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sur 99 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Quand la tempête climatique frappe l'apathie des adultes, le salut vient peut-être bien des enfants et des adolescents. Au-delà d'une métaphore rusée, un grand roman drôle, poignant et incisif.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2023/01/01/note-de-lecture-nous-vivions-dans-un-pays-dete-lydia-millet/

C'est l'été. Une dizaine de sympathiques familles bourgeoises américaines plus ou moins « progressistes », issues de grandes villes de la côte Est, se sont rassemblées pour cinq ou six semaines dans une immense demeure patricienne, sur le littoral, pour « souffler un peu » et goûter les plaisirs de la chère, de l'alcool, de la drogue récréative et du sexe qui le soit tout autant, peut-être. Pendant ce temps-là, leurs progénitures, privées de leurs téléphones portables et autres consoles dès le premier jour, pour pouvoir mieux « profiter du séjour », se sont organisées de manière quasiment autonome, vivant leurs « vacances » obligatoires comme elles l'entendent – ou presque. Pris dans leur ensemble, tous ces enfants ne détestent pas leurs parents, mais les méprisent et leur en veulent. Pour leur mollesse satisfaite. Pour leur côté repu et fataliste. Pour tout ce qui s'enracine dans leur inaction résignée vis-à-vis du dérèglement climatique – et de ses causes et conséquences socio-politiques – qui fait désormais de plus en plus rage. Lorsqu'une tempête centennale (au moins), dont les signes annonciateurs ont été copieusement négligés, semble se diriger fort résolument vers l'ensemble de la région de villégiature rêvée, de ce « pays d'été » tant vanté, tout est prêt à basculer dans une autre dimension, autrement plus réelle que celle qui semblait jusque là tenir le haut du pavé (numérique).

On lit ou entend encore assez souvent, ces temps-ci, surtout en dehors des cercles de lectrices et de lecteurs familiers de la science-fiction, que le réchauffement climatique ne suscite pas suffisamment d'oeuvres littéraires probantes, échappant au piège du prêche ou de l'essai déguisé. Celles et ceux qui connaissent déjà Kim Stanley Robinson (son « SOS Antarctica » de 1997, sa « Trilogie climatique » de 2004-2007, son « New York 2140 » de 2017 ou encore son « Ministère pour le Futur » de 2020, à paraître en français dans les mois qui viennent) ou Paolo Bacigalupi (sa « Trilogie des cités englouties » de 2010-2017 ou son « Water Knife » de 2015) – ou même Ian McEwan et son « Solaire » de 2010, par exemple – ne seront bien entendu pas d'accord avec cette complainte relative. Pour les autres (pour toutes et tous en fait, bien entendu !), Lydia Millet proposait en 2020 ce petit roman décisif, joliment traduit en français en 2021 par Caroline Bouet aux éditions Les Escales, et désormais disponible en poche (depuis août 2022) chez 10/18, parfaite démonstration de la possibilité d'écrire court et puissant, drôle et radieux, autour d'une thématique sinistre et urgente s'il en est.

Celles et ceux qui avaient suivi l'autrice américaine dans la mythique collection Lot 49 du Cherche-Midi, que ce soit par le magnifique « le coeur est un noyau candide » (son quatrième roman, datant de 2005) ou par sa trilogie si affûtée, multipliant notamment les angles d'attaque d'un malaise existentiel complexe saisissant certains types de mercenaires du capital (« Comment rêvent les morts » en 2008, « Lumières fantômes » en 2011 et « Magnificence » en 2012), ne seront pas surprises ou surpris de la puissance concentrée de ce onzième roman, opérant juste sur la frontière entre la littérature générale et l'anticipation, mobilisant tout le pouvoir d'une métaphore subtile, agencée et architecturée sous une forme ramifiée et néanmoins pénétrante, où la figure tutélaire de Greta Thunberg, évidemment jamais mentionnée, rôde comme en secret filigrane. Dépassant le simple et galvaudé « conflit de générations », l'autrice enregistre et reflète, en cruauté et en humour noir, mais aussi avec une réelle tendresse, la divergence fondamentale qui s'est créée entre des adultes résignés, mous, battus d'avance, distraits, et pour tout dire, décevants, et une jeunesse réputée scotchée à ses jeux vidéo et à ses réseaux sociaux mais pourtant infiniment moins zombifiée, en réalité, que ses parents soumis à l'envoûtement capitaliste (selon la belle formule de Philippe Pignarre et Isabelle Stengers).

