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EAN : 9782748903010
Agone (15/03/2017)
4.43/5   91 notes
Résumé :
Bien qu’à peine un an se soit écoulé depuis la publication initiale de ce livre, il m’a semblé nécessaire de réécrire ma conclusion pour cette nouvelle édition car, depuis la fin de l’année 2018, les événements se sont précipités. Sans reprendre toute mon analyse du programme présidentiel d’Emmanuel Macron, je voudrais commencer par rappeler ses lignes de force. Ce qui m’avait d’emblée frappé en lisant ce texte, c’est qu’il exposait de façon très brutale un projet p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Grand historien spécialiste de l'histoire de la classe ouvrière et pionnier de l'histoire de l'immigration en France, Gérard Noiriel a publié tout au long de sa carrière une quantité impressionnante de travaux. En 2018, il s'inspire de l'oeuvre d'Howard Zinn sur les États-Unis (« Une histoire populaire de l'empire américain ») et décide de proposer à son tour une « histoire populaire » de la France, de la Guerre de Cent ans à nos jours. Un travail colossal, qui vise à mettre en lumière non pas le point de vue exclusif des dominés ou des dominants, mais plutôt de proposer une analyse de la domination et de la manière dont s'articulent et se mettent en place les relations de pouvoir qui lient les hommes entre eux. le résultat est un ouvrage de près de huit cent pages d'une densité et d'une richesse incroyables qui apporte un contre-point bienvenu à l'histoire réactionnaire qui a actuellement le vent en poupe, notamment dans les médias. Ici, il n'est pas question d'étudier l'histoire de France par le biais de tel souverain ou tel grand homme politique. Non, ce qui intéresse Gérard Noiriel, c'est le peuple où, pour être plus précis, les classes populaires. L'ouvrage se décline en une quinzaine de chapitres, chacun consacré à une période bien précise, dans lesquels l'auteur détaille les spécificités des classes populaires de l'époque : comment vivent-elles ? Quelles sont ses interactions avec le pouvoir en place ? Quelle est son degré d'implication dans la vie publique ?…

L'auteur revisite ainsi toute l'histoire de France qu'il choisit de débuter à la fin de la Guerre de Cent Ans, époque à laquelle l'État royal parvient véritablement à s'imposer. de la même manière, c'est seulement à partir de ce moment qu'on peut parler véritablement de « peuple français », en tant qu'ensemble d'individus liés entre eux par leur dépendance au même pouvoir souverain. Noiriel étudie ainsi dans un premier temps le glissement du féodalisme à une dépendance collective au pouvoir royal en nous exposant la manière dont cet état souverain s'est construit, ainsi que les conséquences que cela a eu sur les classes populaires. C'est par ce prisme que l'on revisite les Guerres de religions (où l'on découvre que les arguments religieux furent en fait bien souvent des prétextes pour justifier des intérêts sociaux), les règnes de Louis XIII et Louis XIV (où on réalise que la grandeur d'un état ne fait pas nécessairement le bonheur de son peuple), puis ceux de Louis XV et Louis XVI (qui virent l'essor du capitalisme marchand et la perfectibilité des moyens de contrôle et d'identification des « marginaux »). L'auteur consacre également un chapitre à l'empire colonial français, ce qui lui permet d'aborder la mise en place du système esclavagiste ainsi que la progressive racialisation du droit colonial qu'il analyse comme étant avant tout un moyen de briser les solidarités de classes.

Il faut attendre la fin du XVIIIe et la Révolution française pour que les classes populaires parviennent enfin à véritablement s'imposer sur la scène politique française. Et encore, que de résistances à accorder ne serait-ce qu'un minimum de pouvoir au peuple ! Très vite, la démocratie balbutiante qui se met en place vacille, car elle repose sur deux conceptions contradictoires de la citoyenneté : d'un côté la délégation de pouvoir à des représentants, de l'autre l'implication directe des citoyens défendues notamment par les sans-culottes. C'est évidemment la première conception qui prend le pas sur la seconde qui ne cesse d'être discréditée, et ce dès la fin de la Révolution. Suivront plusieurs autres régimes sur lesquels l'auteur s'attarde plus ou moins longuement (Consulat, Premier Empire, Restauration, Second Empire...), avant que la république ne soit de nouveau proclamée. Noiriel focalise ensuite son étude sur la progressive structuration de la classe ouvrière (qui compose alors la grande majorité des classes populaires) et sur la répression auxquelles elle fut alors confrontée de la part du pouvoir républicain. En filigrane, on suit les grands moments de l'histoire de France : la Commune de Paris, l'affaire Dreyfus, la Première Guerre mondiale, la crise des années 1930, la parenthèse du Front populaire, la fin de la IIIe République, le régime de Vichy…

