Articulé en trois temps de récit, ce roman d'
Emmanuelle Richard découpe trois moments de la vie de la narratrice entre 2018 et 2038.
2018 est le moment où elle part en Angleterre proposer ses services de woofeuse dans une propriété en ruines balayée par les vents, histoire de se remettre de l'échec de son entreprise de combinaisons fabriquées avec du recyclage d'épluchures de pomme. Elle déchante assez vite, puisque il fait froid, elle est exploitée, la propriétaire est soupçonneuse et radine. Puis elle fait la rencontre d'un
homme sur place avec lequel elle vit une passion sexuelle avant de s'en détourner le soir où il tente de l'étrangler.
2038 est le moment où la narratrice devenue une femme d'affaires accomplie découvre à la une d'un quotidien que ce même homme est devenu un serial killer, spécialisation féminides.
Entre les deux, il y a la partie "la tendresse" où elle se masturbe longuement en repensant à la relation qu'elle a eu avec un homme qui cumulait, selon elle, toutes les qualités qu'une femme peut attendre d'un homme dans une relation amoureuse.
Difficile de qualifier ce texte de roman tant il s'en détourne vite pour s'exposer comme un essai sur les relations hétérosexuelles, le patriarcat, les
hommes avec lesquels on couche, mais qui sont dangereux (ce sont carrément des tueurs), ceux qui sont capables de douceur et de tendresse (mais qu'on finit par dégager parce qu'ils n'ont pas de boulot stable, vivent dans des roulottes et préfèrent aider des potes dans le besoin) etc. le saut dans le temps en 2038 est l'occasion pour l'auteur de balancer une petite blague où un rappeur avoue sa pansexualité (depuis Lil Nas X rien de révolutionnaire ceci dit) mais ne se justifie guère si ce n'est pour raccrocher le wagon sur le refrain du "J'ai réellement échappé à la mort".
L'écriture n'est pas désagréable, mais elle est très démonstrative et stabilote un peu trop (on a compris que l'auteur était féministe et écolo), même si parfois de la poésie affleure sous le pensum (notamment dans la tendresse). Ceci dit, difficile de ne pas sourire quand on imagine cette narratrice qui se caresse, mouille abondamment et se touche les seins en repensant aux détails de la vie quotidienne avec un ancien amant.
Il n'y a pas vraiment de final, par contre, on a bien compris le projet de l'auteur en découvrant la page "Références et ressources" : un vrai bingo intello féministe parisien (
Iris Brey,
Constance Debré,
Mona Chollet,
Martin Page, Camelia Jordana, Yseult,
Juliet Drouar, Olympe de G., les podcasts HotLine et Les mecs que je veux ken et bien sûr
Maïa Mazaurette)
Sans que le moment de lecture soit irritant ou insupportable, on ne peut pas non plus dire qu'il remue ou bouleverse outre mesure. Au pire, il est dispensable.