Dans le New York Times (joliment illustré d'un dessin de Ben Giles, ci-contre, et à lire ici), Jonathan Dee rappelait avec pertinence que, dotée d'un master en politique environnementale et travaillant à Tucson pour le Centre pour la Diversité Biologique, Lydia Millet connaissait parfaitement son sujet, et pouvait ainsi d'autant plus se permettre de travailler toute la légèreté apparente des interactions socio-familiales de son roman, pour mieux développer sa parabole silencieuse (nourrie de lectures enfantines d'une Bible illustrée qui vient rythmer certaines des péripéties), plongée dans un réel que nous connaissons bien ou devrions bien connaître, auquel pourtant nous restons encore si largement aveugles et sourds – malgré les cris d'alarme de la jeunesse, précisément. Dans le Los Angeles Times (à lire ici), Carolyn Kellogg préférait à raison aussi insister sur le parcours professionnel extraordinairement varié de l'autrice, et sur sa capacité à piocher avec malice et allégresse dans son répertoire désormais extrêmement diversifié pour écrire ce somptueux roman qui, malgré son titre américain (« A Children's Bible »), n'est décidément ni religieux ni « pour les enfants ». Ron Charles, dans le Washington Post (à lire ici) saisit la puissance captivante de la figure adolescente choisie pour la narration, avec sa faculté à passer sans effort apparent d'un registre léger et drôle à celui de la détermination la plus sérieuse, comme avec sa redoutable lucidité quant aux mirages survivalistes et aux illusions technologiques. La critique, anglo-saxonne comme française, ne peut que saluer la superbe association d'une technique narrative sans faille et d'un art consommé de l'émotion à transmettre – sous condition d'humour noir et tranchant, bien sûr.

Présentant grâce à cet assemblage hétéroclite d'enfants et d'adolescents un véritable mélange détonant de naïveté, de fraîcheur, de roublardise, d'inventivité et de détermination (Extinction Rebellion , voire le « Comment saboter un pipeline ? » d'Andreas Malm, ne sont peut-être plus si loin d'ici, en effet), « Nous vivions dans un pays d'été » laisse deviner une autre forme, radicale, d'Arche de Noé. Au-delà du cynisme et de la résignation, au-delà de la lenteur et de l'usure (on songera sans doute à nouveau aux paroles si prémonitoires, là aussi, du « On était tellement de gauche » de Miossec : « À essayer de vivre comme si de rien n'était / On se fait un beau jour rattraper par la marée » et « C'est désormais bon pour les gosses / Allez les enfants, foutez le raffut »), ce roman nous éclaire d'une lueur que l'on pourrait d'abord croire blafarde, mais qui se révèle in fine étrangement solaire et mobilisatrice. Une belle réussite, et l'une des lectures indispensables de cette année 2022 qui s'achève, sans aucun doute.
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A travers les yeux d'une ado d'à peine 14 ans, Eve, une jeune femme forte de sa jeunesse et de ses convictions, Lydia nous fait vivre une apocalypse. Ce roman fait beaucoup référence à la bible. Son titre original est « Children's bible ».
Cependant, ne vous méprenez pas, il ne s'agit nullement d'une quelconque diatribe catholique.
Eve, ce personnage qui avec sa bande de copains de vacances qui une maison au bord d'un lac à l'origine paradisiaque…Son frère qui tente de sauver des animaux de la noyade, … La vérité est là et non dans un quelconque livre.
Seul l'être humain pourra sauver ce qu'il y a à sauver en prenant soin de lui, des autres et de son environnement. Aucune échappatoire médicamenteuse, alcoolisée ou livresque ne le fera pour lui.
Ce livre est plein de vérités et il n'a pas été compliqué pour moi de m'y plonger qui à me créer un scénario catastrophe pour l'avenir de l'humanité. Scénario néanmoins bien réaliste…peut-être même trop…
Je retiendrai de cette lecture que nos enfants sont à la barre de notre avenir. Il nous incombe de leur donner les armes et bagages afin de palier aux manquements des générations précédentes. Sur leurs épaules reposent de nombreux défis.
Et toi ?
Connais-tu Lydia Millet ? As-tu déjà lu un de ces livres ?
Es-tu tentée par la lecture de ce roman ? Prêt.e ?