Avec la Libération, et grâce l'instauration d'un rapport de force favorable aux classes populaires, on assiste au milieu du XXe à la mise en place d'un certain nombre de droits dont nous bénéficions toujours aujourd'hui, et ce malgré les tentatives de plus en plus nombreuses de détricotage de l'état social entrepris par le pouvoir. Pour la première fois de leur histoire, les classes populaires voient reculer l'insécurité qui était depuis toujours leur lot quotidien et bénéficient enfin d'un filet de sécurité. Après cette conquête des droits, qui a été une des caractéristiques majeures de la décennie d'après guerre, c'est l'accès à la consommation qui devient celle des années 60, puis l'entrée dans la mondialisation à partir des années 80. Aujourd'hui, le libéralisme a triomphé et les luttes sociales menées par les classes populaires sont désormais totalement marginalisées sur la scène publique (par les médias comme les partis) au profit des questions sécuritaires. Noiriel termine son analyse par une conclusion de quelques pages consacrées au programme et à la première année du quinquennat d'Emmanuel Macron. L'occasion de se rendre compte que, en dépit d'un discours de rupture, le président actuel s'inscrit au contraire dans une longue lignée d'hommes politiques ont les arguments et le vocabulaire remontent aux XXe, voire XIXe siècle.

Cette « Histoire populaire de la France » est un ouvrage de synthèse passionnant qui réunit une masse de documentation absolument colossale et nous permet de découvrir l'histoire de France, non pas à travers le parcours des « grands » de ce monde, mais à travers celui des classes populaires. le voyage est captivant et permet de mieux comprendre l'évolution de notre pays, que ce soit sur le plan politique, économique ou social. Au terme de cette lecture, on pourrait être tenté de se sentir découragé face aux défaites innombrables infligées tout au long de notre histoire à cette classe qui représente pourtant la majorité de la population. Ce serait toutefois faire abstractions des nombreuses victoire qu'elle a aussi remporté afin de se faire entendre et de faire en sorte que les intérêts d'une minorité ne priment pas sur ceux de la majorité. « Même lorsqu'il est vaincu, le peuple influe toujours sur le cours de l'histoire parce qu'il n'est jamais possible d'effacer complètement la trace de ses combats » : l'ouvrage de Gérard Noiriel l'illustre parfaitement.
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Iels entrèrent par effraction sur la scène de l'histoire, certain·es pour en sortir aussitôt les pieds devant, et, d'autres pour creuser les sillages de l'émancipation

En avant-propos, Gérard Noiriel rappelle la référence que constitue l'Histoire populaire des Etats-Unis d'Howard Zinn, « le but de ce grand historien américain était de proposer une « histoire par en bas » faisant une vraie place à ceux dont les manuels ne parlaient pas ou peu : les Amérindiens, les esclaves, les femmes, les syndicalistes ouvriers, les objecteurs de conscience hostiles à la guerre du Viêt Nam, etc. ».

L'auteur souligne, entre autres, la crise du mouvement ouvrier, l'affaiblissement des luttes sociales au « profit des conflits identitaires ». Que l'on partage ou non cette opinion – je ne suis guère adepte de la notion d'identité -, la phrase suivante n'en reste pas moins problématique.

« le projet d'écrire une histoire populaire du point de vue des vaincus a été accaparé par les porte-parole des minorités (religieuses, raciales, sexuelles) pour alimenter des histoires féministes, multiculturalistes ou postcoloniales, qui ont contribué à marginaliser l'histoire des classes populaires » Outre le fait qu'il est étrange de parler des femmes comme d'une minorité, de couper les luttes anticolonialistes des mobilisations populaires, c'est surtout faire l'impasse sur les divisions objectives des « classes populaires », traversées par des conflits de sexe, de « race », de qualification, d'origine, de génération, etc. Il s'agit bien de tensions et de contradictions, d'intérêts partiellement divergeant – de relation de pouvoir et de domination – au sein même des « classes populaires ». Et un des reproches que l'on pourrait faire aux organisations du mouvement ouvrier, c'est justement d'avoir été aveugles à ces tensions, en faisant croire que l'ouvrier était mâle, blanc et professionnel, et en laissant « dans l'ombre des formes oubliées du malheur social » pour utiliser une expression de l'auteur.

Gérard Noiriel parle aussi de « perspective relationnelle », d'enjeu de luttes dans la définition de « populaire », de résistances, d'articulation entre le passé et le présent… Il indique avoir privilégié « les questions qui sont au centre de notre actualité, comme les transformations du travail, les migrations, la protection sociale, la crise des partis politiques, le déclin du mouvement ouvrier, la montée des revendications identitaires. Ces dernières ayant poussé au paroxysme les polémiques mémorielles, j'ai abordé ces enjeux dans plusieurs chapitres du livre, en montrant ce qui différenciait l'histoire et la mémoire ». Je reviendrais en conclusion sur sa définition, que je juge très réductrice, de la « classe ouvrière » et une forme d'expulsion, de la question sociale, des luttes pour l'égalité portées par les féministes, les anticolonialistes, les antiracistes, etc.

« L'ambition ultime de cette Histoire populaire de la France est d'aider les lecteurs, non seulement à penser par eux-mêmes, mais à se rendre étrangers à eux-mêmes, car c'est le meilleur moyen de ne pas se laisser enfermer dans les logiques identitaires ».

