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3,78

sur 469 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Qu'ils aient pour théâtre la Caroline du Nord ou sa voisine du Sud, les romans de Ron Rash offrent toujours la promesse d'une communion avec la nature.
Si l'oeuvre de cet écrivain flirte avec le genre “nature writing”, les splendeurs appalachiennes sont rarement transcrites sur le mode contemplatif mais semblent mises en exergue pour atténuer le caractère bien trempé des habitants de ces contrées autrefois Cherokee.
“Le monde à l'endroit” n'échappe pas à la règle et le décalage entre la magnificence de l'endroit et la noirceur de la plupart des protagonistes cette fois encore saute aux yeux.

La Caroline du Nord faisait partie en 1861 des onze états sécessionnistes. La guerre civile américaine, opposant les confédérés aux unionistes, y fit rage quatre années durant.
Le massacre de Shelton Laurel le 18 janvier 1863 où périrent treize sympathisants unionistes, dont un adolescent âgé de 13 ans, est resté dans les mémoires comme un des sommets de la barbarie de ce conflit qui fit des centaines de milliers de victimes civiles et militaires.

“Le monde à l'endroit” n'est pas à proprement parler un roman historique mais l'intrigue qui se passe de nos jours se situe tout près de ce lieu sanglant. En outre plusieurs membres de la famille du personnage principal, un jeune homme de 17 ans prénommé Travis, faisaient partie des martyrs lâchement assassinés un siècle et demi plus tôt.

Alors que commence le roman, notre Travis n'est guère en meilleure posture que ses malheureux ancêtres : les mâchoires d'un piège à ours viennent en effet de se refermer sur son pied droit mettant l'os à nu.
Il faut une sacrée dose d'inconscience pour venir une troisième fois au même endroit voler des plants de marijuana ; qui plus est dans le champ des Toomey père et fils, deux colosses dont la férocité est connue bien au-delà du comté.

L'intensité dramatique de cette première séquence donne le ton d'une histoire captivante dont des acteurs sont pour la plupart impulsifs, à la personnalité borderline.
Et toujours la nature dans son rôle équilibrant qui tout à la fois subjugue et apaise. Ainsi en bordure du champ des sinistres Toomey coule une rivière peuplée de truites brunes, d'arc-en-ciel, d'achigans à petite bouche et de poissons-chats.
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Je viens de finir le monde à l'endroit et j'en suis toute retournée…
J'avais entendu parler de Run Rash à l'occasion de son dernier roman « Le chant de Tamasee » mais n'avait encore rien lu de lui !

Dès les premières pages, j'ai été prise à l'hameçon et rejetée à la rivière pour en suivre le cours (en nageant dans celui du récit).

Le coeur des Appalaches est bien le paradis des animaux mais semble être le purgatoire des hommes qui y vivent : mieux vaut y être un nageur de rivière.

En effet, dans les années 70 à Shelton Laurel comté de Madison vivre est difficile : les habitants semblent pris à la gorge, hormis la culture du tabac prédominante pour les fermiers installés depuis des générations, l'alternative est mince : culture de marijuana, engagement dans l'Armée pour les moins scrupuleux et les plus audacieux, peu de perspectives pour les femmes, qui sont dans ce roman détentrices de douceur dans un monde de brutes qu'elles communiquent à leurs rejetons .

Travis, jeune adolescent, dont le père nie les qualités et les capacités, a besoin d'argent ( payer l'assurance de son pick-up, acheter quelques mousses...) et si il ne trouve pas l'arbre à bouteilles il lui semble trouver un arbre à fric, « un bon vieil arbre à fric ».

De là viendront les ennuis et avec eux les Toomey père et fils .
Mais pour Travis viendront aussi les satisfactions et le réconfort avec Léonard et Lori.

« T'as pas l'étoffe d'un homme pour t 'en sortir tout seul, avait dit son père » …



Un chemin vers l'émancipation pour Travis
un chemin vers la rédemption pour Léonard.

Mais il y a toujours un prix à payer…

J'ai été fascinée par la lecture de ce Run Rash surtout dans sa manière de magnifier la nature et les paysages,«Le paysage tel un destin », mais aussi dans l'art de semer la beauté même dans la technicité (culture du tabac, pêche à la truite).

