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Citations sur Les onze (43)

Il était françois corentin, du nombre de ses écrivains qui commençaient à dire, et surement à penser, que l'écrivain servait à quelque chose; qu'il n'était pas ce que jusque là on avait cru; qu'il n'était pas qu'une exquise superfluité à l'usage des grands, cette frivolité sonnante, galante, épique, à sortir de la manche d'un roi et à produire devant les jeunes filles plus ou moins vêtues de saint Cyr ou dans les Parc au cerfs; pas un castrat, ni un jongleur, pas un bel objet plein d'éclat enchâssé dans la couronne d'épines; pas une maquerelle, pas un chambellan du verbe, pas un commis de jouissance; rien de tout cela mais un esprit - in fort conglomérat de sensibilité et de raison à jeter dans la pate humaine universelle pour la faire lever, un multiplicateur d'homme, une puissance de l'accroissement de l'homme comme les cornues le sont de l'or et les alambics du vin, une puissante machine à augmenter le bonheur des hommes.
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Il était beau, et insolent, on l'aimait, on le détestait, il était de ces jeunes gens aux dents longues qui n'ont rien à perdre, osent tout, épris de l'avenir au point qu'il semble montrer son propre avenir à quiconque le côtoie.
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Corentin ne rit pas. Peut-être qu’il n’écoute pas Collot, mais il le regarde. Il se dit avec une sorte de joie que le zèle compatissant pour les malheureux et la plaine des Brotteaux, la table hospitalière et la lande de Macbeth, la main tendue et le meurtre, nivôse et avril, c’est dans le même homme. C’est dans Collot, un de ces onze hommes qu’il va peindre.
Qu’il lui est donné de peindre. Il se dit encore que tout homme est propre à tout. Que onze hommes sont propres à onze fois tout. Que cela peut se peindre. Décidément non, il n’écoute pas Collot. Sa joie grandit. Sa joie sonne. Il écoute le souvenir des cloches. Il les entend quand elles s’ébranlent, quand elles croissent, quand elles sont à leur plein, quand elles décroissent. Quand elles s’arrêtent. Ses larmes de joie Collot ne les voit pas dans le noir, ou il croit que c’est du froid. Il est trois heures de la nuit. Allons, il est temps de se quitter. Collot déjà va seller l’autre cheval. Il l’amène sous le porche, il tient la bride : le cheval, les deux hommes, parmi les cloches enclouées. La lanterne, ils l’ont éteinte. Ils s’embrassent. Ils ne se reverront plus
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Les Onze ne sont pas de la peinture d’Histoire, c’est l’Histoire. Ce que Michelet a vu au bout du pavillon de Flore, c’est peut-être l’Histoire en personne, en onze personnes – dans l’effroi, car l’Histoire est une pure terreur. Et cette terreur nous attire comme un aimant. C’est que nous sommes des hommes, Monsieur ; et que les hommes du haut en bas, les lettrés et les gueux, aiment passionnément l’Histoire, c’est-à-dire les terreurs, les massacres ; ils accourent de très loin pour les contempler, terreurs et massacres, ils accourent sous le couvert de déplorer les massacres, de les réparer même, disent-ils, les bonnes créatures – et voilà pourquoi, Monsieur, nous sommes ici, avec les foules de toute la terre, devant la très énigmatique muraille de onze hommes sur quoi l’Histoire s’est juchée. Voilà pourquoi les foules de toute la terre passent en flèche et sans la voir devant La Joconde, qui n’est qu’une femme rêvant, devant La Bataille d’Ucello qui est pourtant à sa manière l’Histoire en personne et un des précédents indubitables des Onze, devant le spectre rouge du cardinal-duc peint par Champaigne, devant trente-six fois Louis le Grand sous sa perruque de monstre, et se plantent là, devant la vitre à l’épreuve des balles.
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A lui dans le même mouvement de paternité de François-Elie Corentin, le Tiepolo de la Terreur, à qui il arriva de peindre les onze.