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Des adolescents en rébellion, des parents qui ne s'étaient pas vu depuis la faculté, une grande maison perdue : les ingrédients d'un été explosif. Et lors du départ, ils ne savaient pourtant pas où cela les mènerait. Lorsqu'une catastrophe écologique pointe le bout de son nez, l'équilibre se bouscule.
Ce récit m'a totalement retourné. Il s'avère d'une forte justesse et nous remet énormément en question. La nature devient un personnage presque à part entière. Elle a été malmenée depuis des années par les différentes générations. Celles des adolescents de ce récit ne subissent que les conséquences. Ils se révèlent plus réaliste et dans l'action que leurs géniteurs qui ne prennent pas conscience des véritables problèmes. Malgré les défauts de chacun, nous nous attachons à ce petit groupe malmené par la tempête.
Magnifique ouvrage qui nous laisse un goût doux amer !
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Tout simplement brillant !

Un groupe de jeunes se retrouvent livrés à eux-même après une violente tempête. Alors que leurs parents profitent d'un été de débauche et de plaisir, les enfants, eux, devront apprendre à survivre.

Un très gros coup de coeur de la rentrée littéraire 2021 !
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La voix d'une jeunesse désabusée qui ne comprend plus ses aînés.
Un groupe d'adolescents et leurs parents passent leurs vacances d'été au bord d'un lac. Des parents dont ils ont honte qui passent leurs vacances dans la torpeur et noient leurs tristes vies dans l'alcool, la drogue et le sexe.
Un portrait sans fard dressé par Eve, une adolescente qui s'occupe de son frère pendant que leurs parents décompressent à leur façon jusqu'au drame, les figeant dans cette été sans fin.
Un roman percutant, dur et poétique à la fois.

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Une guerre / incompréhension entre deux générations dans un monde apocalyptique. le pays d'été se trouve aux Etats-Unis et le passé du titre nous laisse entendre que cette douceur de l'été est terminée.

L'histoire : Douze adolescents et leurs parents sont en vacances dans une maison d'été près d'un lac. Les parents passent leur temps à boire, se droguer et coucher ensemble. Les adolescents passent leur temps à éviter les parents et à jouer à “devine qui sont mes parents”. Un vrai pays d'été ?
Jusqu'au jour où une violente tempête les frappe. Devant l'apathie des parents, les ados décident de se sauver eux-mêmes. Ils partent donc trouver un abri, laissant les adultes derrière eux.

Retour de lecture : Un roman étonnant qui ne m'a pas séduite tout de suite. Une fois la tempête arrivée, je n'ai plus réussi à le lâcher. J'ai été séduite par l'histoire, mais surtout par les personnages, notamment Evie (le personnage principal.)

La tempête qui secoue nos personnages est une réaction au désastre écologique. Avec elle, c'est le chaos qui commence. Elle est également l'élément perturbateur du livre qui lance définitivement l'intrigue. C'est à ce moment que j'ai commencé à vraiment entrer dans l'histoire.
Après ça, nous entrons dans un livre qui parle d'un monde d'après, d'un monde de survie. Les ados quittent leurs parents et s'installent dans une ferme. Mais le monde extérieur est devenu fou, notamment les hommes. La “fin du monde” entraîne de la violence et du chacun pour soi dans un régime du plus fort.
A ce moment, le rythme et la manière de raconter de l'autrice à travers Evie devient percutant. Elle en profite donc pour nous dévoiler un monde dans lequel le climat est déréglé et les catastrophes naturelles courantes. Nous en sommes aux prémices mais sentons que ce monde est moribond.
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