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EAN : 9782072828621
272 pages
Gallimard (21/03/2019)
3.61/5   285 notes
Résumé :
Dans cette contrée de Caroline du Nord, entre rivière et montagnes, que l’œuvre de Ron Rash explore inlassablement depuis Un pied au paradis, un monde est en train de s’effacer pour laisser la place à un autre. Le shérif Les, à trois semaines de la retraite, et Becky, poétesse obsédée par la protection de la nature, incarnent le premier. Chacun à sa manière va tenter de protéger Gerald, irréductible vieillard amoureux des truites, contre le représentant des... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (90) Voir plus Ajouter une critique
3,61

sur 285 notes
Quand on a aimé profondément un roman, on recherche forcément lors d'une autre lecture du même auteur cette flamme originelle, même si on sait bien que chaque livre a sa propre vie, sa propre petite musique. J'ai profondément aimé, j'aime profondément Un Pied au paradis qui m'a fait découvrir la plume sensible de Ron Rash. Et avec Un Silence brutal, je ne l'ai trouvé cette vibration, cette émotion dont j'aurais tant voulu qu'elle m'emplisse pour toujours.

Bien sûr, ce livre m'a plu.
L'auteur sait comme personne créer de beaux personnages, humains, complexes, troués de failles qui apparaissent au fil des pages. Surtout Becky qui permet de découvrir le Ron Rash poète célébrant la nature ( le titre original, Above the waterfall, «  au-delà de la cascade » ) ; sa voix ouvre et aère de façon nécessaire la narration du shérif Les entre traque des trafiquants de meth' et enquête pour déterminer qui a empoisonné les truites d'un lac. Il excelle à sonder, l'air de rien, notre société contemporaine, entre désespoir et douceur, sans jamais sombrer dans le manichéisme, même alors que son roman est enveloppé d'une nostalgie mélancolique pour un temps où la nature était respecté et ne servait pas l'avidité d'investisseurs.

Mais je n'ai pas vibré. Ou plutôt, si, à un seul moment, sublime et bouleversant, lorsque le taiseux Gerald crie sa rage d'être accusé d'avoir versé le kérosène fatal, son âme à nu.

A propos d'une tortue, toute la délicatesse du Ron Rash poète :

«  Sortie du filet de bave moribond d'une mare de ferme
où au plus profond les pieds de l'appontement sont secs,
qu'elle avance lourdement à travers champ et pâturage
pour trouver l'eau pérenne de la rivière, qu'elle fasse palpiter
le coeur boueux du bassin,
puis remonte, un lent avenir,
comme une meurtrissure révélant
son âpre beauté
et survive »
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Le chérif Les rend son étoile dans un mois pour cause de retraite. Mais avant, en plus des affaires courantes de drogués à la meth, il va devoir traiter une histoire d'empoisonnement de sa chère rivière. Comme souvent, c'est le pot de terre contre le pot de fer quand Gerald, un vieil homme violent et acariâtre, est accusé du forfait par un propriétaire local. Bien que soutenu par Becky, la directrice zélée du Creek Park et poétesse à ses heures, Gerald aura besoin de toute l'expérience et du non conformisme du chérif pour le sortir de ce piège.

Poétique, envoûtant, âpre, tel est le monde de Ron Rash. On s'y plonge avec délectation, sans trop savoir ce qui nous emporte le plus, de ses personnages attachants, tellement humains, ou de cette nature que ses mots subliment, mais disent à quel point il déplore que ses montagnes soient gangrenées par la drogue et le chômage. Nostalgique, Ron Rash l'est sûrement. Dans ce roman noir où il joue avec la part d’ombre et de lumière de ses personnages, il semble que les Appalaches d'aujourd'hui lui font regretter un monde disparu. Pour lui qui juge une société par l’état de sa nature, qui pense que les paysages sont structurants, qu’ils nous façonnent, qu’ils sont notre destin, quand on sait que l’eau des Appalaches n’est plus potable, on imagine ce qu’il pense de l’Amérique de Trump.