J'ai aussi apprécié l'adresse et la subtilité avec lesquelles il emmène le lecteur dans les tréfonds de l'histoire américaine, le lecteur parcourt des feuillets du registre (daté de 1850 à1863) du Docteur Candler sans savoir qu'ils représentent un morceau de la mémoire du massacre de Shelton Lorel lors de la guerre de Sécession.

Léonard en s'adressant à Travis lui dira :« Tu sais qu'un lieu est hanté quand il te paraît plus réel que toi ».

Une lecture absorbante, une écriture magnifique, des tensions dramatiques qui a deux reprises m'ont
fait plonger en apnée !

Un roman noir où seuls les animaux ont le pouvoir de rêver...

Très très belle découverte.
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Le monde à l'endroit est un roman de Ron Rash qui fait le récit âpre d'une Amérique profonde ; nous sommes ici dans le comté de Madison, au coeur des Appalaches, un lieu empreint d'histoire où la nature, belle et sauvage à souhait, offre des rivières tumultueuses, gorgées de truites mouchetées. Je me suis d'ailleurs demandé si c'était dans ce même lieu que se déroulait le livre Sur la route de Madison et le fameux film qui en a été tiré plus tard avec Clint Eastwood et Meryl Streep.
Ce n'est pas le premier roman de cet auteur américain, mais c'est celui par lequel j'ai fait avec bonheur sa connaissance.
Comment dire les choses sans trop les raconter ?
Nous sommes dans les années 70. Travis Shelton est un adolescent de dix-sept ans qui, à ses moments perdus, pêche la truite à la cuiller, passion qu'il partage avec l'un de ses copains, Shank, lorsqu'ils ne sillonnent pas tous deux les routes en pick-up, ou bien assis sur le capot à boire des bières. Ici c'est une région rurale où l'on cultive notamment le tabac, comme le fait son père. Le père et le fils ne s'entendent pas. Travis ne supporte plus les remontrances d'un père brutal qui ne cesse de le rabaisser, qu'il traite de fainéant et de bon à rien. Par hasard, en allant pêcher un samedi après-midi, Travis découvre un champ de cannabis isolé. Le désir est bien tentant d'embarquer quelques plants dans son pick-up pour aller les revendre à Léonard, un ancien enseignant reconverti en dealer. Et comme cela a marché une fois, pourquoi ne pas y revenir une seconde fois, puis une troisième. Forcément, cela devait arriver : Travis est surpris par le propriétaire, un certain Carlton Toomey et son fils Hubert. Carlton décide de lui sectionner le tendon d'Achille, histoire de lui donner une bonne leçon mais pour autant consent à l'amener à l'hôpital, une manière de lui montrer qu'il a du cœur à sa façon.
Voilà ! Le décor est planté. Trois personnages vont offrir à Travis une manière différente de poser une autorité. Le livre peut d'ailleurs se lire avec plusieurs regards. Au premier plan, il y a le désœuvrement d'un quotidien sans avenir, entre alcool et drogue. Une fois passé par ce premier regard, l'auteur nous propose d'avancer plus profondément dans ce décor des Appalaches et l'âme de cette histoire...
Nous découvrons les relations qui vont se construire peu à peu, pas à pas, entre les différents personnages du récit, notamment celle que j'ai trouvé très belle entre Léonard et Travis. Léonard, personnage pourtant ambigu lors des premières pages, a tout de suite vu que Travis avait des possibilités, pouvait reprendre des études pour peu qu'on l'encourage, s'en sortir mieux que les autres, mieux que le destin qui l'attend. Léonard est prêt à l'aider, décide d'arrêter de dealer. Lui aussi a un chemin chaotique. On découvre son histoire au fil des pages.
Léonard est un homme paumé, qui vit dans un mobil-home, qu'il partage avec une femme, Dena, sorte d'oiseau blessé, pathétique qu'il a recueillie à ses côtés. Ils ne s'aiment pas forcément, qu'importe...
C'est un chant à plusieurs voix.
Lori, la petite amie de Travis veut l'aider aussi. Les instants de Travis avec Lori sont des moments d'apaisement et de bonheur. Être allongé dans un pré avec Lori. Se tenir par la main, regarder le ciel, ne plus penser à rien... Au loin, le vent arrache des volées de moineaux aux arbres, c'est beau et on voudrait que la vie ressemble à cela, celle à venir aussi pour Lori et Travis.
Il y a dans ce roman aussi une communion avec la nature qui est sans aucun doute selon moi un personnage à part entière du roman.
