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Critiques filtrées sur 5 étoiles  

La "musique" de Modiano, comme la musique de Mozart, reconnaissable entre toutes, et, comme chez Mozart, aussi magique dans les grandes morceaux que dans les petits, tel celui-ci. Oui, un court roman, ou une longue nouvelle, mais quelle merveille!

Le narrateur raconte sa brève rencontre avec Jansen, un photographe de fiction (vous ne le retrouverez pas sur Wikipedia!), un homme vieillissant et détaché de tout, en partance pour l'Amérique du Sud, lui qui fut l'ami de Robert Capa.

Le roman nous décrit, dans une écriture impressionniste magnifique, les quelques semaines où Patrick va aider Jansen dans le classement de ses trois valises remplies de photos.
Et le récit de nous produire une extraordinaire interrogation sur les images du passé, sur ce qu'il faut en garder. Un dialogue étrange s'instaure entre un photographe qui a su capter le miracle des instants bruts, de l'impalpable, du silence, et qui veut les oublier, et un futur écrivain qui cherche à retenir, classer, ces moments photographiques précieux, et c'est, dans un jeu de miroirs, ou de surimpression, tout le projet littéraire de l'auteur qui se révèle.

Oui, dans ce livre, entre autres par le biais du dialogue entre le photographe et le narrateur, mais aussi par les quelques rencontres insolites qu'il fera, Modiano nous donne son "Art du roman" sa façon d'écrire, son besoin obsessionnel de retenir le passé, l'importance de s'effacer, de "se fondre dans le décor" comme le suggère Jansen, d'être une ombre qui passe pour à la fin disparaître. Il y a d'ailleurs un merveilleux passage où le narrateur nous décrit un moment de sieste dans le jardin du Luxembourg, où s'installe progressivement ce sentiment, qui est aussi celui de notre finitude: "J'allais disparaître dans ce jardin...C'était fini. Je n'étais plus rien...À la fermeture des grilles, il ne resterait de moi que l'imperméable que je portais, roulé en boule sur un banc."

Ce livre est, en peu de lignes, tout un condensé de l'art modianesque: les thèmes de la guerre et des rafles, la résurgence des souvenirs de l'enfance, le souvenir du frère disparu, la quête d'identité, les fantômes du passé, les demeures abandonnées, les lieux chargés d'ombre et de lumière, le silence, le rêve éveillé...

J'ai lu dans les critiques de ce livre que certains Babeliotes ont apprécié ce roman dans la version audio, lue par Édouard Baer. Ça ne m'étonne pas. Je me suis trouvé, moi-même, à lire et relire à haute voix certains passages, et à être soulevé par la beauté de la musique du texte.
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Chien de Printemps de Patrick Modiano nous rappelle qu'un écrivain c'est d'abord un regard personnel sur la vie " qu'il doit se fondre dans le décor "P113, ce roman nous ouvre les clés du regard de Modiano sur les gens et sur le monde.
La construction de ce texte nous en dit beaucoup sur l'écriture de Modiano, sur sa façon de construire une intrigue et de donner du sens à une histoire, mieux que bien des interview ou des critiques universitaires, et constituer me semble t-il la matière de ses fictions si imprégnées de choses vues," pas une seule silhouette aux fenêtres" P110 ...
C'est un regard qui se pose sur les lumières ou sur les ombres, sur les objets posés là comme sur les absences et les choses dérobées, « il ne restait plus qu'une tache de couleur pâle à la place de la photo de Robert Capa ».

Le narrateur se remémore, trente plus tard, sa rencontre avec le photographe Francis Jansen, qui a fréquenté Robert Capa, photographe bien connu, et reporter pendant la guerre.
Ce duo est disséqué dans " Chien de Printemps", dialogue incessant entre l'écrivain et le photographe " il aurait trouvé tout cela trop bavard".
Autant de photos qui semblent ne pas avoir vraiment d'intérêt, à 'image du romancier qui accumule un flot de paroles, de signes, de souvenirs.
Mais la puissance de la photo quand elle exprime l'indicible emporte le lecteur c'est aussi l'ambition de ce livre, nous faire toucher du doigt la force de l'expression de la lumière, du vide, des ombres," transparaissait un vide une absence"P111.

