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sur 731 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
" Faites moi oublier
Tout ce que j'ai été
Inventez mon passé
Donnez sens à la nuit"


Iris a reçu un appel de l'asile de Cauldstone et vient voir Esme, la petite soeur de sa grand-mère Kitty. Par curiosité... Pourquoi n'a-t-elle jamais entendu parler d'Esme?
-Ne regardez pas les infirmières, je vous en supplie. Elles vont croire que je vous fais peur et m'enfermer de nouveau.
Je suis ici depuis 61 ans, 5 mois et 4 jours, psalmodie Esme d'une voix claire et saccadée "...


"Inventez le soleil
Et L'Aurore apaisée
Non, je n'ai pas sommeil
Êtes-vous mon amie?"


Kitty a pris une décision grave. Parce que l'asile va fermer ses portes et que le nouveau foyer est pire, la jeune femme va garder Esme, le temps de trouver une autre solution...
- Non, elle n'est pas folle. Un peu déboussolée, à cause de son enfermement, raconte Iris.


-J'avais 16 ans, quand on m'a enfermée ici. Iris ressemble à ma mère... Mais, je lui fais peur!
Elle ne comprend pas que Kitty, (sa grand-mère) ne voulait plus d'une soeur comme moi. Moins conformiste et qui refusait le mariage. Elle était jalouse que son beau Jamie me préfère...
Ma mère et mon père ont préféré se débarrasser de moi...


A l'époque, un homme pouvait faire interner une épouse ou une enfant...indocile!
- Papa, hurle Esme, s'il te plaît ! Ne me laisse pas ici, s'il te plait! Je serais sage, je te le promets.


J'étais une jeune fille de 16 ans, libre et je voulais faire des études, aller à l'Université. Pas me marier et ma propre mère avait honte de moi...
J'étais une adolescente, je suis...


"Il faut que je m'étende
Et que je dorme un peu
Il faudrait que je tente
De nettoyer mes yeux"
J.Louis Aubert, Isolement.
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On fait la connaissance d'Esme à l'intérieur d'un hôpital psychiatrique. Elle est assise dans la salle commune et essaie d'échapper à ce qui se passe autour d'elle en se concentrant sur un souvenir d'autrefois : deux jeunes filles à un bal, l'une est habillée d'une robe rouge qui ne lui va pas et a perdu ses gants : « c'est là que tout commence ».
D'autres images reviennent par bribes. Il suffit qu'elle se concentre sur sa respiration.
Puis une jeune femme, Iris, entre en scène. Elle tient une boutique de vêtements et vient de recevoir une lettre d'un établissement psychiatrique qui doit fermer ses portes. La lettre concerne une certaine Euphémia Lennox dont Iris n'a jamais entendu parler.
Iris décide de se rendre à l'établissement en question et apprend qu'Euphémia, qui préfère qu'on l'appelle Esme a été internée pour « troubles dépressifs » et qu'elle est ici depuis soixante ans et qu'elle est la soeur de sa grand-mère paternelle. Or personne : sa grand-mère, sa mère, son père ne lui a jamais parlé d'elle.
Le temps presse l'infirmier veut qu'Iris place sa grand-tante dans une maison de retraite avant la fermeture de l'établissement. Elle va passer un moment avec Esme et la trouve plutôt lucide, ce qui la laisse perplexe. le jour où Iris va chercher Esme pour la conduire à la maison de retraite, elle ne peut se résoudre à l'y laisser car elle est encore plus sordide. Iris ramène Esme dans son appartement qui était jadis la maison de sa grand-mère Kitty et que celle-ci a fait aménager en appartement.
Elle a le week-end pour tenter de trouver une solution, de discuter avec son demi-frère Alex. En entrant dans la maison, Edme reconnaît certaines choses, certaines pièces puisqu'elle y a vécu.
Les souvenirs vont remonter peu à peu, des liens se créer entre Iris et Esme, tandis qu'un troisième personnage entre en scène : la soeur d'Esme, Kitty qui est dans une maison de retraite pour patients souffrant d'Alzheimer.
Lorsqu'Esme est enfant, la famille vit en Inde, dans la bonne société colonialiste. Esme et Kitty, sa grande soeur jouent ensemble et semblent bien s'entendre. Puis un premier drame arrive, alors qu'elle est âgée de quatre ans environ, son petit frère tombe malade et un soir alors que tout le monde est sorti, Esme se lève, inquiète car il a de la fièvre.
Ses parents la trouveront à leur retour, prostrée, elle tient le bébé mort dans ses bras et le serre si fort qu'on a du mal à le lui arracher. La mère s'effondre, son fils est mort. Il sera désormais interdit de parler de cet enfant, or Esme est petite, elle a besoin de parler de son petit frère et on commence à la punir car elle enfreint la loi édictée par sa mère, et ne peut que se réfugier dans la rêverie.