Un écureuil gris jacasse dans un grand noyer au fond d'un pré, peut-être celui où Travis rêve de faire l'amour à Lori. Parfois en contrebas, un raton laveur ou bien une loutre remue près d'un ruisseau.
Les personnages de ce livre ont quelque chose de fragile, de sombre et de désespéré. Il y a du soleil et de l'ombre qui se frôlent dans les gestes attachants mais aussi chez ceux qui qui sont sans états d'âme.
Par moment, nous avons l'impression qu'ils sont prisonniers d'eux-mêmes, ne parviennent pas à échapper à un destin inéluctable, font d'ailleurs tout pour gâcher la moindre chance de s'en sortir, c'est parfois rageant, c'est à croire qu'ils font exprès...
Toute tentative de tendre la main vers un rayon de soleil qui vient jusqu'à eux comme un escalier prêt à les aider, à les sortir de la boue dans laquelle ils sont enlisés, paraît presque vaine. Je pense à Travis notamment... C'est très bien rendu par l'écriture, car plus d'une fois je bondissais devant mon livre, voulant entrer dans l'histoire et donner un grand coup de pied dans cette fourmilière...
Et puis une phrase résonne dans le livre : « Tu sais qu'un lieu est hanté quand il te paraît plus réel que toi. »
Car dans ce parcours initiatique où Léonard devient presque un père de substitution pour Travis, l'auteur convoque l'histoire, marquée ici sur cette terre encore douloureuse par la guerre de Sécession et c'est sans doute ici que le roman prend aussi toute sa force narrative, son épaisseur. Tous les deux, à la faveur d'une confiance mutuelle, vont tenter de remonter le cours du temps, revenir à l'instant d'un massacre perpétré en 1863, un voyage en arrière où il n'est pas facile de revenir indemne...
C'est un chant sans doute désespéré, avec des désirs de rédemption. Est-ce un livre pessimiste ? Je ne le crois pas.
Dans ce chant crépusculaire, on entend aussi une lumière, même si c'est une lumière du soir, presque agonisante. C'est un livre marqué par une humanité profonde, la volonté de certains d'aider d'autres.
C'est pour moi un véritable coup de cœur et une envie de poursuivre ma rencontre avec cet auteur.
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Une rencontre dans les Appalaches et sa Divide Mountain.
Travis, un adolescent subissant l'autorité rigide, besogneuse et violente de son père.
Leonard, ancien professeur, aguerri à la marginalité, dealer d'amphétamine et vivant dans un mobil home.
Il y a aussi Dena, jeune femme échouée chez Léonard et que la vie ne semble pas avoir épargné par sa dureté non plus. Elle se défonce et musarde à longueur de journée.
Un journal quotidien d'un médecin militaire, sorte d'inventaire de ses soins aux locaux datant du conflit sécessionniste et fratricide, jalonne le récit et introduit les chapitres de ce roman.
Un traumatisme fait d'une mauvaise rencontre provoquée, dont Travis doit se relever, l'amène à se réfugier chez Léonard. Il ne peut s'abaisser à affronter le courroux de son père de qui il n'a jamais reçu le moindre soutien ou encouragement.
Léonard fait face lui aussi, mais à ses démons passés. Femme et petite fille parties sur un autre continent, loin, sans possibilité de nouvelles.
Aux côtés de Léonard, Travis reprend confiance dans le fait d'apprendre et espère de nouveau s'extraire de son environnement sans projections. Il se confronte même au sentiment nouveau qu'est l'amour à travers sa relation avec Lori, jeune fille qu'il côtoie du lycée qui sait ce qui est bon pour elle, tout du moins les chemins qu'elle ne doit pas emprunter.
Le temps du récit s'écoule telle une rivière tranquille de ce coin des états unis, ponctué par les saisons et la rudesse de la nature.
Les Appalaches sont un des hauts lieux de l'histoire sécessionniste de ce pays où l'on s'entretuait entre voisins, fil rouge sang du récit entre autres.
Ces histoires se croisent, s'entrechoquent en violence parce que l'Amérique sauvage façonne les hommes et fait resurgir le passé violent et sauvage lui aussi.
Un roman vaporeux, camper dans un brouillard de sentiments, de liens se faisant ou se percutant pour enfin s'accélérer dans une fin qui ne serait qu'un chemin nouveau à prendre.
Un roman que j'ai mis un certain temps à lire mais que je retrouvais toujours avec plaisir de par l'atmosphère, les éléments naturels et les histoires individuels des personnages.
Peut-être qu'un jour, j'irais m'y perdre bien volontiers dans ces Appalaches.
