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EAN : 9782889011810
200 pages
Editions Antipodes (15/10/2020)
4.33/5   3 notes
Résumé :
Georges-Louis Liengme, médecin-missionnaire de la Mission Romande, passa trois ans à la cour de l'empereur Goungounyane, entre 1892 et 1895, dans le sud-est de l'Afrique. Il y évangélisa, opéra et vécut ainsi les dernières années et les dernières heures de l'empire de Gaza. Ce livre reproduit des extraits de son journal de bord et des photos de son séjour dans ce qui deviendra le sud-Mozambique. Il décrit la Cour, ses personnages, son quotidien, sa pratique de la mé... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Un grand merci à Babelio et aux éditions Antipodes de m'avoir proposé cet ouvrage.
Il s'agit d'un récit témoignage sur l'évangélisation de l'Afrique et en particulier de l'Empire de Gaza (qui deviendra plus tard le Sud Mozambique) à la fin du 19ème siècle.

Eric Morier-Genoud a recueilli le journal de bord de Georges-Louis Liengme médecin missionnaire de la Mission Romande qui passa 3 ans à la cour de l'empereur Goungounyane entre 1892 et 1895.

Période de l'occupation coloniale, de nombreuses puissances se disputent cette zone : les Portugais, les Afrikans et les Anglais.
La mission de Liengme se déroulera sur fond de lutte pour le pouvoir entre les différentes puissances.

La mission de Liengme est d'évangéliser la zone et en particulier la cour de l'empereur pour ensuite diffuser cette nouvelle croyance au peuple, puisque qu'il est de coutume que les sujets aient la même religion que le prince.
Sa formation de médecin constituera un point d'entrée majeur dans ses relations avec l'empereur Goungounyane et sa cours.

C'est un travail colossal et inédit réalisé par l'auteur pour reconstituer ces 3 années sur la base du journal de bord qui n'était pas un journal "intime" à proprement parlé puisque Liengme adressait ses écrits à sa famille, à la Mission Romande pour faire part de ses observations, son avancement ou ses difficultés. Ce travail ouvre une nouvelle compréhension des liens entre la suisse et l'Afrique.

Liengme est un médecin missionnaire très engagé et convaincu que le salut de ces peuples d'Afrique passe par la conversion au christianisme. La conversion doit être totale puisque qu'elle doit également permettre le renoncement aux traditions ancestrales concernant la vie sociale.

Alors, bien entendu, ces convictions et le travail de ces missions d'évangélisation regardés avec l'oeil d'aujourd'hui sont dérangeantes car elles nient la singularité de ces peuples, leur croyance et affirment la supériorité de l'homme blanc.

Liengme décrit dans ces textes ce qu'il découvre dans les traditions et les comportements des sujets de la cour avec souvent du mépris, parfois de la bienveillance ou de l'étonnement. Son raisonnement est emprunt du racisme colonialiste de l'époque. Souvent d'ailleurs il marque son incompréhension des demandes ou attentes des personnages qu'il côtoie.

Liengme dispensera des soins médicaux et s'essayera également à de nouvelles techniques médicales. Il raconte comment il opère sans anesthésie et la difficulté à trouver tous les ustensiles nécessaires à une bonne médecine. La sterilisation des outils n'est pas toujours possible ou alors elle est réalisée avec les moyens du bord.

Il observe et décrit aussi la médecine locale, ancestrale : il évoque des traitements à la mode indigène, des supercheries, des superstitions, et ce fait fort de pouvoir les détruire avec un traitement rationnel et scientifique.

Liengme raconte aussi sa vie et celle de sa famille, et comment il est obligé de construire lui-même sa maison et son mobilier.

Les Portugais veulent s'emparer de cet empire et les enjeux politiques des différents acteurs porteront préjudice à Liengme qui sera contraint de quitter cette zone et à l'empereur qui prendra la fuite. Liengme sera aussi accusé de trahison.

C'est un témoignage passionnant et très bien construit.
C'est un ouvrage très complet, qui m'a demandé du temps pour le lire pour ne pas passer à coté de toutes ces informations très riches sur cette période.
Le récit est très bien structuré car la transcription des notes de Georges-Louis Liengme est chronologique et chaque journée est bien identifiée.
Une annexe en fin d'ouvrage présente les différents acteurs mentionnés dans le récit et permet de se repérer.
Quelques photos illustrent le livre.
J'ai beaucoup apprécié cette lecture qui demandait toutefois un assez bon niveau de concentration.