Merci à Babelio et aux Éditions Gallimard pour cette belle découverte et opportunité de rencontrer Ron Rash...
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À trois semaines de rendre son étoile de shérif du comté, Les règle les affaires courantes et en cours, notamment le trafic de meth qui sévit fortement dans le coin, rend encore quelques derniers services ici et là, remplit son dossier de retraite. Il délaisse gentiment son bureau afin que son adjoint, Jarvis, fasse tourner la baraque tout seul. Trois semaines qui auraient dû s'avérer calmes. C'était sans compter sur une sombre affaire d'empoisonnement dans la rivière qui causa la mort de nombreuses truites. le vieux Gerald, un authentique montagnard qui pêche à l'ancienne, est accusé par le propriétaire du relais Nature et Pêche, Harold Tucker, d'avoir délibérément versé du pétrole rampant dans le cours d'eau. Une affaire que Les va devoir résoudre sans froisser quiconque, notamment Becky, la directrice du Locust Creek Park dont il est très attaché et qui s'avère être amie avec Gerald...

Deux voix alternent ce roman à la fois poétique, politique et environnemental. La première est celle du shérif qui doit mener sans cesse des opérations anti-meth et qui, à trois semaines de la retraite, va devoir régler un sacré problème de voisinage. La deuxième est celle de la garde-forestière Becky. Poétesse, solitaire et écolo, elle chante la nature et rend hommage à tout ce qui l'entoure. Tous les deux ont connu un drame par le passé et tentent de l'oublier. Entre eux existe une relation unique, pudique et tendre. Ron Rash nous plonge dans un roman âpre, mélancolique et sombre et dépeint, avec une certaine tendresse mais aussi désarroi, un portrait aiguisé de notre société actuelle. Un roman, véritable éloge à la nature, qui oscille entre résilience et espoir, entre joie et tourments, entre beauté sauvage et brutalité des hommes. Sensible et envoûtant...
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Tout laissait penser à Les, shérif d'un comté situé dans un coin des Appalaches, que les trois semaines qu'il lui restait à effectuer avant de prendre sa retraite, seraient, sinon calmes, du moins sans grand imprévu. Seule une opération antimeth, inscrite au programme pouvait apporter peut-être un peu d'imprévu.
Mais cette tranquillité va être brisée lorsque quelqu'un va verser de l'essence dans le torrent, torrent qui traverse la propriété du riche Tucker. Les belles truites argentées meurent. Les riches citadins qui venaient au relais de Tucker, pêcher dans un décor magnifique et sauvage, vont donc fuir.
Tucker accuse aussitôt Gerald, ce vieil irascible qui ne comprend pas pourquoi il ne peut plus parcourir à son gré les rives de cette rivière qu'il a toujours connues et qui malgré les panneaux d'interdiction, continue à les arpenter.
Becky, la garde forestière et Les, le shérif, ne peuvent pas croire que Gerald ait pu commettre un tel geste tant il aime et respecte cette nature. Les va donc devoir mener l'enquête pour savoir qui est le responsable d'un tel geste.
Les principaux personnages de ce roman sont deux : Becky, gardienne d'un parc naturel qui écrit des poèmes et représente la défense de l'environnement, et Les, ce shérif bientôt retraité. Tous deux ont un point commun : un passé douloureux et encombrant.
Mais celui qui tient la vedette, si l'on peut dire, c'est le paysage entre rivière et montagnes, paysage somptueux que Ron Rash connaît bien et décrit d'une façon sublime. Je suis restée scotchée par ses descriptions tant elles sont superbes et on ne peut que rentrer dans le paysage à son tour.
Malheureusement, la beauté qu'offre la nature, avec les fleurs, les arbres, les animaux, les montagnes et les cours d'eau, cette beauté est menacée par les entrepreneurs modernes et on en arrive au conflit entre profit et écologie.
