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Si j'étais au terme de ma vie, quatre-vingts bonnes années passées, que souhaiterais-je laisser à l'amour de ma vie ? Ce que j'ai de plus cher : mes mots ! Tous là réunis dans un testament d'un genre nouveau. Les arrangements notariés seraient déjà signés depuis belle lurette, car la mort ne rapproche pas toujours les êtres, surtout quand il y a à la clef de jolies sommes bien rondelettes. Pouvoir partir tranquille sans craindre de te voir jeter dehors par une horde d'héritiers brandissant leur ADN. Voilà pour les gribouilles de clercs…

J'écrirais notre rencontre, nos regards attirés comme des aimants, à peine frôlée la peau et déjà fébrile, électrise. Je te dirais tout ce que tu ignores : comment j'ai apprivoisé le mensonge et la mystification, pour ne jamais plus les quitter. Je t'apprendrais comment j'ai grugé le fisc, les honorables et honorés – s'ils savaient, les incrédules ! –, pourquoi je ne me suis jamais sentie aussi vivante, aussi vraie que dans tes ateliers, invitée perpétuelle témoin privilégiée de ta folie créatrice.

Je t'éblouirais encore une dernière fois en te contant comment j'ai apprivoisé l'art de la jactance. Je te rêverais à mes côtés plongeant au centre d'une fourmilière, ignorant tout de mes plus beaux larcins ou détournant le regard et les vaines interrogations. J'avouerais ma jalousie aussi et ma vengeance entre des bras, des corps différents chaque soir, et ces compteurs remis tacitement à zéro, les plaies cautérisées dans l'instant, comme par enchantement, sans un mot, sans un cri, sans rien. Juste nous deux. de nouveau…

Je te léguerais ma plus belle demeure ; je peuplerais son lac, sa cave et ses bois d'un monde de fées, de pixies et autres gnomes anglo-saxons, bastion de mon univers fantasque. Je te dévoilerais les pas de leurs danses les plus endiablées et t'apprendrais à traverser le miroir pour venir t'asseoir à leur côté.
Là où tu iras, je serais alors toujours avec toi…

Je mettrais tout cela dans un livre-testament pour que toutes les nuits tu me prennes dans tes bras, que tous les jours je sois entre tes mains, et que chacun de mes mots t'accompagne et te berce jusqu'au jour où nous serons de nouveau. Juste nous deux…

Mais je ne suis pas Céline Minard. Alors je pose mon stylo sur le coin de cette feuille et tourne doucement les pages de So long, Luise
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« De danser, d'épuiser la peine du monde, la perte, nos coeurs brisés de douleur, nos retrouvailles flamboyantes, de danser l'annonce du règne solaire de l'année nouvelle au fond de sa coque de neige brûlante. »

Dès les premières lignes, j'ai su que le roman allait me plaire, je fus accrochée immédiatement par les quelques phrases de l'incipit. Un auteur capable de faire parler une femme (d'un certain âge) des petites fleurs, du cadre bucolique de l'endroit et finir son paragraphe par le mot merde, hop je suis dedans. L'ambiance j'entends. Surtout quand la narratrice ajoute « particulièrement si cette dernière n'est pas humaine mais un tortillon luisant égrené d'un chevreuil ou le paquet noir d'un sanglier. » Alors là j'ai pensé : il y a du potentiel, je vais me régaler avec ce personnage pas commun. Je me suis dit M... ! mince (pour éviter une redite) elle en a sous le pied si elle continue dans cette veine. Et ce fût le cas. Un livre qui parle d'amour dans des termes chantants, oniriques, fougueux et ...des livres, le top !

« - Vous faites quoi dans la vie ? - Laquelle ? »

Cette femme âgée va me transporter dans ses mondes qui la bercent -« alors que nous sommes au coeur d'une immense fourmilière, sans un champignon creusé par la bouche d'une larve royale à la morale douteuse, tu agis comme en ville. Tu demandes un cric et une manivelle (...) »-  pour crier cet amour qui la porte depuis des décennies. So long, Luise. Elle est incroyable cette narratrice, un peu folle aussi, mais surtout folle d'amour. Elle a vibré dès le premier regard, dès le premier frôlement de peau pour Luise, une australienne peintre. Elle est écrivaine. Elle lui laisse ce livre. « See you later, Luise. With love. » Love, ce mot résume mon ressenti après cette lecture. L'amour de la bonne chère autant que de la chair, jusqu'à frissonner entre cuir et chair. Elle dévore la vie sans retenue, comme un ogre, tire des boulets de feu sur l'hypocrisie des 'amis' ou des éditeurs, et aime à la folie, passionnément ou pas du tout.
Une particularité : l'auteur aime les mots et n'hésite pas à ouvrir la palette pour en créer quand le besoin nait. C'est bien fait car on la suit. Je l'ai suivie.
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Une femme écrivain, arrivant au crépuscule de sa vie, reprend un texte qu'elle écrit depuis de nombreuses années. C'est son testament, pour Luise, sa compagne peintre de toute une vie. Elle évoque leur rencontre, leurs errances, leurs vies, la jalousie, les petits arrangements avec ses contemporains, comme les belles jactances qui permettent de subvenir à leurs besoins, ou sa supercherie de langue.


