J'ai acheté ce livre par hasard, bien qu'étant intéressé par le monde militaire et l'aéronautique. C'est bien simple, j'ai adoré et c'est pour le moment le meilleur livre que j'ai lu en 2018.
On a l'impression d'être dans la Gazelle avec ces pilotes et de tout vivre à l'unisson. le format est original et se prête parfaitement au sujet, une sorte de lettre à un camarade disparu, dont on découvre la personnalité au fur et à mesure des pages.
Je n'ai qu'une chose à dire, lisez ce livre, on ne peut qu'être ému par le récit, surtout les dernières pages
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Je vois les ombres des Américains surgir de leurs machines. Une équipe pour toi, partant derrière les lambeaux de notre Gazelle, et deux gars pour moi. Je leur parle de toi, de mon chef de bord éjecté quelque part, je ne sais où. Ils me calment, me disent de ne pas m’inquiéter, que leurs collègues prennent déjà soin de toi. Dans un immense soulagement, une sorte de repos, je les vois s’affairer autour de moi, retirer mes rangers, découper mon pantalon, m’installer dans un brancard de campagne. C’est fini, ils me récupèrent, m’emportent loin de ce sable, de cette poussière, de cette plaine aride, de ces chiens que je n’entends plus, de leurs maîtres qui n’auront pas notre peau. La lutte est finie, je peux baisser la garde, rendre les armes, cesser d’entretenir coûte que coûte l’espoir. D’autres viennent de prendre le relais pour moi.
Les chiens aboient et moi, je crève. Mon CIRAS m’écrase et m’étouffe, mon casque m’assomme. Les chiens aboient et je ne peux pas bouger. Je me traîne dans le sable et la poussière. Qu’est-ce que c’est que ce merdier ?! Je vire mon casque, c’est déjà ça. Pour le reste… impossible de m’extraire de mon pare-balles : j’ai beau me contorsionner, me débattre comme un poisson jeté sur une rive sablonneuse, rien à faire… Je dois être lamentable… Il faudrait que je me lève, que je m’assoie, que je bouge, mais mes jambes refusent de répondre, de faire le moindre mouvement. Elles m’ont abandonné. C’est trop pour elles ! Il faut dire que depuis ce matin… En tout cas, je n’ai pas mal, c’est toujours ça. Une force me pousse, m’oblige : non, ce lit de sable et de poussière ne sera pas celui de mon dernier soupir.
Entre 2001 et 2014, cinquante mille soldats français auront combattu en Afghanistan. Combien sont-ils désormais, engagés sur le terrain au Mali ? D'aucuns y ont trouvé la mort. D'autres, confrontés à un événement dramatique, ont développé un syndrome de stress post-traumatique (SPT). Au coeur du parc du Mercantour s'élève une longue bâtisse austère. le Centre de ressources des blessés de l'armée de terre y accueille ces combattants. Hommes ou femmes, le temps de quelques jours, ils vont tenter de mettre des mots sur leurs maux, de rompre la spirale descendante de l'isolement, d'imaginer l'avenir. En 2012, le photoreporter Nicolas Mingasson publiait Afghanistan. La guerre inconnue des soldats français. le récit du quotidien, un an durant, d'une unité de combat. L'âpreté des assauts, la peur qui tenaille, les copains qui meurent, le sens de leur engagement. Sans doute a-t-il mesuré alors, au fil de leurs questionnements, leur possible désarroi quand viendrait le retour.
Rare, sinon premier film à évoquer le SPT chez les soldats français, le documentaire qu'il signe à présent alterne, sans commentaire, témoignages individuels, discussions de groupe, entraînements collectifs et champêtres.
Jouissant visiblement de la confiance des vétérans, le réalisateur fait émerger des paroles crues, rendant visibles les souffrances tues, rendant palpables les tourments dans lesquels ces jeunes hommes et femmes se débattent. Ici aussi au péril de leur vie.
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