L'auteur met également bien l'accent sur la méthadone, ce fléau qui abrutit les esprits et endommage les corps. Les descriptions des ravages causés par la meth sont si réalistes qu'elles en sont effrayantes.
En fait, c'est le constat de la disparition d'un monde gouverné par l'argent. Tout au long de ce polar, ce sont ces deux mondes qui se côtoient, celui à l'ancienne, représenté notamment par Les qui, tout au long de sa carrière, a tenté de fluidifier les rapports sociaux, et celui des coups, de l'intimidation, de la violence du pouvoir.
Ron Rash a réussi de façon très brillante un roman à la poésie éblouissante et également un roman politique, un roman noir.
J'avais apprécié cet auteur avec Par le vent pleuré, mais Un silence brutal m'a vraiment épatée, enchantée, bouleversée.
Je remercie vivement les éditions Gallimard (La Noire) et Lecteurs.com qui, dans le cadre des Explorateurs du polar 2019, m'ont permis de passer d'aussi beaux moments avec cet ouvrage.
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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A trois semaines de la retraite , ceux et celles qui l'ont vécu le savent , une intense réflexion s'opère en chacun et chacune , le temps de la réflexion, des bilans , des espoirs , des doutes....Que vais - je faire ? A quoi vais - je devoir renoncer ? Trois semaines pour solder une carrière de shériff , pour céder la place à un successeur déjà arrivé , voilà Les face à son destin , face à la fin d'une époque...Partir en accord avec ses convictions ....ses méthodes, ses valeurs ...
Hélas, le monde change , vite , très vite et l'appétit, la voracité de certains grignote les valeurs , suscite les jalousies , mène parfois à l'irréparable. Qui a empoisonné et les truites qui évoluent, si belles , à la cascade d'un relais touristique ? Et pourquoi ?L'enquête mène au vieux Gérald mais les apparences sont parfois trompeuses et , en soulevant le tapis , en grattant dans le passé, on risque de faire surgir de vieilles aigreurs du passé ....Pas forcément aussi facile qu'il n'y paraît, cette affaire , ô pas l'enquête du siècle non plus , mais une histoire qu'il faudra bien résoudre, pour changer tout de même des traditionnelles méfaits liés à la " meth ".....
Ron Rash , on le connaît, un " prince des mots " , un écrivain qui sait analyser le plus profond des personnages , les " lier " à une nature luxuriante , une nature qui , sous les coups de "boutoir " de l'être humain , perd peu à peu sa puissance salvatrice de l'humanité. Des passages d'une grande beauté, d'une belle poésie, comme toujours avec cet auteur , une osmose naturelle entre le décor et l'homme , pour le meilleur et , hélas aussi , pour le pire .Un roman qui illustre le déclin d'une époque et l'émergence d'un autre monde ....
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critiques presse (4)
LeMonde
13 mai 2019
L’Américain est bien placé, depuis les Carolines où il est solidement implanté, pour observer le rapport entre ravages de l’environnement et dégradation des relations humaines. Un silence brutal, son nouveau roman, en atteste.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeDevoir
06 mai 2019
Avec sa manière habile et sensible, l’Américain Ron Rash, qui nous rappelle qu’il est aussi poète, tente ici de donner forme à la complexité de ce coin de pays qui l’inspire d’un livre à l’autre et où il vit depuis toujours.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
LeFigaro
22 mars 2019
Dans ce polar littéraire où les paysages tiennent la vedette, certaines scènes sautent au visage.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Liberation
22 mars 2019
Un silence brutal, qui inaugure la saison 2019 de la collection – avec l’opportune réédition de Nadine Mouque d’Hervé Prudon –, relève du « rural noir ». Ron Rash ne s’éloigne jamais de la rivière, de la montagne, des sentiers, de la vie des fermiers ou de ce qu’il en reste.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (77) Voir plus Ajouter une citation
