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Citations sur Sonietchka (65)

Quant à Sonietchka, après avoir appris tant bien que mal ses leçons, elle éludait chaque jour et à chaque instant la nécessité de vivre ces pathétiques et glapissantes années trente en menant paître son âme dans les vastes pâturages de la grande littérature russe (...) (p. 12)
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La main toute-puissante du destin qui avait jadis désigné Sonia à Robert intervint alors dans la vie de Tania. L'objet de sa passion amoureuse était la femme de ménage de l'école, qui suivait également les cours du soir, Jasia, une jeune Polonaise de dix-huit ans au visage lisse comme un œuf fraîchement pondu. Leur amitié se noua lentement à un pupitre de l'avant-dernier rang.
La vigoureuse et robuste Tania contemplait avec adoration cette fragile Jasia, transparente comme un flacon de pharmacie tout propre, et languissait de timidité. Jasia était taciturne, elle répondait par monosyllabes aux rares questions de Tania et arborait une réserve hautaine. Elle était la fille de communistes polonais ayant fui l'invasion fasciste, chacun, par la force des choses, dans une direction différente : son père vers l'ouest, et sa mère, avec son bébé, vers l'est, en Russie. Cette dernière n'avait pas réussi à se fondre dans la masse des millions d'habitants de ce gigantesque pays et avait été charitablement déportée au Kazakhstan, où elle était morte après avoir vivoté tristement pendant dix ans, sans avoir perdu ses idéaux sublimes et absurdes.
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Vladimir A., un musicien célèbre (...) décrira dans des souvenirs édités à la fin des années quatre-vingt et révélant un exceptionnel talent d'écrivain, ces soirées musicales dans la chambre de Tania, et ce piano droit au son merveilleux qu'il fallait réaccorder tous les jours. Il se souviendra avec tendresse de ce vieil instrument qui révéla au musicien débutant qu'il était alors le mystère de la personnalité des objets. Il en parle comme on pourrait parler d'un vieil oncle disparu depuis longtemps, qui aurait régalé l'auteur, dans son enfance, d'inoubliables gâteaux fourrés d'une unique cerise. (p. 56)
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Vidée de tout, légère, les oreilles bourdonnant d'un tintement limpide, elle entra chez elle, s'approcha de la bibliothèque, y prit un livre au hasard et s'allongea en l'ouvrant au milieu.
C'était La Demoiselle paysanne de Pouchkine.
Lisa allait justement déjeuner, plâtrée de blanc jusqu'aux oreilles et plus lourdement fardée que Miss Jackson. Alexei Berestov jouait au rêveur distrait, et du fond de ces pages monta vers Sonia le bonheur tranquille de la perfection du verbe et de la noblesse incarnée.
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Et chaque matin était peint aux couleurs de ce bonheur de femme immérité et si violent qu'elle n'arrivait pas à s'y accoutumer. Au fond de son âme, elle s'attendait secrètement à tout instant à perdre ce bonheur, comme une aubaine qui lui serait échue par erreur, à la suite d'une négligence.
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À force de faire des allées et venues dans des autobus et des trains déglingués, elle vieillissait vite et enlaidissait. Le tendre duvet de sa lèvre supérieure était devenu un taillis dru et sans sexe, ses paupières s'affaissaient, ce qui lui donnait une expression de chien battu, et ni le repos du dimanche ni deux semaines de vacances ne parvenaient plus à effacer les cernes de fatigue sous ses yeux.
Mais l'amertume de vieillir n'empoisonnait nullement la vie de Sonietchka, comme c'est le cas pour les femmes fières de leur beauté. L'immuable différence d'âge avec son mari ancrait en elle l'impression de jouir d'une jeunesse inaltérable […]
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Sonia avait beaucoup de lait , il coulait facilement, et la tétée, accompagnée de pincements, de tiraillements et de la morsure légère de ces gencives sans dents lui procurait une volupté que percevait mystérieusement son mari, qui s'éveillait infailliblement à cette heure matinale.
Il enlaçait le large dos de Sonia, le serrant jalousement contre lui, et elle défaillait sous le double poids de ce bonheur insoutenable.
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[…] voilà qu’il se trouvait devant une femme éclairée de l’intérieur par une réelle lumière, il pressentait en elle une épouse qui abriterait entre ses mains fragiles sa vie exténuée, recroquevillée contre terre, il voyait aussi qu’elle serait un doux fardeau pour ses épaules qui n’avaient jamais supporté de famille, pour sa virilité frileuse qui avait fui les charges de la paternité et les contraintes du mariage.
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Pendant vingt années, de sept à vingt-sept ans, Sonietchka avait lu presque sans discontinuer. Elle tombait en lecture comme on tombe en syncope, ne reprenant ses esprits qu'à la dernière page du livre.
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Ayant goûté à Paris au pain de la liberté , il ne pouvait envisager une seconde de pratiquer sa profession au service d’un État ennuyeux et sinistre, quand bien même il eut été capable de se résigner à sa férocité obtuse et à ses mensonges éhontés.
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