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Citations sur Les choses : Une histoire des années soixante (148)

Dans les milieux de la publicité, généralement situés, d'une façon quasi mythologique, à gauche, mais plus aisément définissables par le technocratisme, le culte de l'efficience, de la modernité, de la complexité, le goût de la spéculation prospective, la tendance plutôt démagogique à la sociologie, et l'opinion, encore assez répandue, que les neuf dixième des gens étaient des cons tout juste capables de chanter en choeur les louanges de n'importe quoi ou de n'impote qui, dans les milieux de la publicité, donc il était de bon ton de mépriser toute politique à la petite semaine, et de n'embrasser l'Histoire que par siècles.
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Ils étaient fiers d'avoir payé quelque chose moins cher, de l'avoir eu pour rien, , pour presque rien. Ils étaient plus fiers encore (mais l'on paie toujours un peu trop cher le plaisir de payer trop cher) d'avoir payé très cher, le plus cher, d'un seul coup, sans discuter, presque avec ivresse, ce qui était, ce qui pouvait être que le plus beau, le seul beau, le parfait.
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Dans le monde qui était le leur, il était presque de règle de désirer plus qu'on ne pouvait acquérir. Ce n'était pas eux qui l'avaient décrété; c'était une loi de la civilisation, une donnée de fait dont la publicité en général, les magazines, l'art des étalages, les spectacles de la rue, et même, sous un certain aspect, l'ensemble des productions communément appelée culturelles, étaient les expressions les plus conformes.
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L’Express était sans doute l’hebdomadaire dont ils faisaient le plus grand cas. […] Il leur arrivait que le plus souvent de n’être pas d’accord avec sa ligne politique (un jour de saine colère, ils avaient écrit un court pamphlet sur « le style du Lieutenant ») et ils préféraient de loin les analyses du Monde, auquel ils étaient unanimement fidèles, ou même les prises de positions de Libération, qu’ils avaient tendance à trouver sympathique. Mais l’Express, et lui seul, correspondait à leur art de vivre ; ils retrouvaient en lui, chaque semaine, même s’ils pouvaient à bon droit les juger travesties et dénaturées, les préoccupations les plus courantes de leur vie de tous les jours.
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Ils tenteront de vivre comme avant. Ils renoueront avec les agences d'antan. Mais les charmes seront rompus. A nouveau, ils étoufferont. ils croiront crever de petitesse, d'exiguïté.
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L’œil, d'abord, glisserait sur la moquette grise d'un long corridor, haut et étroit.
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Ils auraient aimé être riches. Ils croyaient qu'ils auraient su l'être. Ils auraient su s'habiller, regarder, sourire comme des gens riches. Ils auraient eu le tact, la discrétion nécessaires. Ils auraient oublié leur richesse, auraient su ne pas l'étaler. Ils ne s'en seraient pas glorifié. Ils l'auraient respirée. Leurs plaisirs auraient été intenses. Ils auraient aimé vivre. Leur vie aurait été un art de vivre.
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Ils auraient voulu, parfois, que tout dure, que rien ne bouge. Ils n’auraient qu’à se laisser aller. Leur vie les bercerait. Elle s’étendrait au fil des mois, tout au long des années, sans changer, presque, sans jamais les contraindre. Elle ne serait que la suite harmonieuse des journées et des nuits, une modulation presque imperceptible, la reprise incessante des mêmes thèmes, un bonheur continu, une saveur perpétuée que nul bouleversement, nul événement tragique, nulle péripétie ne remettraient en question. D’autres fois, ils n’en pouvaient plus. Ils voulaient se battre, et vaincre. Ils voulaient lutter, conquérir leur bonheur. Mais comment lutter ? Contre qui ? Contre quoi ? Ils vivaient dans un monde étrange et chatoyant, l’univers miroitant de la civilisation mercantile, les prisons de l’abondance, les pièges fascinants du bonheur.
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Le lendemain, ils ne se voyaient pas. Les couples restaient enfermés chez eux, à la diète, écœurés, abusant de cafés noirs et de cachets effervescents. Ils ne sortaient qu’à la nuit tombée, allaient manger dans un snackbar cher un steak nature. Ils prenaient des décisions draconiennes : ils ne fumeraient plus, ne boiraient plus, ne gaspilleraient plus leur argent. Ils se sentaient vides et bêtes et dans le souvenir qu’ils gardaient de leur mémorable beuverie, s’inséraient toujours une certaine nostalgie, un énervement incertain, un sentiment ambigu, comme si le mouvement même qui les avait portés à boire n’avait fait qu’aviver une incompréhension plus fondamentale, une irritation plus insistante, une contradiction plus fermée dont ils ne pouvaient se distraire.
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Ils avaient vieilli, oui. Ils avaient l'impression, certains jours, qu'ils n'avaient pas encore commencé à vivre. Mais, de plus en plus, la vie qu'ils menaient leur semblait fragile, éphémère, et ils se sentaient sans force, comme si l'attente, la gêne, l'étroitesse les avaient usés, comme si tout avait été naturel : les désirs inassouvis, les joies imparfaites, le temps perdu.
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