Ce que j'en pense :

Ce roman est une véritable splendeur. L'histoire est magnifique car c'est celle d'Esme qui est le personnage central, enfermée pendant soixante ans dans un asile psychiatrique pour que sa famille ne la voie plus à tel point qu'elle finit par oublier son existence.
Esme est différente depuis l'enfance et cela dérange tout le monde. Elle est plus sensible que les autres, donc elle a besoin de s'exprimer et elle dérange la famille bourgeoise type de l'époque.
A la mort de son petit frère, en interdisant d'en parler, on nie sa souffrance pour protéger sa mère, tuant son innocence, sa spontanéité. Puis la famille décide de rentrer en Ecosse car c'est devenu trop difficile de vivre en Inde après ce drame. Bien sûr, le climat n'est plus le même, l'Ecosse c'est la pluie, les vêtements chauds, les manteaux et c'est aussi l'entrée en scène de la grand-mère maternelle d'Esme, le parfait tableau de la mégère. Elle n'a qu'un seul but : que ses petites-filles trouvent un mari de préférence riche. On les habille en petites filles modèles qu'on exhibe, ce qui plaît beaucoup à Kitty bien sûr, mais qu'Esme juge ennuyeux et stupide.
Elle préfère les livres et voudrait continuer ses études mais cela déclenche un tollé : il est inadmissible qu'une fille travaille, elle doit tenir une maison, broder, recevoir…
L'histoire nous et amenée tout doucement, l'auteure liant les souvenirs qui reviennent à Esme avec les lieux qu'elle découvre : quand elle entre dans l'appartement d'Iris et reconnaît son ancienne maison, puis au bord de la plage où elle demande à Iris de l'emmener, il y a si longtemps qu'elle n'a pas vu la mer. Là aussi vont remonter des instants de la vie d'avant, des moments avec sa soeur qui cherche un mari à tout prix.
Au retour de la plage, aussi, alors qu'elle partage un moment en écoutant de la musique, Esme se souvient qu'elle jouait très bien du piano et comme elle a l'impression de déranger Iris, elle se concentre à nouveau pour faire remonter des moments d'autrefois.
Maggie O'Farrell entretient suspens et rebondissements en dévoilant peu à peu les souffrances endurées par Esme : le viol et ses conséquences (il faut lire le livre !!). En fait, à l'époque, on enfermait à l'asile les personnes qui ne respectaient pas les règles de la bienséance, il fallait peu de choses, alors quand une jeune femme sensible subit des traumatismes violents au lieu de l'écouter on l'enferme. L'auteure nous décrit de façon très percutante le monde de la psychiatrie de l'époque.
Maggie O'Farrell a bien étudié la personnalité de chacun de ses personnages , leur lâcheté, leurs bassesses, leurs méchancetés, comment une famille arrive à détruire une enfant au nom des valeurs de la bonne société, lui interdisant d'extérioriser sa peine, lui prenant tout ce qu'elle a, jusqu'à la dépouiller de sa propre identité, et pour finir l'oubliant durant plus de soixante ans dans un asile.
Et en racontant les deux époques en parallèle, elle permet de les comparer, et met en lumière le côté libéré des contraintes et des tabous de la génération actuelle par les personnages d'Iris et Alex, qui sont décomplexés et bien plus ouverts. On voit toute l'évolution de la société sur près d'un siècle.
Maggie O'FARRELL ne sombre jamais dans le pathos, elle reste toujours dans la sobriété et c'est ce qui fait de livre, inspiré de faits réels, un vrai bijou.
Une auteure qui a vraiment émergé il y a une dizaine d'années et qu'il faut continuer à suivre de près.
Note : 9,25/10

Lien : http://eveyeshe.canalblog.co..
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Si vous pensiez avoir fait le tour des romans traitant de secrets de famille, je vous encourage à revoir votre jugement.

Le mystère qui entoure Esme Lennox, vieille femme qui a passé plus de soixante ans dans un asile d'aliénés, n'est pas un petit mystère à deux balles ; dense, compact, glaçant, il semble déterminé à garder tous ses secrets.

