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Citations sur Nulle part (24)

Je ne regrette que des temps et des lieux ignorés, je suis capable des plus violentes nostalgies pour des espaces où je ne suis allée.
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Elle dit, Dieu, je n'ai jamais pu y croire et je n'ai jamais pu ne pas y croire.
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Dans ce jardin public où mes parents sont apparus pour venir me chercher, eux qui ne venaient jamais me chercher nulle part, j'ai couru vers eux avec une telle joie, et cette disproportion de la joie était aussi un chagrin.
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Je ne connais pas les langues, aucune langue, de mes pères, mères, ancêtres, je ne reconnais ni terre ni arbre, aucun sol ne fut le mien comme on dit je viens de là, il n'y a pas de sol où j'éprouverais la nostalgie brutale de l'enfance, pas de sol où écrire qui je suis, je ne sais pas de quelle sève je me suis nourrie, le mot natal n'existe pas, ni le mot exil, un mot pourtant que je crois connaître mais c'est faux, je ne connais pas de musique des commencements, de chansons, de berceuses, quand mes enfants étaient petits, je les berçais dans une langue inventée .
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Je ne reconnais pas les langues, aucune langue, de mes père, mère, ancêtres, je ne reconnais ni terre ni arbre, aucun sol ne fut le mien comme on dit je viens de là, il n'y a pas de sol où écrire qui je suis, je ne sais pas de quelle sève je me suis nourrie, le mot natal n'existe pas, ni le mot exil, un mot pourtant que je crois connaître mais c'est faux, je ne connais pas de musique des commencements, de chansons, de berceuses, quand mes enfants étaient petits, je les berçais dans une langue inventée.
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Elle n'était ni à moi ni pour moi cette chambre ordonnée où je me suis tenue pendant des années et que quelqu'un occupe aujourd'hui voyant le même carré du dehors, l'arbre s'il existe toujours, la vie du chemin de fer, les trains de marchandises et la butte derrière, une chambre à moitié vide tournée vers le nord, un lieu de passage troué par deux portes transversales, que l'on abandonne sans regret pour se sauver dans l'avenir.
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Je ne connais pas les langues, aucune langue, de mes pères, mères, ancêtres, je ne reconnais ni terre ni arbre, aucun sol ne fut le mien comme on dit je viens de là, il n’y a pas de sol où j’éprouverais la nostalgie brutale de l’enfance, pas de sol où écrire qui je suis, je ne sais pas de quelle sève je me suis nourrie, le mot natal n’existe pas, ni le mot exil, un mot pourtant que je crois connaître mais c’est faux, je ne connais pas de musique des commencements, de chansons, de berceuses, quand mes enfants étaient petits, je les berçais dans une langue inventée. D’où était mon père, mon père lui-même ne pouvait dire d’où il venait, de Tachkent, de Samarkand, que jamais il n’avait vus, de Moscou où il était né, d’Allemagne où il avait appris sa première langue oubliée plus tard, de nulle part dont il ait pu parler, dont il ait conservé traces sauf dans son corps, ses yeux et dans la brutalité de certaines manières. J’ai vu la ville de ma mère, j’ai entendu la langue de ma mère, il y a un pays qui s’appelle la Hongrie et qui était le sien, dont elle ne m’a rien dit et qui ne m’est rien. Je ne peux pas dresser la table comme ma mère, ma mère n’a jamais dressée de table, je ne sais pas faire ce que les mères font et qu’elles ont appris de leurs mères dans leur tradition, je n’ai pas de tradition, je n’ai pas de religion, je ne sais pas allumer les bougies, je en sais faire aucune fête, je ne sais raconter l’histoire de notre peuple, je ne savais même pas que j’avais un peuple. J’aime le nom des régions de France, j’aime les noms Creuse, Vendée, Haute-Marne, Franche-Comté et d’autres noms aussi, des royaumes de terres, des noms plus lointains que des pays et qui m’excluent, je n’ai pas de maison, de temps en temps je rêve d’une maison, pas d’une maison de vacances, mais d’une maison pour m’ensevelir. Je ne veux pas le bien-être mais l’austérité. Je rêve d’un refuge. Et je veux des collines et des bois pour marcher. La France, voila ce que c’est, ce que ce fut toujours, des noms d’endroits, de communes, ces havres inatteignables, ces cimetières de générations.
Je n’ai pas de racines, aucun sol n’est fiché en moi. Je n’ai pas d’origines. Quand je vois dans les journaux, iranienne, russe, juive, hongroise, ce sont des mots que j’ai dits. Il n’y a pas d’images, pas de lumières, d’odeurs, rien. Il n’y a même pas de photos.
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Combien de fois, au hasard de lectures, me suis-je dit : j’aurais aimé écrire ça ou j’aurai pu l’écrire, mais on dit j’aurais pu l’écrire en se referant à l’idée, pour ainsi dire jamais à l’expression même. L’extrait de Kertèsz me frappe comme pouvant être écrit par moi au mot près. Je crois n’être jamais tombée sur une telle correspondance, elle est d’autant plus étrange qu’il s’agit d’une réflexion intime, d’un aveu. Peut être que la seule différence réside dans ce dernier point. Seule, je ne l’aurais jamais écrit. Sans Kertèsz, cette relation au « Vilain Petit Canard » serait restée ensevelie dans la mémoire, avec les autres choses recouvertes et tues. La façon dont Imre Kertèsz rend compte de ce fait, au mot près de la façon dont j’aurai pu, si j’avais osé le transformer en matière, le formuler moi-même, m’oblige au dévoilement. Je ne puis sans réagir, laisser un autre exhumer un coin de mon existence. Car il y a une terre dure, piétinée, depuis des années, qu’il faudra peut-être un jour, si j’en ai la force et l’audace, retourner.
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Il n’y a aucun endroit que je regrette et écrivant cela, je ne pense aucun endroit précis, réel, je ne regrette que des temps et des lieux ignorés, je suis capable des plus violentes nostalgies pour des espaces où jamais je ne suis allée.
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Je n'ai pas de regrets. Pour un lieu, pour un endroit de ma vie, il n'y a aucun endroit que je regrette, et écrivant cela je pense aucun endroit précis, réel, je ne regrette que des temps et des lieux ignorés, je suis capable des plus violentes nostalgies pour des espaces où je ne suis jamais allée.
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