Je ne voudrais pas faire croire que les divergences politiques sur certains sujets avec l'auteur, réduisent l'intérêt de cet immense récit. Gérard Noiriel réussit à présenter « sous une forme simple » de nombreuses questions qui restent complexes à appréhender. Son regard au présent, situé comme il l'écrit lui même, est orienté vers les couches de population, les plus nombreuses et les plus invisibilisées des constructions historiques institutionnelles. Il s'agit bien d'une histoire populaire, de choix assumés, et, d'un formidable outil pour réfléchir à notre monde et à nos futurs.

Sommaire :

Avant-propos

1. Pourquoi Jeanne d'Arc, malgré tout ?

2. Dire sa souffrance au nom de Dieu

3. Dans l'ombre de Jupiter

4. Codes noirs

5. Liberté, quand tu nous tiens…

6. L'invention de la citoyenneté

7. Chapeau bas devant la casquette

8. Les usines à la campagne !

9. La nationalisation de la société française

10. « le devoir de la race »

11. La guerre plutôt que la révolution

12. Classe contre classe

13. le peuple « indésirable »

14. le droit d'avoir des droits

15. « On a raison de se révolter »

16. La dernière nuit des prolétaires

Conclusion. de quel avenir Emmanuel Macron est-il le nom ?



Donner à comprendre sans juger est au coeur du travail de l'historien·e. Que celle-ci ou celui-ci fasse le choix d'un récit abordable par toustes, dans une langue usuelle me semble plus qu'important. L'historien·ne est aussi un·e citoyen·ne, qu'iel assume aussi un ou des points de vue engagés – donc politiques -, contre une soi-disante neutralité scientifique, permet de mieux saisir son regard sur les événements étudiés, pour autant qu'iel exprime clairement ses choix. Gérard Noiriel, me semble-t-il, assume pleinement ses orientations. Il reste donc possible et nécessaire de les discuter. Ce que j'ai fait sur certains points en introduction et que je reprendrai en fin de cette note.

Ces remarques critiques, forcément trop longues en regard de la présentation de l'ouvrage doivent bien évidement être comprises comme une incitation à s'approprier les développements de Gérard Noiriel.



Quelques éléments choisis subjectivement, accompagnés ou non de remarques critiques.

Les repères mémoriels, la différence entre commencement et origine, nos ancêtres les migrant·es, les grandes civilisations du bassin oriental de la Méditerranée, le piège de la domination coloniale fixée dans le langage, la domination de l'histoire par « ceux qui détenaient le pouvoir d'écrire et d'interpréter le monde au moyen de l'écriture », l'invention de la continuité généalogique, la longue période de la pénétration des tribus germaniques dans l'espace gallo-romain, le caractère sacré des princes, les formes spécifiques de la domination exercée par les puissants à l'époque médiévale, le sentiment d'appartenance de l'élite, le temps long de l'esclavage, les trois ordres et la légitimation du système de domination, le droit de propriété et le pouvoir de commandement et de taxation, la militarisation de l'espace, les progrès de l'agriculture, les chartes de franchises, l'autonomisation des pouvoirs urbains, la croissance démographique et ses conséquences, les guerres de conquête et les alliances matrimoniales, les croisades contre les hérétiques, le développement des échanges monétaires, les progrès de la culture écrite, la redéfinition du lien vassalique, l'hérédité des charges, la construction de l'Etat capétien, la crise de subsistance, la masse énorme de migrant·es que « la guerre, les épidémies et la faim avaient chassés des campagnes », les représentations de la pauvreté, « la pauvreté cesse d'être perçue comme une affliction individuelle », les formes embryonnaires des forces de l'ordre et la création de l'armée de métier, la naissance de l'impôt royal « qui fabriqua le peuple français en tant que communauté d'individus assujettis à l'Etat », l'agitation contre les nouvelles taxes – notamment la gabelle -, les marchands-fabricants et les innovations techniques, les révoltes en Flandre et « la piétaille avait triomphé d'une armée de chevaliers commandée par le monarque le plus puissant de l'époque ! », la première municipalité de Paris, Jeanne d'Arc et le mythe, l'accession des membres de la bourgeoisie à des fonctions publiques, l'hétérogénéité des espaces économiques, le concept de « frontières » et son inexistence en certains temps historiques, l'église catholique comme rouage de l'Etat, le rire carnavalesque, la dépendance collective sous le double effet du monopole de l'impôt et de la force publique, la crainte des classe populaires…

Dans le premier chapitre l'auteur parle de laïcisation, je pense que le terme le plus approprié est sécularisation.



