Tout en montant, Sandric m'expliqua que le tube central avait deux fois la hauteur de cette ex-tour Eiffel, aujourd'hui couchée sous la poudre de sa propre rouille au fond d'un chantier de démolition, où on la montre pour quelques centimes aux amateurs de ce dernier panache du pittoresque inutile et de la gloriole réactionnaire.
"Le Tout-au-Ciel"
Selon ma compréhension terrestre, j'imagine qu'en mourant mon regard, illuminé d'autres lueurs, ce sera rivé à ton regard, noir de désespoir, aura photographié en toi tous les incidents du voyage, et que cette collection d'instantanés, se déroulant hors de tes prunelles, pourrait servir à l'histoire de ma mort.
"L'imitation de la mort"
Le caoutchouc humanisé est une composition où il entre mille et un ingrédients. Les déchets organiques, le cadavre, puisqu'il faut l'appeler par son nom, qu'on avait la bêtise de rendre à la terre, nous fournit la matière humaine dans laquelle on le trempe toute une année avant de lui donner une destination industrielle. Il est pétri de nos viandes, il est graissé de nos graisses ; au travail de la lumière ou de la chaleur il distille une partie de nos sueurs. Le caoutchouc humanisé a cette supériorité, par exemple, c'est qu'il ne fatigue pas et n'est jamais malade, mais il mange. Oui, nous l'enduisons tous les matins d'une huile essentielle et nous le frictionnons avec des gants électriques. Nous sommes obligés d'entretenir sa souplesse comme on entretient la peau des vieilles actrices. Eh bien, le gaillard se met à en avoir des pores... Il se forme un épiderme, il lui pousse une sensibilité. Le caoutchouc humanisé le sera complètement quand nous obtiendrons du gouvernement le droit à l'écorchement préalable. On nous livre des animaux morts sans cercueils : pourquoi ne nous livrerait-on pas les cadavres des humains tout nus ?
"Le tout-au-ciel"
Il est juste d'avouer que les dernières préoccupations sont d'une singulière espèce. Il ne s'agit guère du salut de son âme ni de la crainte d'une puissance inconnue capable de vous juger sévèrement. On est inquiet d'une ligne d'étoffe au-dessus de soi, d'une apparence de porte qui s'ouvre ou se ferme, d'un mouvement que l'on essaye et qui se répercute à l'infini dans le prolongement de votre volonté, qui dure en dehors du geste physique. Je n'ai plus de mains et je les tords encore au-dessus de mon front, cherchant un point d'appui avec l'entêtement imbécile du noyé qui coule à pic.
J'ai donc battu des paupières ainsi que battrait des ailes un oiseau effaré pendant une heure. (Une heure ou une nuit ?) Puis je suis revenue. Je n'avais plus ni paupières ni ailes. J'étais légère et je glissais vers toi en goutte d'eau. Je filais sur ta joue, ton épaule, ton bras, ton index. Tu m'as essuyée comme une de tes larmes ; sortie de ton regard désespéré, je suis rentrée en toi bue par tes lèvres.
"L'imitation de la mort"
- Après ? Vous oubliez notre devise : tout est dans tout ? En haut, chez nous, il n'y a pas plus de distinction honorifique et de discours que de préparation spéciale. Nous n'avons pas voulu que, parvenu au sommet de la science pure, un cadavre eût le droit de se croire autre chose qu'une ordure quelconque. Vous avez traversé la salle des morts en passant par la première salle de cette usine dite d'épuration collective. Ils étaient perdus dans la foule anonyme des débris que nous aspirons à l'état malfaisant pour les rejeter à l'état bienfaisant. Ils sont à la fois le savon parfumé avec lequel vous vous frottez les mains, le morceau de fusiline que vous étalez sur une sandwich, et le monument ou le vêtement de caoutchouc dont vous admirez la résistance.
"Le tout-au-ciel"
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