Indes anglaises, dans l'entre-deux-guerres.
Deux jeunes soeurs, Kathleen et Euphemia grandissent heureuses.

Édimbourg, à la même période.
A l'adolescence, les caractères des fillettes rapatriées dans cette bonne vieille Europe se développent, mettant en lumière des tempéraments différents. Si la première se fond volontiers dans le moule mondain de la petite fille modèle et se prépare placidement à la "chasse au mari", la seconde, fantasque et volontaire, s'ennuie à périr aux bals et aux thés et contraste par son attitude avec les attentes d'une société guindée.

Édimbourg, de nos jours.
Iris, jeune femme sans attaches sentimentales et indépendante, gère une friperie. Masquant ses failles sous une apparence décomplexée et décontractée, elle se trouve du jour au lendemain confrontée à des responsabilités qui la dépassent en la personne de sa grand-tante, Esme Lennox, dont elle n'a jamais soupçonné l'existence.

Je n'en dis pas plus, j'ai volontairement lancé un hameçon, à chacun de voir s'il veut mordre. En ce qui me concerne, je n'ai aucun regret de m'être jetée à l'eau. Une fois la construction un peu éparpillée du roman apprivoisée, j'ai pleinement apprécié ce voyage au coeur des secrets d'une famille pas si bien-comme-il-faut que cela. Une fois commencée, difficile de lâcher cette fiction, récit d'une vie volée, et peuplée de personnages très attachants.


Challenge Petit Bac 2016 - 2017
Challenge MULTI-DÉFIS 2017
Challenge ABC 2016 - 2017
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Un commentaire délicat de Cascasimir (mille mercis) et de ce fait l'envie de découvrir cette étrange disparition d'Esme Lennox !
Attention livre exceptionnel. Je n'ai pas pu le lâcher. C'est le genre de livre qui vous donne envie de ruer dans les brancards, de mordre, d'en vouloir à la Terre entière.... mais c'est aussi un texte magnifiquement écrit où l'importance psychologique des personnages est bien là.
.
Comment vous inviter à aller, vous aussi vers ce livre ?
Un petit résumé.
Ecosse aujourd'hui (même si le livre commence en Inde il y a près de 70 ans), Iris découvre l'existence d'une grand-tante, Esme Lennox, enfermée depuis 61 ans dans un asile psychiatrique.... 61 ans....
Par petites touches et retours en arrière, nous allons découvrir la vie d'Esme. A travers elle, le sort des femmes trop libres, trop jolies, trop indépendantes, en un mot pas assez dans le moule. Et puis comme toute femme, elle est coupable, de tout, et de rien, mais coupable c'est sûr.... d'être une séductrice, d'attirer la gente masculine etc etc.... simplement d'être une femme.
Manifestement sur certains côtés catholiques irlandais et protestants écossais se rejoignent !
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Un livre tristement passionnant. Un livre qui remue. Un livre servi par une prose originale.
C'est le premier livre que je lis de cette auteure, je pense que ça ne sera pas le dernier.....
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« Nous ne sommes que des vaisseaux par lesquels circulent nos identités… on nous transmet des traits, des gestes, des habitudes, et nous les transmettons à notre tour. Rien ne nous appartient en propre. Nous venons au monde en tant qu'anagrammes de nos ancêtres. »

Après l'immense coup de coeur pour « Hamnet » que je vous conseille très vivement, j'ai eu envie de lire un autre roman de Maggie O'Farrell. Mon choix s'est porté sur « L'étrange disparition d'Esme Lennox », suite au superbe billet de Cascasimir que je remercie infiniment.

L'auteure nous emmène très loin dans les recoins les plus sombres de l'âme humaine, là où la jalousie, les désirs et les mensonges ont triomphé de la bienveillance, de la charité humaine et de l'amour.

« Je n'aurais pas pu devoir mon bonheur à un tort, à une injustice causés à autrui... Quelle sorte de vie pourrions nous construire sur de telles fondations ? »
Édith Wharton

*
Iris Lockhart reçoit un coup de téléphone : sa grand-tante Esme, dont elle ignorait l'existence, sort de l'hôpital psychiatrique Cauldstone dans lequel elle a été internée pendant près de soixante ans.
Ce qui est pour le moins surprenant, c'est que la grand-mère d'Iris, Kitty, a toujours affirmé être fille unique. Mais les papiers d'Esme ne laissent aucun doute sur son identité.
Pour Iris, c'est la consternation, l'incompréhension.