Je souligne le titre choisit pour la seconde partie, « Dire sa souffrance au nom de Dieu », le soulèvement en Alsace au printemps 1525, la redécouverte de l'imprimerie, la publication des quatre-vingt-quinze thèses de Martin Luther, la querelle religieuse et son appropriation populaire pour combattre l'exploitation, les théoriciens de la dissidence, les « Turcs » et la prise de Constantinople, l'identité chrétienne hostile aux « musulmans », la répression des dissidences par l'Etat central en France, le faible développement des communications, l'identité civile et l'appareil ecclésiastique, les châteaux sans vocation militaire, l'augmentation de la population et le morcellement des propriétés, les révoltes paysannes du XVIe siècle et les féroces répressions, la politisation de la question religieuse, la Compagnie de Jésus, le parti huguenot, « le consistoire imposa en effet une discipline de fer et un rigorisme moral qui n'avait rien à envier aux pires pratiques de l'Inquisition, encourageant la délation et les humiliations de celles et ceux qui ne voulait pas marcher droit », la soumission au pouvoir royal et la fin des atrocités de la « guerre civile », l'Edit de Nantes et une situation de tolérance unique en Europe (j'ajoute, limitée cependant aux seules familles religieuses chrétiennes), l'« intellectualisation » et la « moralisation » des pratiques religieuses, « le rire carnavalesque fut étouffé dans un bain de sang »…

Le titre de cette note, est inspiré d'une phrase de l'auteur tiré de ce second chapitre.



Le temps de Louis XIV, l'« ombre de Jupiter », Richelieu et Colbert, la révolution militaire, l'augmentation des impôts, la transformation des pays d'états en pays d'élection, les révoltes contre le tour de vis fiscal, la Fronde « dernière tentative des aristocrates pour échapper à la souveraineté de l'Etat royal », le parlement anglais et l'exécution du roi, la monarchie administrative et Colbert, l'homogénéisation des règles de droit, la centralisation des informations, la conscription, la taxe sur les étrangers et la naturalisation, la politique mercantiliste et la multiplication des corporations, les ventes d'offices et de droits (c'est à mes yeux, une forme de « privatisation » des fonctions pouvant être démocratiquement et collectivement assumées), la société de cour, la notion de « civilisation », la symbolique empruntée à l'Antiquité, le remplacement des références mythologiques par « une allégorie réelle : la représentation du roi sous ses propres traits », l'idée d'une relation directe entre le monarque et « ses » sujets, la surexploitation des classes populaires, les assemblées fiscales et l'exclusion des femmes, la volonté de mettre au travail les vagabonds valides, la confusion entre mise au travail et répression, l'arsenal des galères et les galériens – des condamnés de droit commun et « des vagabonds, homosexuels, tsiganes, juifs, protestants, déserteurs » -, la guerre sans merci contre les « protestants », les camisards, l'Angleterre comme « terre pionnière pour le régime parlementaire »…

Personnellement je trouve très discutable la phrase « pour séduire le peuple, il faut le tromper par les apparences » qui ne fournit aucune explication. Il conviendrait de montrer pourquoi des apparences peuvent se muer en éléments crédibles à un moment particulier. Il serait par ailleurs utile de réfléchir aux possibles détruits par la centralisation colbertienne et aux effets à longs termes y compris au sein du mouvement ouvrier, bien fasciné par les procès d'assimilation par la « norme ».



Je ne partage pas toutes les analyses sur les « Codes noirs » développées au chapitre IV. Si l'auteur souligne la question de l'esclavage colonial, le rôle fondamental de la « découverte du nouveau monde » (voir à ce sujet, le récent livre d'Alain Bihr : 1415 – 1763. le premier âge du capitalisme. T1 : L'expansion européenne), la colonisation brutale de la Caraïbe, le travail servile sous forme d'« engagement », le « paradigme sucrier », la traite négrière atlantique et le travail de plantation, le processus de déshumanisation, l'esclavage domestique, la concentration de terres, la christianisation forcée, la place de la couleur de la peau, les manies classificatoires, les résistances collectives, etc… ses explications sur le racisme, la non-dénonciation de l'esclavage ou le « code noir » ne me satisfont pas (voir par exemple à ce sujet, Ce qu'écrivaient deux capucins en… 1681. Prologue à la 13e édition de l'ouvrage de Louis Sala-Molins : le Code Noir ou le calvaire de Canaan).
Liberté. L'affaiblissement des liens directs et interpersonnels, l'introduction du papier-monnaie, la force de travail dans l'économie domestique, un véritable service postal, les migrations temporaires, l'« identification à distance des sujets du royaume », les nouvelles relations de pouvoir, la massification du service militaire, l'individuation, (qui n'est pas la même chose que l'individualisation), la répression du vagabondage et ses effets sur les fractions inférieures des classes populaires, le service domestique, la sociabilité populaire, la vie de quartier, « le modèle social de la république urbaine protégeait les communautés en défendant une conception des libertés refusant la dissolution des liens de solidarité locale sous les coups du libéralisme », la frontière poreuse entre les vagabonds (y avait-il des femmes vagabondes ?) et les travailleurs, un nouvel « espace public », le repli de la religion comme « affaire privée », celles et ceux qui savaient lire, les différenciations des « histoires nationales » en Europe, les « philosophes des Lumières », l'apologie de la « liberté », les processus contradictoires de l'émancipation des classes populaires, les « mouches » policières, les documents d'identité, l'« indiscipline ouvrière », la « guerre des farines », la circulation des marchandises, les variations du prix des grains…