Tandis que s'éteint l'ultime clarté du soir, un bouleau blanc scintille tel un diapason frappé. Je laisse le vélo à la maison forestière et traverse la prairie. J'ai besoin de sentir la terre ferme. L'air est frais, pas froid, mais Gerald prépare une flambée. Comme toujours il y a dans l'âtre une bûche de pommier. A cause de ses jolies couleurs quand elle brûle, dit-il. Il dispose le bois d'allumage et le papier journal avec autant de soin que s'il nouait une mouche de pêche à la truite, puis gratte une allumette. Sous les chenets la spore du bois aux pointes rouges s'épanouit. Le feu ruisselle autour des brindilles, enfle et se rassemble, s'élève en tourbillons tandis que les étincelles crépitent, éclaboussent lentement la pierre du foyer. Sur le bois de pommier poussent des plumes rougejaunevert et le perroquet disparu semble jouer les phénix au milieu des flammes. Les paumes de Gerald s'ouvrent comme pour bénir le feu, ou peut-être pour que le feu le bénisse. Combien de milliers d'années contenues dans ce geste, sa promesse de lumière, de chaleur et de prompt-repos.
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L’une des histoires que me racontait mon grand-père à propos de l’époque où il travaillait à construire des ponts avait paru invraisemblable, même à un gamin, mais j’avais découvert plus tard qu’elle était véridique. Dans les années qui avaient précédé l’électricité, il n’y avait pour tout éclairage dans les caissons immergés que des bougies. Aux plus grandes profondeurs, la pression était telle qu’il devenait impossible de souffler une chandelle. La flamme s’éloignait de la mèche et ricochait sur les parois en bois avant de revenir se poser dessus. Ce que mon grand-père ne m’avait pas dit, c’était qu’il arrivait parfois que les câbles rompent et qu’un homme se retrouve bloqué au fond. Il devait savoir que la bougie consommait de l’oxygène, et aussi que la flamme ne s’éteindrait pas, pourtant il s’évertuait à souffler dessus, jusqu’à son dernier soupir, en continuant à espérer, en dépit de tout, que d’une façon ou d’une autre elle s’éteindrait.
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Alors que je pénètre dans les bois, c’est le parfum ample et pur des sapins baumiers. Plus loin, la senteur de moisi gorgée d’ombre. Par des trouées dans la voûte des arbres, le ciel use de pailles de soleil pour aspirer et assécher le terreau de feuilles baigné d’humidité. Pendant une minute, pas un bruit. Je recueille ce silence, le loge en moi pour l’après-midi.
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J'allumai la radio, une station de vieux tubes country. Johnny Cash chantait la dure expérience des champs de coton en Arkansas. Il y avait dans sa voix une douleur que toute la renommée et les richesses qu'il avait acquises n'avaient jamais pu guérir. Son frère était mort lorsqu'ils étaient enfants et, pour une raison quelconque, on l'avait poussé à se sentir coupable.
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De bons souvenirs qui aujourd'hui encore savent consoler. Ces matins où je m'élevais à dos d'échelle vers le fenil, disposais ma crèche de paille à côté de la trappe carrée par où passaient les bottes. Là, sur le sol jonché de brins de paille, un cadran solaire de lumière oblique. J'y glissais ma paume d'enfant, recueillais le soleil déversé en pluie. Quand les yeux s'habituent, bien plus de choses révélées : raccordements tricotés de toiles d'araignée, nids de guêpes maçonnes près des traverses, les tunnels orange dressés tels des tuyaux de grand orgue. Parfois une ombre soudain faite chair, longue queue noire s'écoulant dans la paille. Les quelques rares sons qui me réconfortaient, bruissements d'ailes d'hirondelles, bourdonnement d'insectes. Puis la voix de ma grand-mère. Viens, mon enfant, il est l'heure de manger.
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