Pourquoi sa grand-mère a-t-elle menti ? Quel terrible secret renferme ce mensonge ? Pourquoi Esme a-t-elle été enfermée ? Qu'est-ce qui justifiait qu'Esme n'existe plus pour sa famille ? Esme est-elle folle et dangereuse ?

*
Maggie O'Farrell révèle progressivement et subtilement les ressorts du drame qui s'est joué autrefois.
Pour cela, l'histoire nous est racontée des points de vue d'Iris, de sa grand-mère Kitty atteinte de la maladie d'Alzheimer, et de sa grand-tante Esme. Cette triple narration est un peu déroutante au départ et demande un petit temps d'adaptation, les transitions entre les trois récits si habiles qu'il est parfois difficile de se repérer dans le temps et l'espace et de savoir quelle narratrice a pris la parole.

On navigue ainsi entre deux chronologies, dans les années 30 lorsqu'Esme et Kitty sont enfants puis jeunes adultes, et aujourd'hui.

L'intrigue est brillante, magnifiquement racontée, chacune des trois femmes ayant sa propre narration.
L'histoire d'Esme émerge à travers ses souvenirs d'enfance et la mémoire défaillante de Kitty, sa soeur aînée. Ses souvenirs confus, troublants et parfois incohérents, sont, de part sa maladie, plus complexes à comprendre, mais ils deviennent intelligibles et composent au final un récit clair, abouti et terrifiant.

Je n'ai pas du tout vu venir la fin. le dénouement est bouleversant, assez déroutant et pourtant si bien amené. Il fallait tout le talent de Maggie O'Farrell pour transmettre autant de profondeur et d'émotions fortes à cette histoire.
*
L'écriture de l'auteure est magnifique de simplicité. Et en même temps, elle sait capturer les émotions et créer une atmosphère douce-amère.
Les personnages sont extrêmement bien travaillés. Leur psychologie prend forme au fur et à mesure que nous avançons dans le récit des deux soeurs. L'auteure sème des indices qui dévoilent doucement l'indicible vérité.

*
Maggie O'Farrell embrasse de nombreux thèmes, les secrets de famille, les trahisons, la jalousie, la folie, mais elle s'attache surtout à décrire les moeurs anglaises au début du XXème siècle pour mieux mettre en évidence le statut des femmes à l'époque Victorienne, leur sort et les conditions de leur internement dans des hôpitaux psychiatriques.

« Esme se doute de ce qui risque d'arriver et décide de fermer la bouche, la gorge, de croiser les mains, une attitude qu'elle a affectionnée. Sa spécialité. Se rendre absente au monde, se faire disparaitre. Mesdames et Messieurs, regardez bien. Surtout, il importe d'être immobile. le simple fait de respirer peut leur rappeler votre présence, donc, des respirations très courtes, très superficielles. Juste de quoi rester en vie. Pas plus. »

*
Deuxième roman de cette auteur, et à nouveau une magnifique lecture. Si vous ne connaissez pas encore Maggie O'Farrell, je vous engage à lire ses romans.
« L'étrange disparition d'Esme Lennox » est une histoire émouvante qui laisse, une fois le livre refermé, un sentiment de tristesse, de vie gâchée.
Un roman poignant, une fin bouleversante, une héroïne inoubliable.