Il est étonnant que Modiano se soit ainsi mis en scène, s'identifiant au photographe ami de Capa, ses yeux comme des lentilles photographiques, déclenchant les prises de vues pour le romancier, qui rebobinant les pellicules encore dissimulées à la lumière du jour, les garde dans sa mémoire en attente d'être tirées et révélées au lecteur.
Combien de photos son esprit a t-il stocké pour nous les montrer, un jour, au détour d'un événement pour qu'elles prennent sens, celui que le romancier va pointer juste au bon moment.
C'est à la fin du livre que l'on parcourt la centaine de photos qui composent Neige et Soleil, et que Modiano nous en dévoile le sens :
" A mesure que je tournais les pages, je ressentais de plus en plus ce que Jansen avait voulu communiquer et qu'il m'avait mis gentiment au défi de suggérer moi aussi avec les mots: le silence." 
Silence de Francis Jansen libéré de Drancy, qui ira en vain rassurer les habitant du 140, il trouvera l' immeuble vide là où vivait la famille de son camarade et de son amie.
Ce silence est latent et nous revient en mémoire cette autre phrase "Il m'a dit qu'au bout d'un certain nombre d'années nous acceptons une vérité que nous pressentions mais que nous nous cachions à nous-même par insouciance ou lâcheté : un frère, un double est mort à notre place à une date et dans un lieu inconnus et son ombre finit par se confondre avec nous".
Ce dernier silence des destinées croisées de Jansen et de Modiano, Modiano qui a perdu son frère à 8 ans, il le pressentait avant de le savoir, Jansen est imprégné aussi par une ombre on le découvre à la fin du livre.  

En relisant ce texte lu par Édouard Baer on est saisi par la fluidité des phrases et des messages insolites parfois qui nous hantent et reviennent .Ce roman est comme une initiation à l'observation des êtres et des choses de la vie, à l'art de la la photo.
Le défi de « suggérer le silence » avec les mots devient au fil des pages une réalité obsédante.
Dénouer le fil de ses errances m'aura encore une fois apporté un plaisir unique de lecture.
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Résumé : En avril 1992, le narrateur (PM) se souvient de sa rencontre avec le photographe, Francis Jansen en juin 1964, dans un café de la Place Denfert-Rochereau. Evocations de la vie de Jansen, né à Anvers, ami et collaborateur de Robert Capa, raflé pendant l'occupation, libéré par des italiens, réfugié en Haute-Savoie. Disait souvent « Chien de printemps ». Sombre, alcoolique, Jansen quitta Paris pour le Mexique en juin 1964. Mentions de personnes et de lieux, surtout dans le 20ème, photographiés par Jansen. Souvenir de Colette Laurent, amie de la mère de PM, que Jansen avait photographiée.

Avis : Un livre court, action minimale, jeu des strates temporelles. le spleen de Jansen déteint sur le narrateur et s'empare aussi de l'esprit du lecteur. La "petite musique" de Modiano résonne en douceur et nous charme. Un bijou.
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N'est ce pas une belle rencontre que de passer par la voix d'Edouard Baer pour faire connaissance avec Patrick Modiano ?

Car j'avoue avoir eu peur jusqu'à ce jour de cet auteur, tellement reconnu et adoré. C'est donc après avoir écouter Edouard Baer présenté cet ouvrage à la grande librairie que je me suis dit qu'ainsi accompagnée je ne prenais aucun risque à franchir le pas.

Et ce fut un délice, la voix d'Edouard Baer, son ton, son rythme ont donné vie aux mots précis et riches de Patrick Modiano, et j'ai parcouru avec eux deux les rue de Paris, je me suis attaché à ce personnage de Jansen à la fois fuyant et attachant, j'ai reconstruits sa vie à partir de ces images compilées par le scribe.

C'est un voyage au pays des mots et des photos, dans un Paris nostalgique de nous offre cette écoute.

Lien : http://keskonfe.eklablog.com..
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Mes doigts brûlent les pages à lecture de ce roman. les ombres mondianesques se croisent autour d,un rolleiflex et d'une valise remplie de négatifs . une vie passée , des secrets, des souvenirs qui s'estompent,un vieux qui part ,une jeunesse qui se cherche...A quoi servent les photographies? je me suis pris à rêvasser dans ce Paris de Modiano.
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Cet un livre que l'on oublie pas, je l'ai lu il y a deux ans, et on est emporté dans une histoire jusqu'à la dernière ligne. L'histoire d'une rencontre entre un jeune photographe et un photographe de renom et d'une disparition du second. C'est aussi retrouvé l'univers d'après-guerre. Un roman envoûtant et déstabilisant.
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Modiano ravive le souvenir de Francis Jansen en consultant son cahier clairefontaine et nous plonge dans son histoire telle qu'il la connaît c'est à dire fort peu et pourtant il nous entraîne, envoûte, fascine.
De la littérature pour la littérature et puis le "style Monsieur" comme petite musique de l'écrivain
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