L'invention de la citoyenneté. le moment révolutionnaire, les cahiers de doléances, l'exemption des privilégiés, l'utilisation des possibilités nouvelles de « faire entendre » sa voix, la convocation de l'« Assemblée », le vote par ordre, les élus du tiers état, le « consentement à l'impôt » et la condamnation des impôts indirects, la nuit du 4 août 1789 et la fin des privilèges, la « Déclaration des droits de l'homme et du citoyen » (et j'ajoute, l'oubli des femmes, des esclaves et des enfants…), l'agitation populaire et le mouvement d'émancipation collective, un conception de la citoyenneté (j'ajoute exclusive et non universelle), la catégorie abstraite du citoyen, la conscription obligatoire et la transformation des « garçons en hommes, de même que le mariage transformait les filles en femmes », la différentiation entre citoyens « actifs » et « passifs », le temps libre et l'indépendance économique des seuls propriétaires, les élections et les postes à pouvoir (justice, fonctionnaire, municipalité, etc.), l'autonomie, la « Grande Peur », la loi le Chapelier ou les droits collectifs, le droit de résistance à l'oppression, les « nous citoyennes » pour dénoncer la domination masculine, l'égalitarisme partageux, la sacralisation du peuple souverain, les droits sociaux, l'invention de la « terreur », les rébellions « fédéralistes », les Enragés (je ne partage pas la présentation très « idéologique » de l'auteur), la loi des suspects, les esclaves et les colonies, la puis les républiques, la symbolique révolutionnaire, la « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne »…

Je souligne le passage sur les efforts de discrédit de la révolution française, entre autres, par la troisième république qui construisit « une matrice mémorielle à la fois événementielle et centrée sur la violence populaire ». Il me semble important de revenir sur cette révolution, ses contradictions, ses apports et ses limites, loin des légendes écrites. Il y a tant à dire sur les contradictions de ceux – révolutionnaires – qui prônèrent l'égalité et la liberté et… l'exclusion des femmes par exemple.

J'aurais aimé que l'auteur traite des limites « spatiales » de la citoyenneté, de la frontière construite entre « espace public » et « espace conjugal », de la démocratie qui n'entre pas ni dans le domicile ni dans la chambre à coucher…



« Chapeau bas devant la casquette » (qui minime cependant l'activité des femmes), le coup d'Etat du 18 Brumaire, les retours en arrière et la persistance d'éléments issus de la période révolutionnaire, le code civil (mais dans l'oubli de la mise en incapacité des femmes), le droit du sol (mais en coexistence au fantasmatique droit du sang), 1830 et les « Trois glorieuses », les rentiers et les propriétaires, les canuts, le prolétariat (un terme qui me semble toujours d'actualité contre les réductions sociologiques en catégories non relationnelles), les pathologies et la biologie, les clichés (terme que je préfère à stéréotypes), les journaux, les espaces de sociabilité populaire, le rôle des femmes (qui ne se limite pas, comme l'écrit l'auteur à l'économie familiale et à la gestion de l'entreprise ; mais de manière générale, les aspects contradictoires de la famille sur la vie des femmes sont gommés au profit d'une sorte de valorisation unilatérale de la « famille populaire »), les irruptions de la parole ouvrière, la question des nationalités, 1848 et le « printemps des travailleurs », le Comité central des ouvriers de la Seine, les clivages entre « démocratie directe » et « délégation de pouvoir », les hostilités envers les travailleurs étrangers…



Les usines à la campagne. Napoléon III, les paysans (et j'ajoute les paysannes dont le travail ne devrait pas être sous-estimé), un régime autoritaire, les mondes ruraux et les mondes urbains, la pluri-activité, le développement industriel, la figure naissante du prolétaire et l'oubli des travailleurs et travailleuses de la terre, les relations de pouvoir et le « modèle domestique », le malthusianisme et le contrôle de la sexualité des femmes, le procès d'individuation et son caractère genré (les hommes refusent le droit de vote des femmes au nom d'une possible dissolution de la famille comme « atome élémentaire ») le tournant « libéral » des années 1860, le secteur artisanal et le développement de la grande industrie, le système de marchandage…



La Commune, la citoyenneté en arme, le prolétariat et la mémoire ouvrière, les politiques d'intégration développées par l'Etat, l'unification nationale sous l'égide d'une partie de la bourgeoisie, la démocratisation de la culture écrite, la création des écoles primaires, l'enseignement de l'histoire comme roman national, la « fait-diversion de l'actualité », la presse de masse et les journaux militants, le développement des moyens de communication, l'exode rural, la question sociale et sa réduction en « protection nationale », les accidents de travail, les immigrations et les conditions « pour devenir français », l'assimilation comme négation de l'égalité…



