Le titre est sympa, non? Bien choisi, il donne le ton.
C'est un livre drôle plus qu'un récit initiatique. Une bande de copains, partagés entre le goût de l'effort et un certain hédonisme, vont aller toujours plus loin dans la découverte de l'alpinisme.
Des scènes paillardes entrelardent les récits de courses en montagne : elles visent une truculence rabelaisienne, mais avec parfois un peu d'excès qui nuit à leur crédibilité.
Une lecture fort divertissante, à recommander pour les soirées en refuge ou les journées d'attente désespérées de l'éclaircie propice à la pratique montagnarde.
Pour ceux dont la montagne ne remplit pas entièrement la vie, j'ajoute qu'un auteur qui cite Musil et convie Proust et Stendhal dans ses dialogues peut être tout à fait snob et nul mais peut aussi ne pas...
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Pour le montagnard, la carte c'est déjà la montagne ; et aussi son matériel, jamais rangé trop loin. Jusqu'au trottoir qu'il arpente en semaine, tout est montagne au passionné, en tout lieu, à toute heure. IL n'est pas trois marches à monter, une butte à parcourir, qui ne soient l'écho réverbéré des gradins magnifiques qui enfièvrent son imagination. La montagne est un temple cyclopéen où s'exprime un culte profane, un déisme sans dieu. Point de jonction impalpable entre ciel et terre. Un fantasme de neige; glace et roc, que sa réalité outrepasse. Une spiritualité incarnée.
La montagne s'oppose en ceci à la psychanalyse qu'on s'y trouve en action, là où on y est habituellement allongé ; qu'on y est silencieux, là où l'on parlotte énormément; et que sa pratique est gratuite, là où il vous faut payer rubis sur l'ongle. Tout ceci pour un résultat semblable : le sentiment trompeur de s'affranchir du passé ; ou tout au moins de le tenir momentanément à distance.
Un immense rond-point, planté en plein désert à l'intersection de la route avec un sentier, rappelle l'entêtement de la civilisation à installer un peu de géométrie dans le grand bazar du monde.
La fatigue accumulée de ce début d'ascension se rappelle à lui dans les moindres muscles de son corps : muscles qui lui paraissent en beaucoup plus grand nombre qu'indiqué dans l' Atlas d'anatomie.
Le skieur est semblable au prince des nuées
Qui hante les descentes et se rit du rocher ;
Enfoncé dans la neige les lunettes embuées,
Ses planches de géant l'empêchent de marcher.