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"Il repensa à ce qu'elle avait dit l'automne d'avant,qu'elle commençait à croire que les gens pouvaient changer".
Ce principe, mis en avant dans le roman le monde à l'endroit, par l'Américain Ron Rash (nouvelliste, romancier, lauréat de grands prix littéraires) se retrouve dans les trois personnages principaux, à l'envers (anticonformistes), dans ce récit.
Travis Shelton, le jeune délinquant (qui parle ci dessus) "un sacré buveur", un "craneur", qui, se croyant malin, vole par deux fois les plans de marijuana d'une culture illégale, les revend à Leonard Shiler, ex prof devenu dealer, puis se fait sectionner le tendon d'Achille par les brutaux et dangereux propriétaires du champ, en guise d'avertissement.
Leonard, le prof désabusé,mis au ban de la société,qui se fout de pousser les jeunes et moins jeunes à la drogue en leur revendant cachets et marijuana.
Dena, la paumée autodestructrice, qui loge dans le mobil-home de Leonard.
Le monde à l'endroit évoque les raisons qui font que certains êtres se perdent, un jour, sur leur propre chemin de vie (non reconnaissance de leur valeur,humiliation,injustice,dénonciation,abandon..) puis leur laisse une deuxième chance pour se racheter (leur empathie,leur intelligence,leur besoin de béquilles, leur rencontre avec l'amour ou l'amitié..).
J'ai trouvé ce roman noir, très noir car les Toomey (père et fils), à la serpette chirurgicale et aux sales coups faciles sont ignobles, car l'inconscience de Travis, le cynisme de Leonard et l'avilissement de Dena m'ont énervée, car le passé sanguinaire (du comté "Bloody Madison" lors de la guerre de Secession) sur lequel le présent revient sans cesse,m'a révoltée...puis soudain j'ai vu, à travers mots, s'éclairer une lumière...j'ai entendu le Messie de Haendel qu'écoute Leonard, avec ferveur, une musique qui dit "Les passages tortueux deviendront droits" car il y a de la beauté en ce monde...et j'ai pensé voilà un sacré bon livre que celui dont l'infime parcelle d'espoir fait halluciner et frissonner son lecteur.
Ajoutez à cela une belle écriture,une plongée dans la nature souveraine où l'on se croit dans une tranquille partie de pêche à la truite et où l'on se retrouve sur un terrain de chasse, une ambiance angoissante à souhait (avec moult péripéties),un panel d'émotions contradictoires (en rapport ou non avec la question: porte-t-on le poids des actes répréhensibles de ses ancêtres?),des portraits psychologiques forts (contradictoires aussi, avec la mise en évidence du conflit père-fils) et vous obtenez un excellent roman!
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En Caroline du Nord, le jeune Travis, 17 ans, en conflit avec l'autorité paternelle, part seul à la pêche dès qu'il a un instant à lui pour souffler un peu au pied de Divide Mountain dans les Appalaches.
Il faut dire que son père n'est pas très clément envers la jeunesse. Il le bat et trouve qu'il ne travaille pas assez dur lorsqu'il apporte son aide à l'exploitation de tabac familiale.
Un jour, lors d'une de ses expéditions de pêche, il découvre un champ de cannabis appartenant à la famille Toomey. C'est si facile d'en prendre quelques plants et de les embarquer dans son pick-up, puis de les apporter à Léonard, un prof déchu de ses fonctions et aigri par le départ de sa femme et de sa fillette en Australie, qui habite dans une caravane avec Dena, une jeune droguée, et vit de deal en tous genres.
Pourtant Travis est loin d'être un mauvais garçon même si comme beaucoup de jeunes de son âge, il joue parfois au dur. Son quotidien est terne mais ressemble à celui de beaucoup de jeunes désoeuvrés habitant loin des villes : bière, drague, boulot à la supérette du coin et drogue à l'occasion...
Il est en crise à la maison, a quitté l'école, n'a toujours pas couché avec une fille mais fait tout comme devant les autres !
Il a des centres d'intérêt : la pêche, les lectures, les moteurs...
Travis ne peut pas s'empêcher de retourner chercher du cannabis ! Mais cette fois, il va tomber dans un piège, un vrai... il sera torturé par le père Toomey qui va aller jusqu'à lui trancher le tendon d'Achille pour lui donner une bonne leçon...
Dans ce milieu d'hommes rudes, on ne plaisante pas avec les voleurs surtout lorsqu'on cultive en cachette un plein champ de drogue !