Le chapitre X est intitulé « le devoir de la race ». La colonisation, de l'expédition d'Egypte à la conquête de l'Algérie, l'invention de la « race » et la responsabilité de scientifiques dont des bi
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Lecture effectuée pendant les semaines mouvementées de la révolte sociale des "gilets jaunes". La collision de cette lecture avec ce moment d'actualité est très instructif et vient apporter un éclairage très frappant sur l'évolution des révoltes sociales en France qui au travers des siècles ont systématiquement les mêmes fondements, le poids des taxes et le creusement des inégalités visibles accompagnés du mépris de classe. Ce qui est encore plus frappant c'est que l'actualité de cette fin d'année 2018 vient malheureusement confirmer ce que Gérard Noirel dit en tout début de son essai : "ne pas comprendre le passé c'est le reproduire sans cesse..."
C'est justement le propos de cet histoire populaire de France. Comprendre les inter-relations entre les dominants et les dominés au travers de l'histoire de France. Gérard Noirel montre avec beaucoup de talent comment il s'agit bien d'inter-relations, les évènements externes (climatiques, géopolitiques, ..) impactant sur les décisions des pouvoirs cherchant toujours à préserver leurs privilèges, ces décisions venant à impacter et nourrirent les révoltes sociales qui obligent le pouvoir à négocier, s'adapter, ou à disparaître pour laisser place à un nouveau pouvoir avec au fil des années cette tendance inéluctable que ces nouveaux pouvoirs à nouveau chercheront à préserver leurs statuts et leurs avantages. En oubliant encore et encore de comprendre le passé, comprendre ce qui les a amener en position de pouvoir et ainsi ne faire que recommencer fondamentalement les mêmes erreurs politiques.
Au travers de cet histoire populaire, Gérard Noirel aborde bien évidemment la question de l'identité et de la nationalité qui sera le fil conducteur et le balancier tout au long des siècles pour attribuer des avantages, protéger les plus faibles, rejeter les autres. A la lumière des tendances nationalistes et protectionnistes en ce début de XXI° siècle, l'histoire nous démontre que malheureusement l'homme a besoin pour supporter sa condition de rejeter l'autre :
"Une constante de l'histoire, que nous retrouverons hélas bien souvent dans ce livre, veut que, lorsqu'ils sont frappés par le malheur, les hommes aient besoin de trouver des boucs émissaires. Ils s'en prennent alors à des gens qui sont encore plus faibles qu'eux sans atteindre les vrais responsable." (p90)
"Quand le social et la national sont en concurrence et que les circonstances imposent de choisir, c'est toujours le national qui l'emporte" (p545)

Un grand thème également qui traverse ce livre concerne la démocratie et les pouvoirs. L'histoire nous montre au travers des révoltes et révolutions que le débat se situe toujours entre la démocratie représentative et la démocratie directe. le mouvement des gilets jaunes d'aujourd'hui et l'une de leur revendication pour le référendum d'initiative citoyenne vient justement illustrer ce conflit permanent pour une démocratie.
"La démocratie était un régime potentiellement installe parce qu'elle repose sur deux conceptions contradictoires de la citoyenneté : la délégation de pouvoir et l'action directe" (p448)
" La contradiction majeure du système démocratique entre l'égalité juridique des citoyens et leur inégalité sociale" (p449)

Gérard Noirel aborde de nombreux sujets moins souvent traiter dans ce type d'ouvrage généraliste. Il montre très bien notamment comment naissent les thèmes de l'immigration, des étrangers, de l'assimilation, depuis les premières colonies et l''esclavage puis les politiques régulières de recherche de main d'oeuvre auprès des territoires et départements d'outremer ainsi que les pays d'Europe du sud ou de l'est puis des colonies françaises en Afrique. Il aborde également le poids de la communication dans les relations dominant- dominés avec des pages très intéressantes sur l'évolution de la presse écrite au milieu du XIX° siècle et l'apparition des premiers "story-telling" et la montée du faits divers qui deviendra le "fait-diversion".
J'ai regretté néanmoins le traitement très déséquilibré des différentes périodes de l'histoire de France. Plus de la moitié du livre est consacré au XIX° et XX° siècle et l'après seconde guerre mondiale est très détaillé dans l'analyse des mouvements sociaux et politiques. C'est un défaut assez récurent à beaucoup de livre d'histoire ou les auteurs semblent manquer de recul ou de synthèse sur les périodes les plus proches.