La première chose que l'on remarque en lisant So long, Luise, c'est l'écriture vivante, riche et dynamique, "rejouissive", de Céline Minard. Jouant avec les proximité sonores et sémantiques, son discours nous malmène ou nous séduit, et toujours il nous surprend. Mélange de souvenirs, sentences d'expérience, ou conseils pragmatiques sur comment nourrir les nains ou réduire à l'impuissance les erdmenmendle, So long Luise est un petit bijou de truculence explosive, une réflexion sur le travail d'écriture, et sur l'amour ! Malheureusement, je me suis perdue au milieu de ces fêtes du corps et du verbe, cette apologie de la vie et de l'amour, et peinant à retrouver mon chemin au milieu des pixies et autres créatures fabuleuses qui peuplent le quotidien de cette femme fantasque, je n'ai pas su retrouver mon chemin. Dommage, mais je lirai bien un autre de ses textes !
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A première vue et pour peu qu'on ne soit pas trop vigilant, on aurait vite fait de croire qu'on lit les ultimes écrits d'un genre de Tatie Danielle qui aurait versé dans la littérature, vieille femme cynique et indigne s'il en est. Ce serait aller un peu vite en besogne et enterrer la narratrice de ce singulier So Long, Luise dans un costume qui finalement ne lui va pas aussi bien qu'on aurait pu le croire. Et puis, enterrer, enterrer, faut le dire vite car si elle nous assure vivre ses derniers moments (et on n'a pas de raison d'en douter), son écriture est, elle, bien vivante ; plus que ça même : enlevée, corsée, survitaminée !

Célébration de la nature, des mots, de l'amour et du monde fantasmagorique, Céline Minard, ou plutôt XXX comme son personnage – auteure au succès international – est anonymement désigné, nous entraîne dans un univers totalement déjanté où les femmes se réapproprient leur droit à la même sexualité débridée que les hommes, sans honte et quand bon leur semble, où la supercherie de toute une vie ne leur fait pas froid aux yeux, où elles continuent à hanter les stands de tir à 80 berges passées et où elles n'hésitent pas à flinguer les jeunots qui seraient assez naïfs pour voir en elle des proies facilement dépouillables.

Se foutant de tout ce qui se fait en matière de conventions littéraires, Céline Minard nous balance son texte comme l'on sauterait à l'élastique, sans élan, et nous invite à la suivre dans un trip intime, déjanté et amoureux qui dresse le bilan d'une existence bien remplie sous une plume truculente, au vocabulaire riche et à la verve érudite et poétique balançant constamment entre bacchanales et monologue amoureux pour un dernier échange avec Luise, le grand amour, la peintre de talent, la compagne de presque toujours.

Après m'être bêtement trouvée incapable d'entrer dans Faillir être flingué il y a quelques mois, je ne regrette pas de m'être entêtée à lire cette écrivaine, même si je me suis malheureusement parfois perdue dans ce délirant labyrinthe folklorique pourtant crée avec magnificence mais peut-être était-ce voulu, ce legs littéraire étant finalement réservé à Luise, on peut au mieux le lire par dessus son épaule tout en regrettant de ne pas être à sa place. Pas tous les jours qu'on croise un telle déclaration-testament.
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Au soir de sa vie, une femme écrivain, à la carrière couronnée de succès et de prix littéraires, fait le bilan de sa vie, s'adressant à Luise, sa compagne, sa « douce », dans un livre testament.
Céline Minard signe ici peut-être son meilleur roman à ce jour. Il y est question de littérature, d'arts, de création, et aussi d'une belle histoire d'amour qui dure depuis cinquante ans. La langue y est riche et féconde, truculente, presque rabelaisienne, ne cédant pas une once de terrain aux modes littéraires ou à l'air du temps. La sensualité est très présente dans l'écriture de Céline Minard qui ne s'embarrasse pas de superflu, d'effets de manches ou de fausse pudeur pour dire les choses du corps et le célébrer.

