Passage du poète.- CF Ramuz
C'est, le temps d'une saison agricole, un vannier qui s'installe au village, témoin, scrutateur, confident, ami. Son oeil autre donne comme du sel à ce village vigneron accroché aux pentes de la montagne, en surplomb du lac. Au fil des siècles, les hommes ont construit des murs et des terrasses, pour permettre cette culture exigeante, à laquelle ils se livrent corps et âme.
Ramuz, suivant le rythme de la vigne et des mini-événements qui font la vie du village, compagnon des hommes et des femmes, avance à pas joliment pesants, solides, déterminés. Sa poésie interne, lourde du temps, du geste, du paysage et de la pensée, donne vie à ces hommes voués à une seule tâche, avec l'intuition qu'un autre monde est possible (et va sans doute l'emporter). Mais la conviction est là que le travail, la tradition, le geste répété de jour en jour et d'année en année leur confère, malgré la peine, une noblesse simple mais inégalée. le choix n'est pas réellement là, d'ailleurs:
"Parce qu'il nous a été dit dans les commencements du temps : « vous travaillerez… »",
"Et c'est comme ça que ça va".
Mais cette absence de choix qui ancre dans le monde et le paysage, est une assez belle façon d'écrire sa vie.
C'est beau, par moments à la limite de l'hermétique, souvent fluide comme un homme qui avance sur le chemin.
Beau comme du Ramuz, en somme.