Citations sur La Bénédiction inattendue (9)
Les mots étaient tous mes amis. Ils donnaient une forme à tout ce qui était incertain, agaçant ou timide. Une forme de mot, rehaussée de bleu nuit.
Jamais je n'aurais cru que mon frère était à ce point l'épingle nécessaire à fixer mon existence.
Je ne sais pas pourquoi, lorsque j’écris un roman, j’ai l’impression de me trouver dans un atelier d’horlogerie.
Un atelier d’horlogerie ?
Je regarde autour de moi en me posant la question. Mais il y a bien là un atelier en briques sagement blotti au fond d’une sombre forêt.
Lorsque mon regard s’abaissa, je me rendis compte qu’il y avait une tache jaune sur le cou du vieillard. Elle s’étendait de la base du lobe de son oreille gauche presque jusque sous le menton. Elle était jaune comme une mangue et toute lisse, comme si cet endroit seul avait oublié de vieillir.
En regardant bien, je vis qu’elle avait la forme d’un papillon. Aux ailes symétriques, traçant une courbe subtile, et il y avait même deux antennes. Comme si un véritable papillon s’était posé sur son cou, y trouvant juste assez d’ombre pour s’abriter.
J'avais été enchantée par ces mystères inattendus qui descendaient en tourbillonnant sur l'écran. J'éprouvai même un certain respect. Comme le mécanisme du destin gouvernant le monde était miséricordieux ! Il ne se désintéressait d'aucun malheur. Et même, plus le malheur était grand, plus il daignait préparer un hasard étincelant.
[...] - Il y a quelqu'un qui nous épie.
- Ce n'est pas grave, disait-il, comme s'il le savait depuis longtemps. C'est le hamster. C'est lui qui nous observe. Il a fallu lui enlever les paupières à cause d'une maladie des yeux, et il ne peut plus les fermer.
Et ses doigts arrivèrent à mes yeux. Ils se promenèrent à loisir sur mes paupières.
-J’aime lire dans toutes sortes d’endroits ?Sur un banc au jardin public, à table, à l’église, dans une cabine téléphonique ,dans la salle de bain, sur l’étagère à chaussures, dans un placard , derrière les rideaux…C’est pour cette raison que je porte un vêtement qui a beaucoup de poches , que je remplis de livres , afin de pouvoir en sortir un à n’importe quel moment. A cause de cela,mon corps est lourd et j’ai un peu de mal à trouver mon équilibre.
Qu'il s'agisse d'une longue histoire de mille ou deux mille feuillets que je passerais des heures, pendant plusieurs années, à écrire petit à petit, ou d'une miniature de quelques pages qui pourrait tenir dans le creux de la main, le roman m'évoque une forêt. Les arbres y sont si serrés qu'aucune lumière n'y accède, la forêt si profonde que, en dehors de mes pas foulant la terre humide, on n'y entend pas le moindre gazouillis. Je m'aventure craintivement vers le fond de la forêt en grelottant, en écartant les feuilles piquantes, les branches pourries et le lianes entrelacées.
La situation financière de ma tante semblait de plus en plus précaire. Le rythme de sortie des choses de la maison se précipita. Lampe à vitraux, sculpture en bronze, service à thé chinois, manteau de fourrure, cabinet anglais, koto, bijou et boîte à bijoux, lit de la chambre d'amis...
Chaque fois que j'allais la voir, il y avait toujours une nouvelle cavité. Ces espaces vides ne cessaient de s'étendre avec une énergie telle qu'ils envahissaient toute la maison.