraît ouatée. Il faut savoir prêter une oreille attentive aux vagissements de ces quartiers chics si on veut apprendre à les connaître. Dans le centre historique, en revanche ,on doit se montrer capable de distinguer ,de concentrer son attention sur ce à quoi on s'intéresse, de séparer les sons,comme pour le mixage d'une chanson. On peut alors savourer le brouhaha des étudiants qui errent dans les ruelles antiques,les fracas de couverts qui jaillissent des trattories, les profusions de volées de cloches du dimanche matin ,le boniment des vendeurs ambulants , la voix rauque et tremblante d'un petit vieux qui s'accompagne à l'accordéon, sur les marchés d'une basilique fermée à double tour et laissée à l'abandon.
Plus on aime de gens, moins on évite les souffrances.
Durant l’existence de chacun d’entre nous, la veine créatrice atteint un pic ; puis, à un moment donné, la descente arrive, inexorable, et à la fin de nos jours, nous ne sommes même plus capables d’imaginer une scène érotique. [...] Bien entendu, l’imagination se met en marche avant, quand on est encore tout petit, mais je crois que la masturbation juvénile a des répercussions considérables sur la formation de la créativité.
Moi, j’étais très créatif.
[...] on peut dire ce qu'on veut, la colère est une sorte d'excrément pour l'organisme : un déchet inutile qu'il faut expulser. Et moi, je suis un excellent laxatif pour ma fille.
En vieillissant, on comprend que bien peu de choses méritent qu'on se fasse de la bile à cause d'elles : la trahison et le mépris de sa famille en font partie de plein droit.
A nos âges, les mensonges ont la vie courte.
Ce que nous sommes disparaît en même temps que notre corps ; ce que nous avons été, en revanche, demeure conservé en la personne de nos proches. [...] Allez savoir si, un jour ou l’autre, je réapparaîtrai moi aussi au gré d’un mouvement, d’une expression, d’une sourire de ma fille. Et allez savoir à qui appartiendront les yeux qui s’en apercevront.