Portrait psychologique de TolstoïFrançois Porché (1935), chez Flammarion
L'excellent
François Porché a écrit deux biographies de Tolstoï, c'est dire l'intérêt qu'il lui portait. Mais je reviendrai là-dessus.
Voici ce qu'il disait sur le célèbre écrivain dans les années 1935, il y mettait toute son âme et sa passion, son sérieux aussi consistant à ouvrir le sujet de la manière la plus fidèle qui soit :
"Aux hôtes d'Iasnaïa Poliana, Tolstoï vers la fin de sa vie , se plaisait à montrer non loin de la maison d'habitation, la cime d'un mélèze, et il ajoutait : "C'est là que j'ai vu le jour, sur un divan de cuir." En ce point de l'espace, en effet se trouvait jadis la chambre de sa mère, dans l'antique demeure seigneuriale des princes Volkonski, dont ne restaient que les deux ailes. le mélèze balançait ses hautes branches, le vieillard, le regardant, souriait de ses yeux gris. Songeait-il que le hasard donne parfois aux choses la signification d'un symbole ? Né entre terre et ciel ! (*)
A l'entrée du parc d'Iasnaïa Poliana, se dressaient, se dressent encore, de chaque côté de l'avenue plantée de bouleaux qui conduit à la maison, deux tours massives et rondes, érodées à leur base par le temps et les pluies et coiffées d'un toit en forme de pétase. Ces tours ruineuses, recouvertes d'une chaux qui s'écaille, laissent voir sous l'enduit leur assemblage de briques : la même petite brique, couleur de rose morte et de sang caillé, dont sont bâties à Kazan, à Moscou, les hautes murailles des Kremlins (*)
Au commencement du XIXe siècle, et jusqu'en 1821, date à laquelle mourut le prince Nicolas Serguiéévitch Volkonski, grand-père maternel de
Léon Tolstoï, donc sept ans seulement avant la naissance de celui-ci, deux soldats, jour et nuit, se tenaient encore en sentinelles au pied de ces deux tours, privilège attaché au haut rang que le seigneur du lieu, retiré sur ses terres, avait occupé jadis dans l'Etat : général d'infanterie sous
Catherine II et Paul 1er, ambassadeur plénipotentiaire de toutes les Russies à Berlin..."
(*) La demeure seigneuriale dans sa partie principale dont il est question fut démontée pierre à pierre pour être reconstruite ailleurs. Un partenaire de jeu de
Léon Tolstoï en était devenu le nouveau propriétaire, l'écrivain avait alors contracté des dettes de jeu excessives.
(*) A Kazan aussi, existe un musée Tolstoï que je ne connais pas. Il sera probablement l'objet d'un prochain voyage. Kazan, l'université, c'est là que Tolstoï fit ses études..