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EAN : 9781543046199
66 pages
CreateSpace Independent Publishing Platform (12/02/2017)
4.5/5   2 notes
Résumé :
Édouard Rod nous décrit dans ces nouvelles, la vie d’un village vaudois au siècle passé avec beaucoup de vérité : il y a les Baudruz, une famille de villageois, le pasteur, le régent, le syndic (le maire), etc. Mais tout va changer lorsque l’oncle Charles Baudruz, qui « courrait les cinq partie du monde » décède dans un hôpital de Buenos-Aires et que sa fille Luisita devient orpheline…
Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Après les yeux noirs de leur cousine, ils découvraient son teint blanc, que le long voyage n’avait pas brouillé, sa fine bouche qui semblait une cerise fraîche, attardée dans la saison et plus appétissante que les plus beaux raisins, – tous ses traits si jolis, si beaux, que jamais ils ne s’étaient sentis comme cela remués au fond d’eux-mêmes par un minois de femme. Ils pensèrent qu’ils l’auraient désormais à côté d’eux, toujours, au repos, au travail, les soirs d’été sous le vieux poirier, les soirs d’hiver à la cuisine, devant la cheminée où flambent les grosses bûches. Cette pensée leur causa une sorte de peur très douce, qu’ils n’auraient su expliquer : la peur d’une chose qu’on attend, qu’on voit, qu’on veut avoir, qui fait mal, dont on mourra peut-être, mais à laquelle on ne renoncerait pour rien au monde. Quant à elle, personne n’aurait pu deviner ce qui se passait au fond de ses yeux infinis, sous son délicieux petit front qu’encadraient les bandeaux de ses cheveux noirs comme ses yeux. Peut-être se disait-elle simplement : « Voilà deux ours qu’il me va falloir apprivoiser. » Peut-être avait-elle peur aussi, autrement, soit de leurs blouses bleues, soit de l’inconnu de sa nouvelle vie.

Chapitre Il
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Le crépuscule tombait. La maison, avec son toit bas, l’étang derrière la palissade, à côté du fumier, le jardin où de vieilles fleurs poussent amicalement parmi les légumes, le verger planté de pommiers arrondis, l’avenue bordée de noyers qui mène à la grande route, tout cela se noyait déjà dans l’ombre ; tandis que plus loin, à mi-côte, parmi les vignes, le clocher de l’église, remis à neuf depuis peu, étincelait dans un rayon de lumière frisante. Des bandes de nuages assombrissaient le sommet boisé des collines, au-dessus du vignoble semé de villages.

Chapitre I
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Mon frère,
« Cette fois, j’ai bien fini mes voyages, et je ne reviendrai plus te tracasser au village. Je ne reverrai ni Borins, ni toi, ni personne : je suis en train de finir comme je devais finir, et de crever à l’hôpital. Et j’ai un souci qui m’empêche de m’en aller tranquille : une fille, que j’ai eue comme ça quelque part, et que j’ai gardée avec moi. Elle a quinze ans, et c’est une brave fille. Et moi, je voudrais bien qu’elle soit une honnête fille, qu’elle ne reste pas ici, qu’elle rentre au pays que j’ai eu tort de quitter. Alors, j’ai pensé à toi, qui dois être heureux, tranquille, à ton aise, comme les gens qui ont su rester à la même place. Et je me suis dit que tu la recueillerais peut-être, puisque c’est ta nièce : je l’ai reconnue, et elle porte notre nom. Donc, si tu veux être bon, fais-la venir. Elle aura de quoi payer le voyage, mais rien de plus, et t’arrivera sans autre chose que ce qu’elle a sur le dos, parce que je n’ai rien à lui laisser. Tâche de faire cette bonne action : ça te portera bonheur. Je m’arrête, parce que je n’y vois plus.
« Ton frère, « CHARLES BAUDRUZ. »

Chapitre I
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Sans doute, on ne pouvait dire de lui qu’il fût un ivrogne ; mais, le dimanche, il rentrait presque toujours avec une pointe ; et le vin, au lieu de le mettre en gaîté comme les autres, le rendait sombre, irritable, méchant, si bien qu’on évitait de lui parler quand il revenait de la pinte. Son père s’en inquiétait, disant, en hochant la tête : « On ne sait pas ce que ça peut donner plus tard ! » Même, ce fut dans l’espoir que le mariage le corrigerait qu’il le laissa, presque sans opposition, épouser Julie Turel, qui avait su l’enjôler : une fille sans fortune, pas jolie, jaune comme un pain d’épice, avec des lèvres minces, la bouche en circonflexe, un profil en lame de couteau. Toute laide qu’elle était, Pierre déclara qu’il la voulait ou qu’il quitterait le pays ; et on la lui donna. À cette heure, elle était enceinte ; sa grossesse commençait à se dessiner ; le père Baudruz qui la traitait assez mal les premiers temps, s’adoucissait peu à peu à la perspective d’être grand-père.

Chapitre I
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Le sifflet du train les appela sur le quai d’arrivée, où des voyageurs descendirent. Comment distinguer leur cousine d’Amérique, parmi ces visages inconnus ? Personne ne ressemblait à l’image qu’ils s’en étaient faite, et qui flottait dans leurs yeux : une fillette maigre, exténuée, vêtue de loques, avec des airs de chien perdu. Mais, comme les nouveaux arrivants quittaient la gare, ils remarquèrent une grande jeune fille élégante, coiffée d’une jolie toque noire, le visage à demi caché par sa voilette, qui restait debout à côté d’une valise, un petit sac à la main, et semblait chercher quelqu’un. (...)
Elle promenait autour d’elle des regards qui cherchent, et qui s’arrêtèrent un instant sur eux : alors, malgré la voilette, ils s’aperçurent qu’elle était étonnamment jolie, avec des yeux d’un noir ardent, des yeux si beaux, si profonds, si lumineux, qu’ils vous éblouissaient comme du soleil, et qu’une fois qu’on les avait vus, on ne pouvait cesser de les regarder.

Chapitre Il
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