« le seul problème, quand on ment, c'est de se rappeler ce qu'on a dit à telle ou telle personne. Et je n'ai jamais eu aucune difficulté parce que j'ai raconté la même chose à tout le monde. »
*
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L'hôpital psychiatrique Cauldstone est sur le point de fermer. La direction téléphone à Iris Lockhart : sur les papiers qu'a signés sa grand-mère, Kathleen Lennox, Iris est désignée comme personne responsable d'Euphemia Lennox, sa grand-tante paternelle, que non seulement elle ne connaît pas, mais dont elle ignorait jusqu'à l'existence ! La mère d'Iris, Sadie, vit en Australie et ne sait rien de cette histoire. Son père est mort jeune et sa grand-mère, que tout le monde appelle Kitty, est atteinte de la maladie d'Alzheimer : la communication avec elle se révèle compliquée et manque singulièrement de clarté… Iris vit chichement des revenus que lui procure son magasin de vêtements d'occasion. Sa vie sentimentale ne la satisfait pas, et elle entretient des relations compliquées avec Alex, « son frère d'adoption ». Elle décide de rencontrer Euphemia. Elle apprend alors que celle-ci préfère qu'on l'appelle Esme et qu'elle est enfermée depuis plus de soixante ans… Et le doute s'installe : Esme est-elle vraiment folle ? pourquoi personne dans la famille n'a jamais parlé d'elle ? quels sont les motifs de son enfermement ?
***
La complexité de la construction se dévoile au fil de la lecture. On visitera principalement deux époques, les années trente et une époque plus contemporaine (les années 80 ?, 90 ?), et deux endroits, les Indes britanniques et Édimbourg. La narration à la troisième personne sera régulièrement interrompue par les souvenirs de Kitty à la première personne, Kitty qui s'immerge dans des rappels d'événements décousus, pas toujours cohérents, mais surtout incomplets… Quand Maggie O'Farrell nous donne accès au point de vue d'Esme, on constate que ses souvenirs aussi sont parcellaires, et que cette dernière ne comprend pas toujours ce qui lui est arrivé. Au lecteur de remettre les pièces à leur place et de compléter ce qui manque…
***
J'ai dévoré ce roman. L'Étrange disparition d'Esme Lennox m'a immergée dans la vie de cette famille, sur cinq générations. Contrairement à ses parents si soucieux de la bienséance, Esme suscite forcément l'empathie : son personnage de petite fille, puis d'adolescente originale, fantasque, incomprise ne peut que toucher, je crois. Son mépris des usages et son désir de liberté lui causent sans cesse des ennuis. Personne ne semble attacher de l'importance aux traumatismes qu'elle subit, pas même sa soeur Kitty, formatée pour accomplir sans broncher ce que l'on attend d'elle. La grand-mère d'Esme, chez qui toute la famille se retrouve à Édimbourg après le retour en Europe, joue les dragons et représente à elle seule une époque déjà révolue, mais tout le monde se plie à ses exigences, sauf la rebelle, bien sûr. Grâce à ce personnage, on mesure la vitesse de l'évolution des moeurs. Si entre cette femme antipathique et ses petites-filles, rien ne semble avoir bougé, entre Kitty et Iris, un gouffre s'est ouvert. D'emblée, Iris, qui tente de prendre sa vie en main, se sent plus proche d'Esme. J'ai beaucoup aimé avoir accès aux points de vue de ces trois personnages féminins qui donnent certaines clés de leur personnalité : les certitudes de Kitty et l'immensité de sa déception, de sa frustration, le désarroi d'Esme, son courage et l'amour qu'elle porte à Kitty, les hésitations d'Iris, sa volonté et son immense générosité. Lisez ce beau roman ! Pour ma part, Hamnet m'attend à la bibliothèque…
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Comment une femme peut-elle avoir été oubliée de tous pendant 61 ans ?
Quand on contacte Iris pour lui demander ce qu'elle compte faire de grand-tante Euphémia, elle ne comprend rien.
Grand-tante ? Elle n'en a pas. Sa grand-mère était fille unique.
A travers ce roman choral, on remonte dans l'enfance d'Esme, aux fêlures et aux fractures de sa famille qui conduiront à une mise à l'écart radicale.
On rencontre aussi Iris à une croisée de sa vie qui va aller à la rencontre de cette femme dont elle ignore tout.
Enfin on entre aussi dans la démence de Kitty, atteinte d'Alzheimer qui nous donnera les clés pour reconstruire cette terrible histoire qui m'a bouleversée.
Magistral !
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Quelques images furtives, en Inde, en Ecosse, un éphéméride aléatoire structurent insensiblement cette histoire, dévoilant un passé lourd de secret et de rupture. Qui est Esme? Qu' a t-elle vécu pour mériter cet isolement à vie? Quel lien unit ces personnages?

C'est ce que nous propose de découvrir Maggie O'Farrel dans ce court roman prompt à susciter une veille tardive. Les événements originels prennent place alors que la famille Lennox, affectée par le deuil, quitte les Indes pour retrouver la grisaille au coeur de l'Ecosse post victorienne. La rigidité éducative rend inconcevable la moindre excentricité, à une époque où il était facile de faire interner quiconque, et a fortiori une femme vierge, vieille fille ou veuve, terrain de prédilection de l'hystérie. Impossible ensuite de prouver sa bonne santé mentale.

