L'enfant Enzo est trop gentil, il essaie de se conformer à sa mère, un peu excentrique, vêtue de panthère moulante, faisant le ménage de façon répétitive, pratiquement hypnotique, chez de grands bourgeois qui partent en voyage pour leurs affaires, et rentrent brusquement, sans prévenir.
La relation entre la mère, qui apprend pas-à-pas par amour ce que c'est que d'élever un enfant depuis 12 ans sans toujours y arriver (ses actes et ses convictions ne sont pas toujours associées : elle lui achète du Nutella et lui interdit de le manger) et Enzo, qui la regarde, qui essaie de ne jamais la contrarier, nous enchante par tous les sentiments « en vérité » qui sont exposés.
« Elle aussi devait avoir un chagrin en sommeil, une peine en cage qui lui donnait parfois l'air méchant, et, tout de suite après, un peu effrayé d'elle-même, et alors elle demandait pardon. »
Enzo est un souffre-douleur au lycée du quartier chic : il est différent, il est trop gros, et il ne se rebelle jamais, il souffre, c'est tout, « victime idéale, sensible et stupide au point de se faire envoyer chez le directeur » quand les autres enfants lui crachent dans le dos.
Avec une écriture émotionnelle qui fait monter les pleurs,
Véronique Olmi réussit à nous faire attendre le pire, puisque le harcèlement existe dans le monde des adolescents, « cette petite société pleine de bruit et de rancoeur, d'envie et de désoeuvrement ».
Ils ne savent pas bien pourquoi ils s'acharnent, c'est comme ça, ils ne peuvent pas voir Enzo en peinture, et, en même temps, il leur appartient.
Et puis le pire arrive, et ce qui est particulièrement touchant jusqu'au pathétique, ce sont les phrases de l'auteur :
« Ce moment de torture, ils le partagent bien plus qu'ils ne le croient, chacun d'eux en souffrira, et pour toujours… Ils auront des reflux gastriques, des migraines et des phobies, ils auront des tics et des angoisses soudaines, ils aimeront des femmes dont ils se détourneront sans comprendre pourquoi et ils fuiront la beauté de leurs fils, ils craindront la sensualité et la délicatesse, ce seront des ricaneurs, des sournois, des pervers narcissiques, des patrons colériques, des amis inconstants et des mendiants. »
Bouleversant, angoissant, attendrissant, épouvantable, ce qui reste du roman en vérité, c'est l'amour en équilibre mais profond entre une mère et son fils.
Très beau roman, par l'écriture soignée, les sentiments fondants bien que retenus entre les deux personnages principaux, et l'analyse des conséquences des actes haineux d'adolescents trop sûrs de la force de leur pouvoir.