Pourquoi conservons-nous si longtemps certains livres ( jamais lus) depuis les couloirs de l'enfance dans un coin de notre bibliothèque ?
Qu'est ce qui fait qu'un matin, près de 40 ans après l'avoir reçu, l'ouvrage nous appelle enfin ?
Nous tente.
Il avait pourtant déjà été ouvert, regardé (superbes illustrations entre naïveté et tendre réalisme), lu sur quelques paragraphes. .. puis à chaque fois reposé.
C'est qu'on n'est pas prêt à se plonger dans l'univers livresque proposé.
Ici, il s'agit du Béarn de la première moitié du 20 ème siècle.
C'est un poète qui nous conte la douce histoire de Jausèp, ce tout jeune paysan vouant une passion incroyable aux animaux ainsi qu'à sa terre.
L'ours le fascine, et un voyage inattendu avec un berger et son patou jusqu'au sommet au coeur des Pyrénées sauvages lui fera toucher ce à quoi il aspire le plus : une complicité immuable entre ce puissant animal et l'homme.
Ce très beau texte à réserver aux collégiens aguerris du grand écrivain pyrénéen Joseph Perey offre là aux jeunes, en hommage au Béarn, un hymne à l'amour de la nature et de la solitude.
Il me fallait donc du recul, probablement une plus fine compréhension de ma propre histoire (un peu béarnaise), et aussi beaucoup d'autres lectures, en amont, pour pouvoir apprécier la sincérité et la poésie de ce conte tout droit sorti des longs couloirs du temps.
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L'oncle Jeantine avait été son vrai maître d'école, l'autre ne parlant que des Gaulois ou des Mérovingiens, et jamais des choses et des gens du pays. Or, avec l'oncle Jeantine, Jausèp avait appris que sa petite patrie était le Béarn, la plus belle province de France, et que cette patrie s'étendait jusqu'à la montagne des Pyrénées.
Oui, cette montagne si bleue devait être celle où l'Arche s'était jadis échouée avec son chargement de bêtes étranges, l'enfant avait fini par en être assuré. Car, d'après les contes du berger Bernard, elle n'était pas seulement la patrie de Patou, de l'âne à croix noire, des brebis et du bélier aux cornes enroulées, des oiseaux migrateurs, des grands troupeaux de vaches, de moutons et de juments noires qui y montaient l'été de toutes les vallées, elle était aussi l'aire de l'aigle et du vautour, le refuge de l'isard, le repaire enfin de l'ours brun, de l'ours des Pyrénées, sujet de prédilection des récits du berger.