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Je voudrais dans un premier temps remercier Babelio et les éditions Antipodes pour m'avoir permis de découvrir ce livre singulier. Je connais un peu le travail d'Eric Morier-Genoud, l'auteur de l'apparat critique particulièrement intéressant. L'essentiel de ce livre est donc la retranscription du journal et de quelques lettres de Georges-Louis Liengme. Cet homme, un Suisse dans l'empire de Gaza (actuel Mozambique), était un médecin et un missionnaire protestant. Il raconte régulièrement ses rencontres avec l'empereur (le roi) Goungounyane et sa vie non loin de la capitale. La période est riche d'évènements, parfois tragiques, dans la conquête coloniale du continent africain, les Portugais veulent dominer cette zone, alors que les Afrikans et les Anglais ne sont pas très loin.
Liengme est peut-être porté par de bonnes intentions. Chacun peut discuter du bienfondé d'une Mission de conversion. Médecin, il soigne de nombreuses personnes, tant les membres des différents peuples locaux que les Portugais ou les autres Européens de passage. C'est grâce à ces compétences médicales qu'il parvient à se faire une place dans le pays. Parfois, émissaire du grand roi, parfois confident des représentants portugais, il est un témoin privilégié de la chute de l'empire de Gaza et de la conquête portugaise. Même s'il trouve que l'action des Portugais n'est pas honorable et que le roi devrait être traité avec plus de respect, il porte avec lui des représentations racistes de son époque. Ainsi, il est extrêmement condescendant avec les différents acteurs qu'il rencontre et, parallèlement, ne comprend pas que les us et coutumes de la cour puissent différer des siennes sans qu'elles soient pour autant inférieures. Il revient ainsi souvent sur une prétendue naïveté de ses patients ou leur façon de réclamer des cadeaux.
Grâce à ce journal, j'ai découvert tout un pan de l'histoire africaine que j'ignorais. C'est un regard différent sur la colonisation autant que sur l'évangélisation, celle d'un acteur qui manque un peu de recul. L'apparat critique d'Eric Morier-Genoud est d'ailleurs particulièrement pertinent pour ce recul qu'il nous permet de prendre. Parallèlement, Liengme fait oeuvre d'ethnographe amateur en décrivant le monde dans lequel il se trouve. Si le texte n'est pas ce que nous pourrions qualifier de scientifique, il constitue tout de même un témoignage intéressant sur ce monde disparu.
Le style est parfois difficile à suivre, celui du journal d'un homme du XIXe siècle, mais dans l'ensemble j'ai appris beaucoup de choses très intéressantes et cette lecture a nourri chez moi l'envie de me plonger plus avant dans cette partie de l'histoire humaine qui l'échappe encore.
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De 1892 à 1895, dans le sud-est africain, Georges-Louis Liengme, missionnaire et médecin originaire de Suisse Romande, se présente à la cour de l'empereur Goungounyane qui n'est plus pour très longtemps à la tête de l'immense territoire de Gaza, déjà partiellement sous dépendance portugaise et futur Mozambique. Même s'il est bien accueilli par le potentat africain, Georges découvre assez vite que sa mission ne va pas se révéler de tout repos. Goungounyane est en fait un despote qui pratique la razzia, la polygamie et la mise en esclavage systématique. de plus, son goût prononcé pour les alcools forts que lui procurent les Portugais l'amène à être plus souvent ivre qu'à jeun. Quant à ses sujets, ils veulent bien se faire soigner, mais sans jamais montrer le moindre signe de gratitude. le pauvre pasteur ne mange pas tous les jour à sa faim. Il doit tout bâtir de ses mains avec l'aide des quelques convertis qui l'accompagnent. Son épouse et sa petite fille le rejoignent et bientôt un nouveau bébé vient réjouir la petite famille. Mais des nuages noirs s'amoncèlent sur la mission. Un conflit se profile. le travail d'évangélisation ne rencontre guère de réussite. Ses ouailles, qui veulent bien chanter et écouter l'harmonium, restent fondamentalement animistes et insensibles au message du Christ. Ils n'acceptent de Georges, outre les soins, que de l'argent, de l'alcool, des cotonnades ou des cadeaux…
« Convertir l'empereur » est son journal humble et touchant, enrichi de quelques lettres à son épouse et à sa famille, l'ensemble compilé par un chercheur de l'université de Belfast. Ce document brut de décoffrage (quelques parties illisibles du manuscrit n'ont pas été transcrites) nous permet de découvrir l'oeuvre d'un pionnier qui mériterait d'être aussi connu que le célèbre docteur Schweitzer tant son dévouement et son désir de faire partager sa foi ardente furent grands et admirables. Il multiplia les soins (il recevait une centaine de malades par jour) et les opérations chirurgicales, même les plus délicates, comme des interventions sur les yeux (cataractes, glaucomes, tumeurs, etc.). Il bâtit un dispensaire, une école et des maisons pour ses malades. Quand il se trouva au coeur du conflit, il refusa d'abandonner son poste, prit des risques importants pour lui et pour sa petite famille et tenta d'apaiser les tensions entre les belligérants, sans grand succès d'ailleurs. Les éditions Antipodes ont fait oeuvre utile en publiant ce « Journal » à une époque où il est de bon ton de rejeter toute forme de colonialisme et de condamner sans appel toute tentative civilisationnelle d'un peuple sur un autre et même tout esprit philanthropique y afférant. Lire ce texte permet d'abord de découvrir un personnage hors-norme, d'un courage et d'une probité exemplaire et, en prime, de peut-être réviser certaines idées un brin stéréotypées sur la colonisation et la réalité des traditions ancestrales africaines. Une édition de qualité, illustrée de photos d'époque, mais avec un texte en caractères un peu trop petits pour un véritable confort de lecture. Passionnant néanmoins pour qui s'intéresse à l'Histoire de l'Afrique.
(Ouvrage critiqué dans le cadre d'une opération "Masse Critique" de Babelio.
Lien : http://www.bernardviallet.fr
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Mes patients noirs sont parfois insupportables tant ils sont niais, désobéissants, paresseux, exigeants. Alors, la coupe déborde et je ne retrouve la tranquillité, la joie dans mon travail que lorsque j’ai retrouvé la communion avec Dieu. Quand on réfléchit aux influences ténébreuses que ces pauvres populations subissent depuis si longtemps, on ne peut s’étonner de leur misérable état.
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