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Tiepolo peignant a fresco, quand c'est le moment, dans le petit moment où le platre prend, sans repentir, tout droit et sans retouche, sans humeur mais des pieds à la tête à lui-même adéquat, exultant dans le petit moment irréversible, debout au fin sommet d'un échafaudage qui bouge et même peut-être couché sur le dos sur les planches mal rabotées de ce qu'on appelle un échafaudage volant, une nacelle légère suspendue à des cordes, la petite nacelle de maestro, agitée, houleuse, sûre, le nez contre le plafond, des crampes dans les bras, avec le bleu qui goutte et lui coule sur la bouche et il a sans cesse le même geste latéral de la tête pour chasser ce bleu qui tombe goutte à goutte du menton sur le col, vous pouvez voir cela?
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... aussi n'écoutais je pas ces sirènes germaniques; ni les autres, les mieux chantantes, plus hautes, les vénitiennes, la sirène Venise elle même qui vers 1750 était comme cette belle jeune fille dont nos grand mères parlaient, que toutes elles avait connue, qui était ici- bas comme l'apparition de la joie neuve et insatiable, qui avant dansé toute la nuit, qui dansait encore, et qui au matin ayant bu d'un trait un grand verre d'eau fraiche, là voila tombée morte
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Corentin ne rit pas. Peut-être qu’il n’écoute pas Collot, mais il le regarde. Il se dit avec une sorte de joie que le zèle compatissant pour les malheureux et la plain des Brotteaux, la table hospitalière et la lande de Macbeth, la main tendue et le meurtre, nivôse et avril, c’est dans le même homme. C’est dans Collot, un de ces onze hommes qu’il va peindre.
Qu’il lui est donné de peindre. Il se dit encore que tout homme est propre à tout. Que onze hommes sont propres à onze fois tout. Que cela peut se peindre. Décidément non, il n’écoute pas Collot. Sa joie grandit. Sa joie sonne. Il écoute le souvenir des cloches. Il les entend quand elles s’ébranlent, quand elles croissent, quand elles sont à leur plein, quand elles décroissent. Quand elles s’arrêtent. Ses larmes de joie Collot ne les voit pas dans le noir, ou il croit que c’est du froid. Il est trois heures de la nuit. Allons, il est temps de se quitter. Collot déjà va seller l’autre cheval. Il l’amène sous le porche, il tient la bride : le cheval, les deux hommes, parmi les cloches enclouées. La lanterne, ils l’ont éteinte. Ils s’embrassent. Ils ne se reverront plus.
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Tu sais peindre les dieux et les héros, citoyen peintre ? C’est une assemblée de héros que nous te demandons. Peins-les comme des dieux ou des monstres, ou même comme des hommes, si le cœur t’en dit. Peins Le Grand Comité de l’an II. Le comité de salut public. Fais-en ce que tu veux : des saints, des tyrans, des larrons, des princes. Mais mets-les tous ensemble, en bonne séance fraternelle, comme des frères.
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[Collot d'Herbois] qui traduisit Shakespeare et le joua en costume sur une scène exiguë avant de le jouer pour de bon sur la scène de l'univers, c'est-à-dire à Lyon en novembre dans la plaine des Brotteaux où sur ses ordres on amenait devant des fosses ouvertes des hommes attachés par dix, par cent, et à dix mètres de ces hommes il y avait les bouches de canons chargés à mitraille, neuf canons de marine montés de Toulon par le fleuve, neuf canonniers au garde-à-vous la mèche allumée dans novembre, et Collot était là non pas en fraise élisabéthaine mais avec le chapeau à la nation, l'écharpe à la nation, debout, shakespearien, mélancolique, hagard, limousin, peut-être ivre, avec son bras levé avec son sabre au bout comme une baguette de maestro pour commander le feu, et quand Collot baissait le bras le monde disparaissait au profit de l'émoi de neuf canons de marine : c'est plus fort, Monsieur, cela, plus fort et enivrant et peut-être plus littéraire même que toutes les répliques de Shakespeare [...]
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