La suite sr le blog : http://lepandemoniumlitteraire.blogspot.com/2011/09/so-long-luise-de-celine-minard-denoel.html
Lien : http://lepandemoniumlitterai..
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"Ma douce","sweet heart", "ma très chère femme","ma belle"...
Point de Poèmes à Lou, ni d' Apollinaire, mais une longue lettre d'amour testamentaire très poétique d'une femme écrivain à Luise, peintre qui a partagé sa vie cinquante ans durant.
Désir,érotisme, passion et connivence d'une artiste à une autre, entre plume et pinceau."L'air entre nous grésille".
"Aléa jacta est!" Que de jeux de mots entre "actions jactées" et "exercices de la jactance", surtout lorsque l'on est bilingue et auteur d'une oeuvre prolifique de 18 volumes et d'un bestseller "First days" salué par les grands.
Souvenirs d'enfance,de première fois,d'amis,de relations,de voyages entre Irlande "évasion fiscale",High-lands, Suisse et jardin digne de la Sido de Colette.
Et soudain, ça et là apparaissent quelques Pictes de contes écossais, des gnomes allemands, des pixies issus de mondes parrallèles, des fées; doux délire des mots couchés sur le papier qui transforment le récit en une fête merveilleuse mi-paradis perdu du Grand Meaulnes, mi-Fantasia où les faunes dansent sur La Symphonie pastorale de Beethoven (enfin voilà mon ressenti car j'avoue avoir été un peu perdue).
Nous avions pénétré sans doute dans l'imagination fertile des terres inconnues d'un célèbre écrivain!
Céline Minard, très littéraire, est connue pour son originalité. Elle est l'auteur entre autres, de le dernier monde, Bastard Battle et Olimpia.
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Ce livre est vraiment une oeuvre d'écrivain, on y sent une impulsion qui pousse le texte avec brio et agilité. Volubile, adroit et aussi très secret, on entend sa voix et on se laisse couler dans son imaginaire bourré d'adjectifs choisis, d'images infusées, de scènes décalées et d'associations insolites de langage.
C'est un livre brillant et tout à fait à part, une fiction dans un monde parallèle, mais composée de personnalités très implantées dans la réalité et qui semblent ancrées dans leur indépendance. Tout en ayant un lien fort à l'autre, puisque les deux personnages principaux sont deux femmes amoureuses qui racontent toute une vie passée ensemble, à arnaquer parfois le beau monde, une morale d'amazones, esthètes et libres.
J'ai surtout aimé les passages réalistes, un peu moins les mondes parallèles, mais c'est un très bon livre, fait par quelqu'un qui aime prendre le temps des mots, le temps de les choisir, de s'y prélasser. Et qui est bon-vivant aussi d'ailleurs; quelqu'un qui aime les mots et qui aime vivre: plutôt pas mal, non ?!
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imagination brillante même si l'on s'y perd un peu ;
très encensé, le voyage ne fut pas toujours à la hauteur de l'attente.
original et foisonnant, tendre et érotique, flamboyant
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Au soir de sa vie, une jeune femme écrivain reprend une dernière fois la rédaction d'un texte : son testament.
Un testament fait d'amour, de poésie, et de folies. Lecteur vous allez être témoin d'un legs absolument rocambolesque. Minard va vous entraîner sur des chemins tortueux, dans des contrées imaginaires, aux langues différentes, peuplées de lutins, nains, et autres tortueux phénomènes issus de son imagination ou des contes traversés de ci de là. Laissez vous guider, laissez vous bercer par un récit qui pourra développer votre sens de l'imaginaire, mais aussi vous lassera peut être si vous redescendez sur terre. Qui ne souhaiterait être aimée aussi follement que Luise, mais qui voudrait être Luise ? J'ai adoré la moitié du récit, après je me suis un peu lassée des pixies et brownies anglo-saxons (il fallait s'en méfier). Je pense qu'à ce moment là, le livre pouvait se transformer en film de science fiction… et se serait une magie plus facile à franchir. Quel talent, quelle écriture, même si parfois elle vous perd en chemin… les méandres des langues différentes. Bravo pour l'imaginaire visite dans la fourmilière…
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Ce livre est une très belle découverte... La narratrice, 80 ans bien sonnés, écrivain célèbre qui a gardé non seulement toute sa tête mais, intacte, la capacité à s'émerveiller, à se souvenir, et à raconter, avec humour, fantaisie, poésie et verdeur, rédige un dernier livre-testament pour sa compagne des cinquante dernières années, Luise. Elle revient sur leur éblouissante rencontre et leurs aventures, entre réalité et fiction. On croise aussi bien des amis que des nains, des fées, des carpes ou des boucs. La langue de la narratrice mêle poésie, scènes érotiques, références à François Villon, contes fantastiques, mais de ce roman étonnant émane, tout le long, l'amour profond qui l'unit à Luise.

"Tout cela m'habite encore. Et je ne devrais pas dire encore car c'est une part de notre royaume de vie, une part vive, qui ne passera pas. Qui se tient – stare – dans une brèche du temps. Comme toutes les évasions réussies."

"Je te regarde du coin de l'oeil et ton profil de page découpe le monde qui m'entoure et l'enchante. Les lointains flottent comme des mirages, les collines sont plus rondes, les roches plus claires, les forêts plus coulantes. le glamour qui saisit le monde où tu passes émane d'un philtre fabriqué dans les samovars du train de ce lent plongeon prolongé qu'on appelle la vie, d'un don passé au prisme du travail et des jours."

Même si j'ai moins aimé la seconde partie, dans laquelle les nains, pixies, brownies et autres créatures féériques anglo-saxonnes du même genre, j'ai quand même savouré ce testament d'amour hors du commun par cette femme dont l'écriture est une des raisons d'être : « nous ne possédons rien si ce n'est la puissance et, peut-être, le talent de recréer, allongé sous un saule dans un fauteuil articulé, ce que nous avons soi-disant déjà vécu. »
Lien : http://dautresviesquelamienn..
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