Finalement Travis a plutôt de la chance car il aurait pu finir au fond de la rivière...comme tant d'autres.

Sa chance se poursuit lorsque à l'hôpital il rencontre Lori, une ancienne camarade de classe, qui devient sa petite amie et adoucit un peu sa vie...

Dès lors, le conflit avec son père ne s'arrange pas et Travis quitte définitivement le domicile parental pour aller s'installer chez Léonard. Il entend prouver par là à son père qu'il est capable de se débrouiller seul.

L'année qui va suivre sera l'occasion pour lui de quitter définitivement l'enfance...
Grâce à Léonard, il va entrer dans l'histoire de la région et découvrir que des membres de sa famille y sont mêlés. Ils se découvrent ainsi un centre d'intérêt commun qui les amène à partager de plus en plus de choses... Pendant la guerre de Sécession, à Laurel Shelton, en effet, les ancêtres de Travis ont été sauvagement massacrés par des confédérés. Tout au long du roman le poids de ce massacre plombe l'atmosphère...Mais le lecteur comprend peu à peu que Léonard a quelque chose à voir aussi dans cette histoire...

Mon avis
C'est un roman initiatique à la fois violent et tendre comme la vie...Les hommes y apparaissent dans leur vrai nature. Travis et Léonard sont des personnages très attachants !
Les balades dans les montagnes et les paysages décrits dans le livre sont dépeints avec beaucoup de réalisme. L'auteur, qui semble très attaché à sa région, nous dit d'ailleurs que l'homme est façonné par la nature qui l'a vu naître et grandir ! C'est aussi le cas de Travis : la nature l'appelle et l'apaise. Il ne peut pas s'en passer...il aime remonter les rivières à pied et attendre que le poisson morde ; il aime sentir l'odeur de la terre et la caresse des plants de tabac sur ses mains...
L'auteur, avec beaucoup de poésie, nous montre que quoi qu'il arrive dans le monde des hommes, la nature sera toujours là pour recouvrir les atrocités d'un massacre ou resplendir un beau matin même si dans la nuit, l'homme a tout perdu...