Gerard Noirel ne cache pas ses engagements politiques, son texte donne néanmoins le sentiment qu'il reste le plus objectif possible en évitant d'analyser le passé à la lumière de ses convictions.
C'est un livre très intéressant, pédagogique et ce qui est à souligner extrêmement bien écrit.
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Parcourir l'histoire du XIIIème siècle jusqu'à aujourd'hui sans attribuer la marche de l'histoire aux Grands Hommes mais seulement en portant le projecteur sur les classes populaires, était un pari très Risqué.
Et c'est une réussite totale.
Je me suis donc retrouvé à parcourir ces 7 siècles d'histoire de la France, a travers les petites gens, les gens de peu, les « rien ». On en ressort, grandis, fortifié, plus intelligent, plus ouvert et plus noble.
Nous ne venons pas de nulle part et nos vies ont du sens. Nos relations se sont enrichies de milles détails, de milles faon de vivre et il existe un lien ténu entre le croquant du 18ème siècle et les ouvriers promouvant le théâtre de Jean Villars.
A la lecture de cette belle somme on comprend les gilets jaunes et les peurs, les frayeurs de la bourgeoisie et de la petite bourgeoisie. On peut également à travers cette lecture entrevoir des possibilités de rédemption, qui ne viendra d'aucun Grand Homme mais de nous, humains (femmes et hommes) vivant en notre temps et léguant un horizon à ceux qui viennent après nous.
Lecture INDISPENSABLE !

(Sur mon site des citations en plus et mes croquis note de lecture)
Lien : https://tsuvadra.blog/2019/0..
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40 ans de travaux de recherche historique, une écriture très fluide et imagée = chef d'oeuvre !
Facile à lire sur un sujet extrêmement bien documenté, on se sent intelligent à la fin de ce livre. Chaque chapitre pour chaque époque, est un petit livre en soi. Et on peut lire les 750 pages en plusieurs fois !
L'histoire retient essentiellement les faits et gestes de l'élite au pouvoir et les livres qui parlent du versant populaire, comme celui là, sont très rares.

On retient quelques messages fort en fil rouge de l'oeuvre globale :
Le peuple à toujours été écarté des décisions de gouvernance, sous divers prétextes (pas d'éducation, manque de leader...)
Les soulèvements qui ont abouti, même sur de très courtes durées, bénéficient de l'appui d'une élite intellectuelle, mais les divergences d'intérêt font généralement tourner court la tentative.
Ce sont les outils de communication (de l'imprimerie aux réseaux sociaux) qui permettent l'effet de masse.
La répression des Élites gouvernantes a toujours été violente, voire sanglante.
Aujourd'hui le peuple ne possède nulle part le pouvoir, et ce depuis très longtemps.
Enfin l'élite s'est toujours arrangée pour faire passer l'immigration comme normale quand elle en a besoin pour disposer d'une main d'oeuvre exploitable, et surfer sur la peur populaire de l'immigré en période de crise.
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critiques presse (2)
Liberation
18 octobre 2018
Influencé par Karl Marx, Norbert Elias et Pierre Bourdieu, l’historien analyse dans «Une histoire populaire de la France» les formes d’assujettissement des classes laborieuses et les relations de pouvoir.
Lire la critique sur le site : Liberation
NonFiction
20 septembre 2018
G. Noiriel abandonne le seul point de vue des dominés, qui risque d’ailleurs de « laisser dans l’ombre des formes oubliées du malheur social », pour privilégier « l’analyse de la domination, entendue comme l’ensemble des relations de pouvoir qui lient les hommes entre eux. » Autrement dit, dans le cadre français, il propose une histoire des rapports de pouvoir, de tout ordre, et notamment des interactions et de la dialectique à l’œuvre entre gouvernants et gouvernés.
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Bien que toutes les classes de la société française aient été impliquées dans ces révoltes, elles ne parvinrent jamais à s'allier durablement, car les groupes sociaux étaient séparés par des clivages trop profonds. Le pouvoir royal joua habilement sur ces antagonismes entre les nobles, le clergé, la bourgeoisie et les classes populaires. Toutefois, la raison majeure qui explique l'échec de ces rébellions réside dans la peur que la colère du peuple provoqua dans les rangs des privilégiés. À chaque fois, les élites en lutte contre le pouvoir d'État encouragèrent "ceux d'en bas" à se révolter car ils avaient besoin de cette violence de masse pour triompher des forces royales. Mais dès que cette violence se déchaîna, ils furent contraints, pour sauver leurs propres privilèges, de se soumettre à la loi du monarque en implorant sa protection, contribuant bien souvent à massacrer eux-mêmes ce peuple qu'ils avaient mobilisé.
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***** NOS ANCÊTRES FURENT DES MIGRANTS *****