Le lecteur est convié à la reconstitution de cette histoire familiale au fil des découvertes d'Iris la petite fille et petite nièce qui tente de rassembler les pièces du puzzle entre les souvenirs nets mais très anciens d'Esme et toujours suspects de loufoquerie, et les souvenirs parcellaires de Kitty, la soeur d'Esme touchée par la démence sénile.
Iris et Esme verront leur destin profondément modifié par ces retrouvailles tardives, et les révélations qu'elles

Jalousie, trahison, vengeance font le lit de cette histoire transgénérationnelle sur fond de carcan social dont l'affranchissement n'est pas la seule clé pour vivre heureux, comme en témoignent les relations complexes d'Iris et d'Alex

La construction est très intéressante, car le lecteur est maintenu en haleine par chaque révélation partielle, et de manière suffisamment habile pour que l'on ne perde pas le fil de l'histoire.

L'écriture est habile, soutenue par une bonne traduction (j'entends par là que l'on n'y pense plus en tant que livre traduit), un fort agréable moment de lecture, incitant volontiers à explorer un peu plus les productions littéraires de cette auteure
Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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un grand , un très grand roman! Imaginez une jeune femme Iris Lockhart. Elle vit à Édimbourg et tient une boutique de vêtements. Un jour elle reçoit un coup de téléphone de l'hôpital de Cauldstone, on lui apprend qu'elle a une grand tante Euphemia Lennox dont elle n'a jamais entendu parler et qu'en plus c'est sa grand-mère Kathleen atteinte de la maladie d'Azeimer qui a signé le document qui lui confie le soin de s'occuper d'Euphémia !!!!
Comment ne sait elle pas que Kathleen avait une soeur , comment Esme et non pas Euphémia a t'elle pu être gardée loin du monde pendant plus de soixante ans?pourquoi?
Maggie O'Farrell avec un talent inouï nous parle des ces 2 soeurs nées en Inde revenues à Édimbourg avec leurs parents , confinées dans la maison de leur grand-mère maternelle,du carcan de l'éducation bourgeoise des années 1930, le rôle et la place accordée à la femme : être belle, jolie et ne rien faire qui put déplaire ou choquer .Comment des parents ,des époux pouvaient pour un oui pour non faire "interner " leurs enfants ou leurs épouses et les laisser mourir à petit feu dans des asiles , la psychiatrie de l'époque relevait presque de la chasse aux sorcières, il était plus que facile de traiter ces femmes d'hystériques!
Mêlant subtilement, les pensées d'Esme, les découvertes d'Iris et les propos pas si décousus que cela de Kathleen nous découvrirons avec les yeux d'Iris le secret de cette famille si bien pensante.
Si ce n'est déjà fait n'hésitez pas et plongez dans ce roman attention vous risquez de passer une nuit blanche!
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Maggie O'Farell a tellement bien ficelé son récit que tout a une importance et est étroitement lié, le moindre détail éclaire l'histoire d'un jour nouveau. Au fur et à mesure que l'on avance dans la lecture, les pièces du puzzle s'emboîtent, donc vous parler de ce livre c'est prendre le risque d'en dire trop et ce serait vraiment dommage. Je resterai donc très vague quand à l'histoire qui aborde de nombreux thèmes : condition féminine, poids des conventions sociales et de la bienséance, critique de la société bourgeoise de l'époque (les années 30) et découverte des hôpitaux psychiatriques. Ça fait beaucoup pour un seul livre ? C'est vrai mais Maggie O'Farell s'en sort avec brio, on retient son souffle au cours de ce voyage en immersion, d'abord au coeur de ce qui fut les Indes Anglaises puis en Écosse. le changement de température et de climat est à l'image du changement d'ambiance. D'un univers chaud et doux qui a vu naître les enfants Lennox, on passe à un univers froid et austère illustré par la rigueur et la rudesse de l'Ecosse. le livre est très bien documenté et regorge de détails sur la société de l'époque, sur le quotidien des familles bourgeoises et les règles qui régissent leurs vies.
Ce livre, ce sont de sombres secrets de famille, des décisions basées sur des non dits, des vies sacrifiés, des remords, et une histoire qu'on n'arrive pas à lâcher tant on veut savoir la fin. Maggie O'Farell nous mène par le bout du nez de main de maître et de révélation en révélation amène son lecteur exactement où elle le souhaite. Passé la stupéfaction et le sentiment d'immense gâchis, il demeure la désagréable impression que cette histoire si on l'épure un peu a dû être celle de nombreuses femme et ça fait froid dans le dos.
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