C'est un roman puissant, à lire absolument !
Lien : http://www.bulledemanou.com/..
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Le choix d'un roman se fait au hasard, sur un coup de tête ou après une longue réflexion, et lorsque vous ouvrez votre livre, vous avez les mêmes incertitudes qu'au début d'une partie de pêche, vous ne savez pas si ça va mordre, si les heures de lecture à venir seront réjouissantes ou barbantes La lecture offre des plaisirs contingents à renouveler en permanence. Et parfois vous ressentez la satisfaction de tenir entre vos mains un livre qui vous parle et qui vous touche. Vous éprouvez immédiatement une empathie pour les personnages. le milieu dans lequel ils évoluent vous paraît naturel, comme si vous y aviez toujours vécu. C'est ce que j'ai ressenti à la lecture du « monde à l'endroit » de Ron Rash.
Le roman se déroule dans un comté rural de l'état de Caroline du nord peuplé de « rednecks ». Dans ce coin des Appalaches, ils sont nombreux à vivre en marge de la société. Certains gagnent modestement leur vie dans les travaux des champs ou en exerçant des emplois mal payés ; d'autres se livrent à des trafics illégaux. le samedi soir, les jeunes se réunissent autour de leurs pick-ups et se saoulent ou se défoncent pour oublier leur condition et leur avenir bouché.
Travis Shelton est un jeune de 17 ans. Il est souvent amené à aider son père dans ses travaux de culture de tabac. Un matin, il décide d'explorer la rive d'un cours d'eau en quête de sites de pêche. Alors qu'il traverse la propriété des Toomey, des voyous redoutables, il découvre des pieds de marijuana. Il arrache quelques plants et part les revendre à Léonard. Léonard est un ancien enseignant qui a perdu son emploi, sa femme et sa fille après que quelqu'un ait placé un sachet d'herbe dans son véhicule par vengeance. Rongé par l'échec et l'absence pesante de sa fille qu'il ne parvient plus à joindre, reclus dans un mobil home en compagnie de Dena, une junkie, il survit en revendant des bières aux mineurs, de l'herbe et des comprimés. Ravi de cette nouvelle aubaine, Travis retourne se servir dans la propriété. le piège se renferme sur lui. Blessé à l'issue de sa rencontre avec le père et le fils Toomey, Travis est hospitalisé sans rien pouvoir révéler de l'origine de sa mutilation. La confrontation avec son père, un homme fier et dur, tourne mal. le jeune homme quitte le domicile de ses parents et trouve refuge chez Leonard. Les deux hommes vont se rapprocher grâce à une passion commune : ils s'intéressent tous deux à l'histoire locale de la Guerre de Sécession. Leonard et Travis vont s'entraider dans leurs quêtes de rédemption. Mais la violence n'est jamais loin, celle du passé, enterrée avec leurs aïeux dans un charnier de la guerre, et celle du présent, toujours prête à exploser…
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Travis est en déroute et semble avoir raté une marche dans son évolution d'homme. Il possède ses capacités propres et sa rencontre avec Léonard semble être le déclic pour qu'il mette en application ses qualités. D'ailleurs, tous les personnages charismatiques de l'environnement de Travis vont lui permettre, chacun à leur manière, de s'éduquer de manière brutale. Son père, Toomey et Léonard vont lui ouvrir les portes du passage à l'âge adulte. Il va grandir au contact de chacun d'eux et il va donc essayer de se racheter de ses fautes passées en faisant ressortir le meilleur de lui même. Mais on s'aperçoit que plus l'histoire avance et plus les chances d'une fin heureuse s'amenuisent, tant le passé sombre de la guerre de Sécession et ses secrets pèsent sur toute cette communauté.
Grâce à une écriture agréable, une certaine poésie pleine d'humanité ressort de cette lecture située dans les paysages sauvages des Appalaches et une certaine forme d'espoir accompagne malgré tout le déroulement du roman de Ron Rash. J'ai eu grand plaisir à suivre ce roman initiatique au milieu d'une région retirée des Etats-Unis, avec des personnages aussi attachants que désespérants.
Lien : https://leslivresdek79.wordp..
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D'un côté, une nature intègre, paisible, lumineuse. Des montagnes, à pic, des cours d'eau paisibles, nimbés de douceur. de l'autre, des hommes, des femmes, d'une noirceur sans fin, sans fond. Travis, un adolescent de 17 ans, s'essaye à vivre dans ce milieu, tant bien que mal. Un « monde à l'endroit » ? Il a plutôt l'impression d'être comme sur un manège à la foire, dans un monde qui n'est plus trop d'aplomb. D'ailleurs, quand on y regarde de plus près, ce paysage en apparence tranquille et rassurant recèle des ombres cachées, des fantômes d'un autre temps. C'est ce qu'il va apprendre au contact de Leonard, un dealer paumé qui le recueille. Entre ombres et lumière, la vie et la mort se côtoient tandis que le temps laisse « tomber ses secondes goutte à goutte ».

« le monde à l'endroit » est un roman noir qui joue habilement sur les contrastes. On est frappé d'emblée par la majesté des paysages décrits dans une langue poétique apaisante. le rythme est lent, Ron Rash semble poser le décor. L'envers des mots laisse cependant affleurer une réalité en demi-teinte : « les arbres se firent plus denses, quelques bouleaux des rivières pareils à des lames de lumière emprisonnées parmi les feuillus plus sombres. » Car les montagnes portent ici, dans leur majesté même, leur part de menace et d'obscurité. Les fantômes de la guerre de Sécession hantent les lieux. Ron Rash joue aussi sur le contraste entre le passé et le présent, liés par un fil ténu qui reste, au moins au début, énigmatique.
« le monde à l'endroit » est une oeuvre… lumineuse dans sa façon de distiller la noirceur humaine, perpétuellement aux prises avec ses parts d'ombres, ses errances, ses failles, mais aussi ses forces et points d'appui. Si la mort guette au bord des gouffres, la vie peut aussi jaillir dans la blancheur des pages qui restent à écrire…
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C'était mon premier Ron Rash et j'ai immédiatement séduit par le lyrisme et le talent de cet auteur pour dépeindre des personnages et les mettre en scène souvent à l'envers même si le titre est à l'endroit. Nature, montagne, conflit père fils, odeurs et sons, truites farios, références à la guerre de sécession, suspense final, autant d'ingrédients qui construisent un excellent roman à ne pas manquer.
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