Les adeptes du roman national ont cultivé la légende que nos " ancêtres " étaient des gaulois .....Il est vraisemblable que les premiers êtres humains qui apparurent sur terre il y a deux ou trois millions d'années virent le jour en AFRIQUE . Autrement dit , nos ancêtres furent tous des migrants .......En raison de sa position géographique , située au carrefour de l'Europe , entre l'aire atlantique et l'aire méditerranéenne , le futur hexagone fut parmi les premières régions d'occident à entrer en contact avec les grandes civilisations du bassin oriental de la méditerranée . Des migrants parlant des langues celtiques s'y fixèrent au milieu du premier millénaire avant notre ère ..... Les celtes ne connaissaient pas l'écriture , ce que nous savons d'eux provient de ceux qui les colonisèrent ( Romains et autres ) . Les provinces ou régions françaises proviennent des romains : Les vénètes habitaient près de Vannes , les cadurques vers Cahors , les tarbelès Tarbes etc ....La religion chrétienne qui peu à peu s'installa sur ces territoires imposa la langue latine .....Dès le troisième siècle , de nouvelles migrations infléchirent le cours de l'histoire . Les franques , burgondes , germains , wisigoths se mélangèrent aux populations existantes . Ces gens là n'étaient nullement gaulois .
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A chaque fois, les élites en lutte contre le pouvoir d'état encouragèrent "ceux d'en bas" à se révolter car ils avaient besoin de cette violence de masse pour triompher des forces royales. Mais dès que cette violence se déchaina, ils furent contraints, pour sauver leurs propres privilèges, de se soumettre à la loi du monarque en implorant sa protection, contribuant bien souvent à massacrer eux-même ce peuple qu'ils avaient mobilisé.
Le rôle historique que jouèrent les classes populaires dans la consolidation de l'état français résulta finalement de la crainte qu'elles inspirèrent à ceux qui auraient pu détruire la monarchie. Jules Michelet n'eut donc pas tort de présenter Jeanne d'Arc comme l'incarnation du peuple devenu soudain acteur de l'histoire de France. Cette paysanne fit en effet irruption dans la cour des grands au point de changer le cours de l’histoire, mais dès qu'elle devint gênante elle fut impitoyablement éliminée.
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Les femmes, qui avaient été elles aussi réduites au rang de « citoyens passifs », se firent également entendre en privilégiant l'action directe. À l'époque, la plupart d'entre elles n'avaient pas encore de place autonome. Elles existaient dans le cadre familial, vouées à l'entretien du ménage. Elles passaient leur journée à coudre, servir, instruire, soigner. C'est pourquoi, pendant la Révolution, elles furent surtout présentes dans les mouvements dénonçant les « accapareurs » et exigeant du pain pour le peuple. En octobre 1789, plusieurs milliers d'entre elles participèrent à la marche de Versailles pour ramener le roi à Paris. Elles manifestèrent au nom d'un « nous citoyennes » qui était déjà une manière de dénoncer la domination masculine. Le 27 février 1792, trois cents « citoyennes de Paris » déposèrent une adresse à l'Assemblée nationale pour exiger le droit de porter les armes dans les bataillons féminins. Le 6 mai 1792, à la tête d'une députation citoyenne, Pauline Léon lut à l'Assemblée législative une pétition signée par 319 femmes qui demandaient le droit d'organiser une garde nationale féminine. En mai 1793, elles créèrent une Société des citoyennes républicaines révolution-naires. Les femmes jouèrent aussi un rôle actif dans les sociétés populaires. À Paris, une tribune fut installée dans la quasi-totalité des quarante-huit sections de la ville pour leur permettre de suivre les assemblées générales. Elles y intervenaient fré¬quemment pour présenter leurs doléances. Cette intégration au sein du mouvement social favorisa grandement la fusion des points de vue. Ces femmes partageaient les valeurs et la culture des sans-culottes qu'elles avaient contribuées à forger; leur égalitarisme partageux, leur attachement à la notion de souveraineté populaire, leur volonté de contrôle des élus et des fonctionnaires publics.
Toutefois, les femmes ne pouvaient pas adhérer complète-ment au discours des sans-culottes quand ceux-ci exaltaient la virilité comme l'une des composantes centrales de la citoyenneté.
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[...] le discours dominant sur le racisme populaire avait déjà été cautionné par Alain Girard en 1971 dans un article publié par "Population", la revue de l'INED, sur "les attitudes des Français à l'égard de l'immigration étrangère". C'est à ce moment-là que les sondages d'opinion, présentés comme des outils scientifiques, furent utilisés pour justifier la notion de "seuil de tolérance". Dans cette enquête, il était demandé aux personnes interrogées de dire à partir de quel seuil elles estimaient qu'il y avait "trop d'étrangers" dans une ville de cinq mille habitants, un ensemble de cent logements, une classe de trente élèves.
L'INED publia d'autres sondages sur l'immigration construits à partir des mêmes préjugés. Si votre fille devait épouser un étranger, quel serait la nationalité idéale selon vous ? Voici le genre de questions qui furent posées pour mesurer la "tolérance" des Français. Résultat des courses : les Suisses furent placés tout en haut et les Africains tout en bas. Dépenser de l'argent public pour des enquêtes visant à savoir si un père de famille préfèrerait que sa fille se marie avec un riche ou avec un pauvre aurait sans doute été jugé scandaleux. Mais traduite en termes identitaires, la question paraissait légitime.
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Vidéo de Gérard Noiriel
Face au passage en force de la réforme des retraites, la colère sociale ne faiblit pas. Sommes-nous confrontés à une crise socio-politique inédite dans l'histoire de la Ve République ?
Guillaume Erner reçoit Gérard Noiriel, historien spécialiste de l'immigration et de l'histoire de la classe ouvrière, et directeur d'études à l'EHESS.
#actualite #reformedesretraites #politique
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